« Santé : un traitement médiatique à double face » (Jonathan Curiel)

CHRONIQUE - Qu’il soit de cinéma, de télé, de smartphone, d’ordinateur ou de tablette, l’écran est partout. Révélateur des transformations de notre société, il en est parfois à l’origine. Un double rôle que décrypte Jonathan Curiel* pour T La Revue. (Cet article est issu de T La revue n°14 - Santé : un équilibre en jeu, actuellement en kiosque).
(Crédits : Astrid di Crollalanza)

De nombreuses émissions à la télévision et à la radio ont fait leur miel du besoin contemporain de bien-être. Les téléspectateurs veulent maîtriser et mieux connaître leur corps : les programmes relatifs à la santé, souvent pédagogiques et concrets, répondent à cette demande.

Les médecins médiatiques, eux, sont partout. Nouvelles stars des écrans. Conseils bien-être, activités sportives, bobos du quotidien. Leurs livres sont des succès en librairie. Chacun y va de sa recette pour une vie saine : jus détox à base de grenade et de concombre oublié pour retrouver la forme ; jeûne intermittent 16/8 nous interdisant de prendre, par exemple, un petit-déjeuner (alors que l'on nous dit l'inverse depuis 30 ans) ; non-utilisation du portable au lit (à cause de la fameuse lumière bleue qui rendrait dingue) pour un meilleur sommeil...

Les réseaux sociaux participent aussi au phénomène : en plus des médecins, des influenceurs santé, bien-être et minceur pullulent. Régime keto, révolution glucose, abdos fessiers à gogo... tout y passe chez ces nouveaux gourous adeptes du clic et du like. Addictif.

Intéressant également : les films dans les salles obscures sur les médecins et l'hôpital reviennent en force (Hippocrate, Première Année ou Médecin de campagne). Les séries sur le monde hospitalier en revanche ne datent pas d'hier : de Nip Tuck sur la chirurgie esthétique à Urgences en passant par Dr House, Grey's Anatomy ou même H. Films et séries nous immergent dans cet univers médical clos, haletant, à forte adrénaline et humain.

Un point de bascule s'est néanmoins opéré récemment : la thématique de la santé a pris des accents plus graves.

Première explication : le COVID. La santé est devenue omniprésente ; on en a parlé du matin au soir ; tous les Français sont devenus membres de l'Académie de médecine ; ils avaient tous un avis pointu sur les vaccins, la chloroquine, le bouc et les chemises à carreaux du professeur Raoult. Alors que le doute devait théoriquement prévaloir durant cette période étrange, il a été balayé par des blocs de certitudes. Alors que la période aurait pu être un moment propice à l'explication et à la mise en avant de la science, elle a été marquée par des affrontements et des polémiques.

Deuxième explication : l'état de l'hôpital en France, les problèmes de soins et les déserts médicaux. Et pourtant : 226,7 milliards d'euros en 2021, soit 9,1 % du PIB, l'équivalent de 3 350 euros par habitant par an ! Il n'empêche : des sujets dans les journaux d'information, magazines et autres investigations sur un système à bout de souffle, un hôpital en pleine déréliction et des enquêtes sur les fraudes à la sécurité sociale obtiennent les faveurs du public qui constate ces manquements.

Deux faces de la santé coexistent donc sur nos écrans : celle de la compréhension, du savoir, de la découverte, et celle d'une thématique « anxiogène », expression en vogue dans le petit monde des médias, nouveau combustible à clashs et scandales.

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Commentaire 1
à écrit le 20/05/2023 à 21:03
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Les médecins on préférerait les voir dans leur cabinet à écouter ET soigner les gens.! Le serment d'Hippocrate, il n'a pas été prévu qu'il soit exercé dans les médias et diverses chaînes d'information en continu. (Où, pendant le Covid les "professi...

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