Face à la menace russe, la Belgique réévalue sa sortie du nucléaire

La hausse des prix de l'énergie liée à la guerre en Ukraine pourrait pousser la Belgique à renoncer à sortir du nucléaire en 2025 comme prévu, et à prolonger l'exploitation de deux de ses sept réacteurs. Le Premier ministre Alexander De Croo a admis que la Belgique était en train de "réévaluer" sa stratégie. Pour Catherine MacGregor, la directrice générale d'Engie, revenir sur la fermeture des deux réacteurs belges exploités par le groupe "ne serait guère réaliste".
Le parti Ecolo-Groen, fervent défenseur de la sortie totale du nucléaire, a indiqué que le plan B pouvait désormais être discuté sans tabou et que son parti n'exigeait plus que le A reste le scénario prioritaire.
Le parti Ecolo-Groen, fervent défenseur de la sortie totale du nucléaire, a indiqué que le "plan B" pouvait désormais être discuté "sans tabou" et que son parti n'exigeait plus que le "A" reste le scénario prioritaire. (Crédits : FRANCOIS LENOIR)

Comme en Allemagne, une remise en cause de la sortie du nucléaire n'est pas un suet tabou en Belgique. Car si les sept partis partenaires de la coalition gouvernementale belge avaient réussi à se mettre d'accord fin décembre 2021 sur une entente concernant la sortie du nucléaire avec un arrêt des sept réacteurs à l'horizon 2025  à condition que soit garantie à la fois « la sécurité d'approvisionnement » énergétique du pays et « la maîtrise des prix », le gouvernement belge est aujourd'hui en train de « réévaluer » la situation. Ceci au regard d'un contexte géopolitique « complètement différent » de ce qu'il était fin décembre, a déclaré ce lundi 7 mars le Premier ministre Alexander De Croo, interrogé par la radio publique RTBF.

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Le parti Ecolo-Groen, fervent défenseur de ce scénario au sein de la coalition, a pour la première fois admis publiquement que les deux paramètres essentiels (sécurité garantie et prix maîtrisés) étaient fragilisés par le conflit russo-ukrainien et l'éventualité de sanctions occidentales frappant le secteur russe de l'énergie.

« Aujourd'hui on voit bien que les prix augmentent, et que l'indépendance de la fourniture n'est plus garantie, et donc il est logique de se demander si la même question (des conditions d'une sortie du nucléaire, ndlr) ne mérite pas une autre réponse », a déclaré au journal Le Soir Jean-Marc Nollet, co-président d'Ecolo.

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« Plan B » : réduire le nucléaire mais pas totalement

En décembre, malgré leur accord, les sept partis de la coalition au pouvoir n'avaient pas exclu un « plan B », à savoir un maintien du nucléaire à hauteur de 2 gigawattheures de capacité (soit deux réacteurs). Jean-Marc Nollet, a indiqué que ce "plan B" pouvait désormais être discuté "sans tabou" et que son parti n'exigeait plus que le "A" reste le scénario prioritaire. « Nous ne nous accrocherons pas à la hiérarchie qui a été définie dans l'accord de gouvernement et confirmée lors de l'accord de décembre », a-t-il ajouté.

« L'impact de la guerre en Ukraine est pris en compte », a fait valoir de son côté la ministre écologiste de l'Énergie Tinne Van der Straeten. Ce lundi, le prix du gaz naturel a atteint un nouveau record historique sur le marché européen, en raison de la crainte de perturbations des exportations en provenance de Russie. Pour rappel, l'Union européenne a fait venir 155 milliards de mètres cubes de gaz de Russie en 2021, soit 45% de ses importations et 40% de sa consommation totale.

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Selon Alexander De Croo, la Belgique n'est pas autant dépendante à cette seule source d'approvisionnement en gaz naturel, mais la Russie est un partenaire « moins fiable » depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février. « Au niveau européen, il y a toute une démarche de se déconnecter de la Russie du point de vue de l' énergie », a ajouté le dirigeant libéral flamand.

Dans une interview aux Echos, Catherine MacGregor, la directrice générale d'Engie, a expliqué que la fermeture des deux réacteurs belges exploités par le groupe prévue en octobre 2022 et février 2023 a été préparée et que "revenir dessus ne serait guère réaliste". "Cette question n'est pas à l'ordre du jour", a-t-elle ajouté.

Des difficultés pour compenser l'arrêt du nucléaire

En Belgique actuellement, le nucléaire compte pour environ 40% de l'électricité produite. Pour compenser l'arrêt de ses sept réacteurs, le royaume prévoit notamment de construire de nouvelles centrales à gaz pour réussir sa transition énergétique. Mais le permis de l'une d'elles, prévue sur la commune flamande de Vilvorde, n'est toujours pas octroyé. Début novembre, la ministre de l'Environnement de la région flamande avait en effet refusé le permis au groupe français Engie, l'exploitant choisi au terme d'un système d'enchères mis au point au niveau fédéral.

Or, cette centrale fait figure d'installation clé dans le dispositif du gouvernement pour assurer la sécurité d'approvisionnement. Selon une source gouvernementale interrogée en décembre, il est envisagé, comme alternative, d'opter pour une autre installation non sélectionnée lors des enchères dès lors qu'elle disposerait déjà d'un permis.

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L'accord des sept partenaires de la coalition prévoit aussi un investissement d'environ 100 millions d'euros dans la recherche sur le nucléaire de nouvelle génération, à savoir les petits réacteurs modulaires (SMR) présentés comme "plus sûrs".

La sortie du nucléaire belge ne se fera néanmoins pas sans coût. La ministre de l'Énergie, Tinne Van der Straeten, a ainsi déclaré que le démantèlement des réacteurs belges serait « l'un des chantiers les plus longs, les plus chers et les plus délicats », chiffré à environ 14 milliards d'euros.

(Avec AFP)

Commentaires 14
à écrit le 08/03/2022 à 17:55
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Le plan A avait déjà du plomb dans l'aile avec le refus de la Flandre de construire une centrale au gaz pour compenser l'arrêt d'une partie du nucléaire. La guerre en Ukraine, qui a renchéri le gaz et rendu son approvisionnement incertain inverse le...

le 09/03/2022 à 11:27
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que les ecolos paie leur ideologies de destruction et ceux dans tous les pays eux les bisounours

à écrit le 08/03/2022 à 17:19
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On a l’impression que les politiques n’ont pas compris à qui les réacteurs appartiennent, et que rien ne pourra se faire maintenant sans l’accord de la direction d’Engie (et de ses actionnaires). Le nucléaire demande d’inscrire une politique dans la ...

à écrit le 08/03/2022 à 14:47
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Je pensais que la fermeture des centrales nucléaires devait être compensée par des énergies renouvelables, comment dans ce cas l'augmentation du prix du gaz impacte-il ce scénario? La sortie du nucléaire impliquerait donc une augmentation de la conso...

à écrit le 08/03/2022 à 13:50
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Je me marre. Vraiment.

à écrit le 08/03/2022 à 8:24
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il faudrait faire passer di rupo et ses amie.es devant une cour martiale.......les gens qui te petent un syteme et viennent en plus te culpabiliser viennent ensuite te dire que ils ont change d'avis et qu'il faut leur trouver une solution........la s...

à écrit le 07/03/2022 à 22:21
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un demantelement a 14 milliards d euros. C est une blague belge ? En France, le cout est proche de 0 selon EDF car deja prevu dans le budget. ( dansle deficit de 80 milliards d euros de dettes d EDF))

à écrit le 07/03/2022 à 19:19
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Dans notre karma actuel y-en a bien une qui va sautée.. pis a trop tirer sur la corde la probabilité joue obligatoirement contre nous. Me demande si c'est pas Macron qui nous porte la poisse ?

le 07/03/2022 à 22:44
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Macron nous porte plutôt le succès. À vous.

le 08/03/2022 à 9:01
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Hors sujet en quoi Macron est responsable de l invasion Russe et de ses conséquences ?…

le 08/03/2022 à 9:03
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Hors sujet en quoi Macron est responsable de l invasion Russe et de ses conséquences ?…la fête des néolibéraux est finie … il est temps que lasetatq et la commission européenne travaillent sans lobbyistes …dont les intérêts sont divergents ou antago...

à écrit le 07/03/2022 à 19:00
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Les SMR " plus sûrs"? ...Pas sûr 🤕.

à écrit le 07/03/2022 à 18:01
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La menace Russe...! On peut dire que cela réfléchie a une rapidité pas croyable dans les hautes instances! ;-)

à écrit le 07/03/2022 à 17:01
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Ne sommes nous pas victimes de notre lavage de cerveau consumériste permanent faisant croire à certains, à la classe dirigeante bien sûr puisque seule elle peut agir puisque possédant tout tandis que nous autres nous ne pouvons rien faire puisque ne ...

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