Net-a-Porter, la star du luxe en ligne, suscite les convoitises

Les rumeurs vont bon train sur la galerie en ligne de prêt-à-porter de luxe britannique Net-a-Porter, le site qui a donné son nom à la filiale du suisse Richemont. Moins connues, ses deux extensions, MrPorter, spécialisé dans la mode haut de gamme masculine, et TheOutnet, un site de déstockage, testent de nouvelles méthodes pour faire griller les cartes bleues virtuelles de leurs clients.
Marina Torre
L'Anglo-américaine Natalie Massenet, née en 1965, fut rédactrice de mode pour Women's Wear Daily.

Qui mettra la pépite Net-a-Porter dans sa besace ? Depuis son acquisition par le groupe suisse Richemont pour 350 millions de livres (390 millions d'euros de l'époque) en 2010, le flot des rumeurs concernant ce portail de sites de vente en ligne de produits de luxe ne s'est pas tari. Bien au contraire.

Dernier bruit en date : des négociations avec Amazon pour une mise en vente qui valoriserait l'entreprise 2 milliards d'euros. Aucune partie concernée n'a souhaité commenter ces "révélations" publiées par Forbes et le journal spécialisé Women's Wear Daily. Des sources proches du dossier ont toutefois indiqué à la Tribune que de telles discussions étaient improbables.

Magazine de mode

Reste que Net-a-Porter attise bien des curiosités. Et pour cause : avec l'italien Yoox, le portail a su vaincre les réticences de nombreuses grandes maisons de luxe jusqu'alors plutôt hésitantes à vendre leurs produits en ligne.

>> Les marques de luxe cèdent (discrètement) aux sirènes de la vente en ligne

Sa formule et son allure de magazine de mode (voir enrichissements ci-dessous) ont semble-t-il convaincu. Net-a-Porter revendique désormais 5 millions de visiteurs uniques à qui elle vend aussi bien des Converses à 65 euros ou des Havaianas que des escarpins Louboutin à 995 euros, des robes Lanvin à 3.800 euros que des Maje à 250 euros.

Depuis qu'elle est passée dans le giron de Richemont, l'entreprise londonienne fondée en 2000 par l'anglo-américaine Natalie Massenet a même fait des bébés. Avec MrPorter, elle s'adresse aux hommes et avec TheOutnet, elle propose des marques de luxe destockées.

Deux sites dérivés dont les techniques d'attraction et de fidélisation des clients servent même d'exemples auprès des professionnels de l'e-commerce. Lors d'une conférence qui leur était destinée, organisée mi-mars à Monaco, Cassandra Bergsland, responsable du merchandising chez Net-a-Porter leur a détaillé certaines méthodes de séduction.

"Nous voulons savoir qui vous êtes"

Première astuce : la personnalisation, en particulier celle des « cadeaux ». Certes, rien de révolutionnaire dans cette approche. Mais chez Net-a-Porter, la technique répond à de hautes ambitions. A propos de ses clients, Cassandra Bergsland affirme ainsi :

" Nous voulons savoir qui vous êtes, ce que vous pensez, pourquoi vous êtes venus, les marques que vous aimez, les marques que vous ne savez pas encore que vous aimez, mais que vous aimerez parce qu'elles ont un lien avec celles que vous aimez, combien vous dépensez avec nous, comment nous pouvons vous aider à gagner des points dans notre programme de fidélité. Si vous êtes l'un de nos clients fidèles vous devez le savoir et vous devez savoir que nous vous apprécions. "

En pratique, cela peut se traduire par des rabais de 10% offerts pendant un temps donné au 1% de clients les plus fidèles qui ont permis d'accroître de près de 6 points de pourcentage la part des visiteurs du site The Outnet qui ont fini par acheter des produits déjà vendu au rabais.

200.000 livres par an

Net-a-Porter a de bonnes raisons de choyer ses clients fidèles. Certains peuvent dépenser des fortunes en costumes, chaussures et autres sacs à main sur son site. Son plus gros client y engloutirait même 200.000 livres par an (274.000 euros) selon des sources internes.

Par ailleurs, le cybermarchand de luxe traduit les analyses tirées des outils de géolocalisation afin de frapper là où il aura le plus de chances de viser juste. Impossible de promettre une livraison le lendemain de la commande sur tout le territoire canadien ? Le distributeur répond à cet obstacle géographique en ciblant les onze zones du pays où il réalise la quasi-totalité de ses ventes. Résultat : le nombre de visiteurs canadiens passant finalement à la caisse aurait augmenté de 2,7 points de pourcentage.

De même à Londres et New York où Net-a-Porter promet à ses clients qu'il pourront "porter le soir ce qu'ils ont commandé le matin", l'affichage d'un compte à rebours avant l'arrivée du colis pour les clients ayant opté pour le service de livraison premium aurait permis d'accroître ce taux de conversion de 1,6 point de pourcentage.

"Le merchandising doit être invisible"

Pour parvenir à ces résultats, les équipes de MrPorter et The Outnet recourent depuis 2011 aux outils de Qubit, une plateforme d'analyse des données. Dans leur usage, Antoine Ballerin, directeur de Qubit en Europe, professe la plus grande discrétion. Au cours de la même conférence à Monaco, il affirme ainsi que "le merchandising, pour que cela fonctionne, doit être invisible". En guise d'exemple, il présente le cas d'une autre marque de vêtement recourant à ses services adapte-t-elle sa page d'accueil en fonction du temps qu'il fait chez le visiteur géolocalisé grâce à l'adresse IP du navigateur qu'il emploie.

"Attention, il ne faut pas que Big Data soit synonyme de Big Brother sinon il y a un phénomène de rejet", se donne-t-il la peine de préciser. D'où les rabais et autres services "gratuits" compensant les offre ciblées de TheOutnet et MrPorter. Avec la segmentation, "on limite ce que l'on donne", indique Antoine Ballerin. L'entreprise y gagnerait davantage en retour.

Marina Torre

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