Paris a perdu 1,2 milliard d'euros du fait de la crise Covid. C'est pourquoi dès juin 2021, Anne Hidalgo a demandé au président du groupe Communiste et citoyen Nicolas Bonnet-Ouladj et à l'adjoint chargé des Finances, du Budget, de la Finance verte et des Affaires funéraires Paul Simondon de plancher sur « des analyses des ressources existantes et l'identification de potentiels nouveaux leviers, notamment fiscaux, compatibles avec des objectifs de préservation de l'environnement et de justice sociale ».
« Faire davantage contribuer le commerce de livraison »
Avec un an de retard, le rapport intitulé « Avenir des finances locales à Paris : des propositions pour un système plus juste, social et écologique » vient d'être dévoilé par ses auteurs. Trois mois après la présentation de la stratégie pour une logistique urbaine, le sujet du commerce de livraison fait partie des pistes de réflexion.
Le titre de la proposition numéro 13 donne le ton. Il s'agit de « faire davantage contribuer l'économie numérique et le commerce de livraison ». « Cela peut porter sur la mise en place d'une taxe ou redevance », écrivent les deux élus parisiens.
« Nous sommes face à des défis - crise sanitaire, crise énergétique... - et devons trouver des nouvelles ressources pour les collectivités afin qu'elles financent leurs services publics », explique l'adjoint (PS) chargé des Finances.
« Quels sont les secteurs qui sont peu ou pas mis à contribution ? La livraison permanente bénéficie beaucoup de l'attractivité des territoires, de la densité et des clients potentiels » répond à lui-même Paul Simondon.
Une taxe ou une redevance ?
En priorité, il plaide ainsi pour une taxe ou une redevance sur les flottes de livraison sur la base de leur utilisation de l'espace public. « Nous pouvons les faire contribuer en fonction de la taille de leur flotte », avance-t-il, évoquant des « externalités négatives » comme le trafic automobile, la concurrence avec les commerces de proximité ou le développement des « dark stores ». En cela, la capitale souhaite reproduire le schéma introduit par la loi d'orientation des mobilités (LOM) qui permet aux villes de mettre en place une redevance sur les véhicules en « free floating », c'est-à-dire en libre service dans l'espace public. C'est ce qui a conduit récemment à la fin de la gratuité pour le stationnement des deux-roues.
Autre piste : une taxe ou redevance sur la base de critères économiques en imposant une taxe à la livraison sur les produits livrés. Une taxe payée par l'entreprise. Là encore, L'adjoint d'Anne Hidalgo évoque les « externalités négatives » et insiste sur l'utilisation de l'espace public.
Avant-dernière idée dans ce domaine : une taxe ou une redevance sur la base d'une contribution forfaitaire en fonction d'un indicateur objectif d'activité permettant de renforcer la diversité commerciale et/ou en fonction du chiffre d'affaires réalisé par ces sociétés dans l'aire urbaine prédéfinie.
Vers une « fiscalité incitative » en fonction des modalités logistiques ?
Autrement dit, Paul Simondon rêve d'une « fiscalité incitative » en fonction des modalités logistiques: sites utilisés, véhicules employés... « Il faut que ce soit le plus vertueux possible au bénéfice des territoires qui entretiennent l'espace public », affirme-t-il.
La proposition 14 du socialiste et du communiste est sur la même ligne : la régulation des entrepôts en zone urbaine pourrait être complétée par une taxation des « quick commerce » et des « dark kitchens », ces cuisines centrales qui préparent des repas sans client et qui se présentent comme restaurants.
Depuis le 6 septembre, les ministres Klein (Ville) et Grégoire (Commerce) se sont engagés auprès des édiles à changer la réglementation des « dark stores », ces anciens commerces aux vitrines opaques spécialisés dans la préparation des livraison de produits de consommation courante commandés sur internet. Ils seront désormais considérés comme des « entrepôts » dans le Code de l'Urbanisme. S'agissant des « dark kitchens », les parties prenantes ont convenu de créer une catégorie spécifique.
Sans attendre, l'adjoint à la maire de Paris réfléchit, à haute voix, à une « fiscalité spécifique » sur les entrepôts dans les zones d'activité urbaines denses au lendemain de « la levée de l'ambiguïté » gouvernementale.
Reste aux parlementaires de s'en saisir
Reste une ultime étape et non des moindres: la reprise de ces recommandations par les parlementaires d'ici à la présentation du budget 2023 en Conseil des ministres fin septembre.
« Nous ne nous arrêtons pas aux élus de gauche et saisissons tous les parlementaires parisiens de tous les groupes politiques, tout comme nous l'avons présenté aux associations d'élus, par exemple en commission des Finances à l'Assemblée des départements de France », déclare Paul Simondon.
Tant est bien que l'élu parisien l'assure: « l'unanimité transcende les clivages entre les différentes formes de collectivités territoriales ». Un mot déjà répété maintes fois ces derniers jours mais en particulier par les deux membres du gouvernement Borne après l'accord trouvé hier sur les « commerces fantômes ».
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