
Une mauvaise nouvelle n'arrive jamais seule. Et un deuxième loupé se profile pour le gouvernement après celui observé lors du dernier appel d'offres sur l'éolien terrestre. Selon nos informations, l'appel d'offres lancé cette fois sur les projets de parcs photovoltaïques au sol, dont les candidatures ont été clôturées en décembre dernier, va déboucher lui aussi sur un fiasco.
A l'instar de celui sur l'éolien, où 6% seulement des volumes initialement recherchés ont été retenus, la majorité des postulants présentera un vice de conformité. Si bien que sur les 925 mégawatt-crête (MWc) appelés par la puissance publique, seule une toute petite partie risque d'être effectivement attribuée. De quoi, là encore, retarder la mise en service de nouvelles capacités d'énergies renouvelables en France, au moment même où l'exécutif martèle son souhait d'accélérer en la matière.
« Il ne fait aucun doute qu'il va y avoir un bis repetita », explique à La Tribune l'un des producteurs retoqués lors de l'appel d'offres sur l'éolien terrestre, et dans la course pour celui sur le solaire. « On sait aujourd'hui qu'on se dirige vers les mêmes pourcentages de rejet », confirme une source proche du dossier ayant requis l'anonymat.
Imbroglio général
En effet, pour la sélection des derniers lauréats sur l'éolien terrestre, dont les résultats ont été publiés en début de semaine, la majeure partie des candidats - correspondant à 75% de la puissance appelée - n'ont pas intégré une récente modification du cahier des charges imposé par le gouvernement, entraînant leur disqualification pure et simple. Si bien que finalement, 54 mégawatts (MW) de puissance ont été octroyés sur les 925 MW demandés - un « loupé historique », selon la Commission de régulation de l'énergie (CRE), l'instance chargée d'examiner les dossiers.
« Il y a eu un changement très précis dans la manière de remplir le formulaire sur les garanties financières, qui doivent désormais durer plus longtemps, et à côté duquel quasiment tous les opérateurs sont passés », précise un porteur de projet.
Or, un scénario similaire s'annonce pour l'appel d'offres sur le photovoltaïque au sol, puisque celui-ci inclut la même révision du cahier des charges, et s'est clôturé au même moment, le 23 décembre 2022. Résultat : selon plusieurs sources, quasiment tous les postulants ne l'auraient pas correctement pris en compte dans leur dossier, entraînant un imbroglio général.
Un calendrier embarrassant
Reste à voir si ce nouveau couac aboutira sur un deuxième appel d'offres « pour rien », autrement dit si la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) délivrera des autorisations pour une puissance très largement inférieure à celle appelée, en évinçant l'immense majorité des exploitants du fait d'un banal vice de forme. De son côté, la CRE n'a pas officiellement délibéré, et le pourcentage exact de non-conformité reste inconnu.
Une chose est sûre : « Cela fait vraiment désordre, alors que la loi d'accélération des énergies renouvelables vient d'être adoptée », souffle l'un des candidats. D'autant que, comme pour les quelque 900 MW de projets éoliens rejetés, les infrastructures photovoltaïques concernées pourraient fournir de l'électricité au réseau dès l'hiver 2024. Ce qui rapporterait à l'Etat de précieuses recettes dans le cas où les cours continueraient de flamber, puisque les opérateurs des parcs solaires versent à la puissance publique l'excédent qu'ils perçoivent quand les prix de marché sont supérieurs au tarif retenu lors de l'appel d'offres.
Vers une régularisation des dossiers ?
Dans ces conditions, plusieurs producteurs d'énergies renouvelables formulent une demande précise : avoir la possibilité de régulariser leur dossier en cours de route, afin de rester dans la course, et par là-même éviter de perdre des mois décisifs.
« C'est déjà possible pour les appels d'offres dans l'éolien en mer : s'il manque une pièce, la CRE peut le notifier au porteur de projet, pour qu'il y remédie dans un délai de quelques semaines. Pourquoi n'est-ce pas le cas pour l'éolien terrestre et le photovoltaïque ? », s'interroge l'un des producteurs d'énergie éolienne rejeté.
Selon le gouvernement cependant, pour ce qui est de l'éolien terrestre, les représentants des fédérations renouvelables n'avaient « pas souhaité que les dossiers soient rattrapés en laissant un délai pour corriger les non-conformité », considérant que cette démarche était « moins sûre juridiquement que la relance d'un nouvel appel d'offres » dit « de rattrapage ». Il n'empêche que, « cette fois-ci, le ministère regarde s'il peut régulariser les dossiers sans devoir recommencer toute la procédure, afin de ne pas perdre plusieurs mois », affirme une source informée à La Tribune. Mais pour l'heure, rien n'est encore décidé.
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