Médicaments : des lancements repoussés à cause de "problèmes de fabrication"

Cette année, six approbations de médicaments ont été repoussées par l'Agence américaine des médicaments pour cause de problèmes de fabrication, soit cinq de plus que l'année dernière. Les laboratoires sont peu prolixes sur le sujet.
Jean-Yves Paillé
L'Agence américaine des médicaments assurait en 2015 mener campagne pour pouvoir rendre publique les lettres repoussant la mise sur le marché de certains médicaments.

Le prochain blockbuster de Roche attendra. Fin décembre, le laboratoire suisse a annoncé que l'Ocrevus, un traitement contre la sclérose en plaques, ne sortira pas comme prévu à la fin de l'année. En cause, le "processus de fabrication commerciale", pour lequel Roche "soumet plus de données" à l'Agence américaine des médicaments (FDA). Cette dernière a ainsi "besoin de plus de temps pour se prononcer", selon le communiqué. Roche certifie toutefois que la sûreté et l'efficacité du médicament ne sont pas concernées. Le lancement du traitement sur le marché est désormais attendu pour fin mars. Pourtant, ce dernier avait obtenu un statut de "Fast-Track" délivrée par l'Agence américaine des médicaments. Une procédure accélérée qui permet à un traitement d'être potentiellement proposé plus rapidement aux patients.

Regeneron, Sanofi et Valeant dans le collimateur de la FDA

Le nombre de problèmes de fabrication signalés concernant de nouveaux médicaments a crû cette année. Le site Fierce Pharma rappelle qu'en 2014 et 2015, la FDA n'avait relevé que deux cas au total.

En 2016, sur douze "lettres de réponse" (Complete response letter, en anglais) de la FDA adressées aux industries pharmaceutiques, six ont annoncé repousser la mise sur le marché de médicaments pour des questions tournant autour de leur fabrication.

Ces lettres de la FDA sont envoyées à un laboratoire pharmaceutique si l'agence "détermine qu'elle n'approuvera pas l'application (du médicament, NDLR)  en l'état". Elle décrit "toutes les déficiences spécifiques que l'Agence a identifié et peut réclamer des actions spécifiques", explique l'Autorité américaine.

En octobre 2016, le groupe pharmaceutique Sanofi a également eu droit à sa missive. Il a reçu une lettre de la FDA repoussant sine die l'autorisation de mise sur le marché du sarilumab aux États-Unis. Le géant français, qui développe cette molécule contre la polyarthrite rhumatoïde en association avec Regeneron, évoquait des "déficiences de fabrication".

"La demande de licence ne peut être approuvée tant que ces carences n'auront pas été résolues de manière satisfaisant", a-t-il ajouté. Sanofi assure avoir proposé un "plan correctif", sans donner plus de détails.

Des détails souvent cachés

Pas facile donc de connaître les problèmes précis auxquels font face ces sociétés pharmaceutiques. Il faut dire que la FDA ne rend pas public le contenu de ses lettres. Et les laboratoires pharmaceutiques ne sont pas forcés de dévoiler tous les détails, au nom du droit de protection d'informations confidentielles.

En 2015, la revue scientifique de référence Nature évoquait des détails clés souvent omis des communiqués publiés par ces derniers. Même son de cloche du côté d'un article de la revue de BMJ publié la même année, et s'appuyant sur des documents de la FDA. La publication s'est intéressée à 61 lettres de ce type envoyé par l'Agence américaine des médicaments aux sociétés pharmaceutiques entre août 2008 et juin 2013.

Avec des conclusions éloquentes: 21% des communiqués de presse des laboratoires pharmaceutiques ne donnaient pas les raisons ayant incité l'Agence américaine des médicaments à repousser l'approbation des molécules concernées. Au total, seuls 14% des 687 raisons invoquées par la FDA étaient citées dans les communiqués étudiés.

Du processus de fabrication à la présence de contaminants

Dans un livre blanc publié en 2015, le cabinet d'avocat américain Husch Blackwell s'est penché sur la question. La majorité des missives de la FDA concernent le processus de fabrication des médicaments et donc la difficulté de respecter les bonnes pratiques imposées par le cahier des charges fixé par l'Agence des médicaments. Ces difficultés sont relevées à l'issue d'inspections effectuées par l'autorité de santé.

Cela peut concerner des problèmes "complexes" de processus de fabrication, de mise en application de méthodes, ou de sûreté de la production. Et parfois, à l'issue de ses inspections, la FDA souligne la présence de contaminants, de médicaments présentant des impuretés, ou encore un équipement insuffisamment stérile.

L'Agence américaine des médicaments, quant à elle, assure mener campagne auprès de l'industrie pharmaceutique pour pouvoir rendre ces lettres publiques.

Jean-Yves Paillé

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Commentaires 2
à écrit le 28/12/2016 à 11:50
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La santé doit être nationalisée et gérée par des collectifs de citoyens et non par des politiciens qui ont des intérêts liés aux entreprises du secteur.

à écrit le 28/12/2016 à 7:21
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Le but est de soigner l'actionnaire pas les malades. Tout le monde le sait.

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