Santé : Provepharm voit la vie en bleu

Après avoir réhabilité le bleu de méthylène et l’avoir transformé en produit de qualité pharmaceutique, le groupe Provepharm poursuit son développement avec la mise à disposition de nouveaux traitements issus de molécules existantes. Récit. ( Cet article est issu de T La revue n°14 - Santé : un équilibre en jeu, actuellement en kiosque).
(Crédits : Istock)

Elle est née pépite de la pharma, elle est, vingt ans plus tard, un acteur majeur du secteur de la santé. Pas seulement en France, mais aussi à l'international où cette entreprise, créée et toujours implantée à Marseille, a parié depuis ses débuts sur le simple et l'efficace, sur des molécules connues mais capables, via de nouveaux médicaments, de répondre à des besoins non satisfaits. Atypique de plusieurs façons mais « Great Place to work », la société qui a construit sa particularité sur le bleu de méthylène, qu'elle a réhabilité, a faim de croissance - externe notamment - et aime bousculer les standards, prête à en inventer d'autres.

L'histoire de Provepharm est de celle que ne renieraient pas les meilleurs scénaristes de fiction. Avec ce mélange de folie, de « chance » - de destin diront certains - et de courage aussi, sur fond d'amitié. Tous les ingrédients, pour un scénario réussi. Provepharm naît d'abord sous le nom de Provence Technologie, en 1998. À sa tête, Michel Féraud et Christophe Baralotto, amis dans la vie, associés désormais dans l'entreprenariat. Après un cursus commun, les voici aux manettes de ce laboratoire de recherche et développement en chimie. Ou comment devenir le sous-traitant, discret mais efficace, des grands groupes et autres pépites issues des biotechnologies. Mais la R&D a ceci de passionnant que par nature elle ouvre à l'expérimentation, à la découverte, voire à la redécouverte. C'est ainsi que le jeune laboratoire va travailler sur un procédé de synthèse du bleu de méthylène, scientifiquement appelé chlorure de méthylthioninium. Un procédé innovant qui donne lieu à un brevet, d'envergure mondiale. Et voilà comment tout a commencé.

De laboratoire de R&D à groupe pharmaceutique

C'est grâce à cette innovation que naît véritablement Provepharm, étant d'abord une filiale de Provence Technologie avant de s'émanciper. L'entreprise grandit au gré d'une acquisition - la première mais certainement pas la dernière - qui place la jeune société, basée à Marseille, en bonne position dans le secteur pharmaceutique. Mais il faut attendre 2016 pour que l'accord de la FDA - la Food &Drug Administration américaine - lui ouvre les portes de l'Amérique. Un cap important, un virage, un tournant, puisque Provepharm s'affirme ainsi et devient Provepharm Life Solutions. Un changement dans la continuité, certes, mais un changement tout de même.

Depuis lors, le discret laboratoire marseillais, sans autre prétention que de se mettre au service de la recherche et du développement, au service de la pharma, se spécialise dans le repositionnement de molécules historiques, connues, capables de répondre, par ses nouveaux médicaments, à des besoins médicaux non satisfaits.

Une entreprise robuste, financée, avec des ambitions toujours clairement définies. En 2019, soit un an avant la crise, une unité pilote de production se met en route à Château-Gombert, ce lieu d'innovation bien connu des Marseillais.

Apollo... l'acquisition qui fait décoller

Le dirigeant de Provepharm, Michel Féraud, va être confronté, comme tout un chacun, aux conséquences de la crise sanitaire. Avec ses confinements qui gèlent toute activité de déplacement et presque toute transaction économique. Pourtant, c'est bien durant cette période délicate que Provepharm connaît l'une des étapes majeures de son histoire en réalisant et finalisant une opération de croissance externe... aux États-Unis. Sans y mettre un pied, tout se faisant de façon dématérialisée. Et cela ne s'invente pas, la société qui tombe dans le giron de l'entreprise marseillaise se nomme... Apollo Pharmaceuticals. Une acquisition qui place Provepharm en orbite en quelque sorte. D'abord parce qu'elle met dans la corbeille de la mariée tout son catalogue de produits et fait ainsi grossir le portefeuille de la Française. Mais aussi parce qu'elle s'est positionnée sur la vente directe, ce qui est alors un axe totalement nouveau pour Provepharm, qui vient tout juste de l'inscrire dans sa stratégie, neuf mois plus tôt. Une acquisition qui clairement constitue un avant/après. S'il reconnaît qu'« il n'y a pas de place pour le hasard », Michel Féraud dit aussi qu'« il est important d'avoir la tête dans les étoiles et les pieds sur terre ». Avoir des rêves donc et mettre en place les actions pour les concrétiser.

Rechercher, construire, grandir... L'ambition de Michel Féraud est claire : Provepharm a vocation à devenir un groupe pharmaceutique. Mais grandir encore, nourrir l'ambition nécessite un carburant primordial : le financement. En 2021, soit moins de douze mois après le rachat d'Apollo Pharmaceuticals, une levée de fonds de 120 millions d'euros est conclue avec l'objectif de combler l'appétit de croissance. Car Michel Féraud ne déroge pas à sa stratégie : s'assurer avant tout de bénéficier des ressources financières nécessaires avant d'entamer les démarches de ce qui sera la prochaine opération de croissance externe. « Le marché est à ce point compétitif que l'on ne peut pas se permettre d'arriver sur un dossier d'acquisition en se posant la question du financement. »

Maillon de l'industrie souveraine

Mais en attendant celle qui pourrait encore lui faire prendre du poids, Provepharm poursuit sa route, déroule la roadmap. L'an dernier, c'étaient une autorisation de mise sur le marché et un accord - le second - de la FDA qui lui ont permis de mettre Bludigo sur le marché. Avec deux mois d'avance sur le calendrier prévu, « alors que nous sommes en période post-covid », la crise n'étant pas la période favorable pour mener des essais cliniques...

Ce médicament - premier carmin d'indigo injectable - est une aide à la visualisation pour des interventions chirurgicales gynécologiques et urologiques. « Il s'agit du même type de produits et de la démarche que pour le bleu de méthylène », raconte Michel Féraud. « Six ans après, nous renouvelons la même performance. »

Aujourd'hui, Provepharm ce sont cinq gammes : colorants, antidote, vitamines injectables, gamme métabolisme et neuroscience. C'est aussi un projet d'agrandissement de son usine à Marseille. Et la satisfaction d'avoir été consacrée « Great Place to work » pour la troisième année consécutive. Alors même que « Provepharm change d'échelle », souligne Michel Féraud. Pour l'industrie - que l'on veut souveraine, notamment dans le domaine du médicament - c'est un joli signe.

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