L'information a été annoncée le 30 octobre dernier, en pleines vacances scolaires de la Toussaint : un Conseil national du commerce va être mis sur pieds dès le 1er décembre prochain. Piloté par Thierry Mandon, ancien secrétaire d'Etat à la Réforme de l'Etat et à la Simplification de François Hollande, il est censé représenter le secteur et travailler à son évolution. Sa mission : présenter des propositions concrètes et rapides dès le mois de juin 2023, dixit l'actuelle ministre des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme.
En réalité, Olivia Grégoire fait suite à un événement de décembre 2021, les « Assises du commerce » organisées par le gouvernement Castex. Toutes les sociétés, GAFAM comprises, y avaient été invitées à débattre de la reconquête territoriale, des impacts des nouveaux modes de consommation, de l'équité de traitement et des conséquences sur l'emploi.
L'enjeu est de taille. Avec, en 2021, 518 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 2,1 millions d'emplois et 435.000 entreprises selon les chiffres rappelés par Bercy, le commerce est en pleine transformation environnementale et numérique.
Une synthèse très politique
Lors de ce rendez-vous l'an dernier, quatre ateliers ont réuni 200 participants avant qu'une restitution des débats ne soit remise en janvier 2022 aux trois ministres concernés de l'époque: Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance, Elisabeth Borne, ministre du Travail, de l'Emploi et de l'Insertion, et Jean-Baptiste Lemoyne, ministre délégué chargé des PME.
Dès juin 2022, au lendemain du second tour des élections législatives, La Tribune publiait cette synthèse très politique. Il en ressortait déjà quatre tendances lourdes pesant sur les acteurs du commerce et sur les territoires: « les aspirations contradictoires du citoyen-consommateur », « la concomitance de la montée en gamme et de l'essor du discount », « le tsunami de la numérisation du commerce accéléré par le Covid » et « la présence de nouveaux acteurs internationaux avec une force de frappe inégalée ».
Le même fonctionnement que le Conseil national de l'industrie
Interrogée sur ce point par La Tribune lors d'une rencontre avec l'association des journalistes économiques et financiers (AJEF), la ministre des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme cite la guerre en Ukraine, la présidentielle et les législatives pour expliquer l'absence de publication officielle des recommandations des parties prenantes.
« Le 1er décembre 2022, nous reprendrons les conclusions des 'Assises' mais cela nécessite de créer un organe de gouvernance. Le Conseil national du Commerce aura le même fonctionnement qu'un Conseil national de l'industrie destiné à échanger », explique Olivia Grégoire.
Une liste de courses déjà adressée à Olivia Grégoire
Equité fiscale, équité territoriale, transformation des friches commerciales et des grands ensembles désertifiés, enjeux de décarbonation, simplification pour la mise en place de panneaux photovoltaïques, renaturation... Sans attendre le 1er décembre, les acteurs économiques et politiques ont déjà adressé cette liste de courses à la mère Noël du gouvernement Borne.
En réalité, la filière fait déjà l'objet de différentes politiques publiques depuis le premier quinquennat Macron entre dispositions pérennes inscrites dans la loi et programmes de revitalisation ciblés sur certaines collectivités territoriales: « Action Cœur de ville » pour les villes moyennes, « Petites villes de demain » pour les petites villes ou encore l'« Agenda rural » pour les villages de moins de 3.500 habitants. Deux maires ont, encore, plaidé mi-octobre pour la création d'une aide au maintien du dernier commerce.
36 millions d'euros dans le budget 2023
Une demande déjà entendue par la ministre des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme qui a fait savoir, le 30 octobre dans le JDD, que 36 millions d'euros avaient été budgétés dans la loi de finances 2023 en ce sens. 12 millions seront fléchés vers les commerces ruraux et viendront en plus des programmes de revitalisation ciblés sur les collectivités territoriales, assure aujourd'hui Olivia Grégoire.
« Avec le retour en force du commerce ambulant, apparaît la nécessité d'investir dans des trucks pour aller de village en village », justifie-t-elle.
Les 24 millions d'euros restants seront, eux, affectés à 10 voire 30 démonstrateurs qui intègrent le commerce dans un lieu de vie « densifié et mêlé à des logements, des services et des bureaux ». Autrement dit, dans les entrées de ville et/ou dans les zones commerciales où parkings gigantesques côtoient hypermarchés, magasins d'ameublement, de bricolage, vendeurs de vérandas, franchises de restaurants ou encore jardineries.
Des appels à projet et des appels à manifestation d'intérêt
Dans les deux cas, les acteurs économiques et politiques qui voudront prétendre à ces espèces sonnantes et trébuchantes devront répondre à des appels à projet et à des appels à manifestation d'intérêt. Deux dispositifs dont les élus locaux ne cessent pas de plaindre car n'ayant pas nécessairement l'ingénierie interne pour y répondre.
« Beaucoup d'acteurs de l'économie sociale et solidaire peuvent être parties prenantes », rétorque la ministre des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme qui a été... secrétaire d'Etat à l'Economie sociale et solidaire de juillet 2020 à mai 2022.
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