Areva : augmentation de capital relancée et bras de fer avec EDF en Chine

Jean-Dominique Comolli, le commissaire aux participations de l'État, rentre du Qatar où il est allé négocier une partie de l'augmentation de capital d'Areva. Le groupe public nucléaire français négocie par ailleurs la vente de deux EPR supplémentaires à la Chine...séparément d'EDF alors que l'Etat exige qu'ils coopèrent.

L'Élysée ayant, enfin, donné son feu vert cet été à l'augmentation de capital d'Areva, décidée en juin 2009, les services de Bercy réactivent le dossier afin de la boucler d'ici à la fin de l'année. Selon nos informations, le nouveau commissaire aux Participations de l'État, Jean-Dominique Comolli, rentre tout juste du Qatar, où il est allé renouer le dialogue avec le fonds souverain quatari (QIA), l'un des trois investisseurs pressentis pour se partager environ 15 % du capital d'Areva.

Le QIA, son homologue du Koweit (KIA) et l'industriel japonais Mitsubishi patientent depuis près de dix-huit mois pour réaliser cette opération. « Si les investisseurs sont toujours là, c'est que nous sommes attractifs », se félicite-t-on en interne chez Areva. Reste pour le gouvernement, qui contrôle 93 % d'Areva, à négocier le prix et les questions de gouvernance. « Côté valorisation, les estimations sont désormais plus réalistes que les 20 milliards d'euros précédemment avancés par Bercy », souligne un proche du dossier. Au printemps dernier, Anne Lauvergeon affirmait attendre 3 milliards d'euros de cette augmentation de capital. Aujourd'hui, les valorisations affichées pour le groupe se situent entre 10 et 12 milliards d'euros, au maximum.

Machine à cash

« Areva sera en 2012 un véritable machine à cash », vante-t-on pourtant dans le groupe. « Après le chantier finlandais, tous les nouveaux projets de réacteurs seront à marge positive, promet-on. L'activité énergies renouvelables ne sera plus une start-up et gagnera alors de l'argent. » Sans compter la future usine d'enrichissement Georges Besse II et « son énorme profitabilité ».

Côté gouvernance, seul le Qatar aurait demandé un siège au conseil d'administration. Mitsubishi n'aurait rien réclamé de tel. L'Élysée y serait de toute façon opposé. « On aurait de toute façon un problème pour l'expliquer aux États-Unis où nous contrôlons chacun la moitié du marché des composants lourds », glisse-t-on chez Areva, en écartant la possibilité d'une entrée du japonais au niveau de la seule filiale réacteurs, envisagée par le gouvernement.

Compétitiion avec EDF en Chine

Pendant ce temps, en Chine, « l'équipe de France du nucléaire », chère à Nicolas Sarkozy, reste un voeu pieux. La filière française d'avancer ses pions, mais en ordre dispersé. Areva espère ainsi profiter de la visite à Paris du président chinois Hu Jintao, début novembre, pour décrocher la commande de deux nouveaux EPR, qui viendraient s'ajouter aux deux réacteurs français de troisième génération en construction à Taishan, dans le sud de la Chine. Il s'agirait d'un protocole d'accord, première étape avant un contrat définitif.

Ironie du sort, très française, Areva négocie ce contrat avec l'électricien chinois CGNPC, copropriétaire avec EDF, des deux premiers EPR qui sortent de terre actuellement. EDF détient 30 % de la société commune qui construit et va exploiter les réacteurs de Taishan 1 et 2. Pour autant, les Français ne se parlent pas. « Notre interlocuteur unique est l'opérateur majoritaire CGNPC », précise-t-on chez Areva. Quant à EDF, pour l'heure, il n'est pas associé aux projets de Taishan 3 et 4. Mais il y travaille. « Nous avons un partenariat de longue date avec CGNPC que nous souhaitons élargir. Des discussions sont en cours », déclare l'électricien.

« Tout le monde se focalise sur le contrat perdu à Abu Dhabi, mais le vrai échec du nucléaire français, c'est la Chine, s'exclame un fin connaisseur du secteur. EDF et Areva se disputent sur place depuis des décennies, pendant ce temps-là, les Chinois rigolent. » Ils ont, en tout cas, passé fin 2006 à Toshiba-Westinghouse leurs premières commandes de réacteurs de troisième génération. Et n'ont signé un contrat de 8 milliards d'euros avec Areva fin 2007 qu'après l'entrée d'EDF dans le jeu, comme investisseur. EDF et Framatome (ancêtre d'Areva) ont pourtant déjà construit ensemble, entre 1987 et 2002, pour le même CGNPC, les centrales de Daya Bay et de LingAo.

Technologie inédite

Début novembre, Areva table, par ailleurs, sur des avancées dans la discussion initiée de longue date avec la Chine sur une usine de retraitement du combustible usé. Un accord intergouvernemental pourrait être paraphé. Les deux pays ont déjà signé un accord de coopération sur ce sujet fin 2007. Les discussions sur cette usine, réalisées sous l'oeil des Nations unies, ont longtemps achoppé sur la question de la séparation du plutonium, issu du retraitement. Désormais, Areva propose un « retraitement de troisième génération », c'est-à-dire une usine qui récupérerait le plutonium et le mélangerait, directement, avec de l'uranium pour former un nouveau combustible. Une technologie inédite dont le coût est estimé à 15 milliards d'euros.

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