La France s'est donnée pour objectif d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Cette ambition suppose de revoir le mix de notre production électrique. Dans cette optique, RTE, le gestionnaire du réseau de transport électrique, a lancé une vaste étude dès 2019. Il publie, ce mardi 8 juin, six scénarios dans lesquels le photovoltaïque, l'éolien et le nucléaire occupent des places plus ou moins importantes. Autant de pistes qui susciteront immanquablement des débats agités.
Ces scénarios sont le fruit d'une première phase dite de "cadrage", ponctuée par une consultation publique, qui a pris fin en mars dernier. Cette consultation a "suscité des réponses bien au-delà du cercle des parties prenantes expertes habituellement concernées par ce genre d'exercices : concrètement, près de 4.000 organisations et particuliers ont participé, à travers des contributions spécifiques très détaillées, lettres ouvertes, pétitions et cyberactions", précise RTE.
Un développement massif des renouvelables dans tous les scénarios
Tous les scénarios partagent des traits communs. Tous doivent permettre d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050 et tous accordent une large place aux énergies renouvelables, qui devront connaître un fort développement au cours des trois prochaines décennies. Dans chacun des scénarios, la part des énergies renouvelables est ainsi comprise entre 50 et 100% de la production nationale d'électricité, alors qu'aujourd'hui le solaire et l'éolien représentent moins de 20% du mix électrique français et le nucléaire plus de 70%.
Ces projections reposent également sur la baisse historique de la consommation d'énergie totale liée aux efforts en matière d'efficacité énergétique, et sur une augmentation de la part de l'électricité dans la consommation d'énergie finale. Augmentation dopée par le boom à venir de la mobilité électrique et de nouvelles normes environnementales dans les bâtiments, qui privilégient les systèmes électriques au détriment du gaz.
De la sortie accélérée du nucléaire...
Chaque scénario présente ensuite ses spécificités. Le premier, baptisé MO, prévoit un système s'appuyant à 100% sur les renouvelables en 2050 et implique donc une sortie complète du nucléaire à ce même horizon.
"La fermeture des réacteurs nucléaires existants est accélérée dès 2030, et les rythmes d'installation du photovoltaïque, de l'éolien et des énergies marines sont poussés au maximum", décrit le gestionnaire du réseau.
La faisabilité technique de ce scénario a déjà fait l'objet d'un rapport publié par RTE et l'Agence internationale de l'énergie (AIE) en janvier dernier. Les deux entités concluaient alors que la France pourrait, en 2050, se passer de l'énergie nucléaire à condition d'investir massivement dans les outils de flexibilité, comme les moyens de stockage par batteries et hydrogène, et le développement du réseau.
... à la construction de 14 nouveaux EPR, plus des SMR
A l'autre bout du spectre, RTE a retenu le scénario N03 où le mix de production électrique repose à part égale sur les renouvelables et le nucléaire à l'horizon 2050. Il suppose alors de maintenir en fonctionnement les réacteurs actuels, mais aussi de lancer un nouveau programme nucléaire ambitieux avec la construction de 14 nouveaux EPR (réacteurs de troisième génération) et de quelques petits réacteurs nucléaires, les fameux SMR (pour Small modular reactors), initialement pensés pour l'export. Toutefois, même ce scénario exige un développement très volontariste des centrales photovoltaïques et des parcs éoliens.
Évaluation économique, environnementale et sociétale
Entre ces deux extrémités, quatre autres scénarios intermédiaires panachent plus ou moins nucléaire et renouvelables. Deux d'entre eux (M1 et M23) prévoient, par exemple, une sortie du nucléaire à l'horizon 2060, avec soit une répartition diffuse des installations solaires ou une logique de concentration autour de grands parcs (éoliens offshore, éoliens terrestres et solaires).
Le scénario N1 mise, en revanche, sur un programme minimal de construction de nouveaux réacteurs nucléaires, avec seulement huit nouveaux EPR prévus et "développés sur des sites existants à raison d'une paire tous les cinq ans, à partir de 2035", précise RTE.
Tous ces scénarios vont désormais faire l'objet d'évaluations à l'aune de trois critères : leur impact économique, environnemental et sociétal. Les résultats de cette étude seront dévoilés à l'automne 2021.
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