Le tourisme mondial repart de plus belle mais attention aux "vents économiques contraires", prévient l'OMT

Les indicateurs des voyages de loisirs à international sont tous au vert depuis cinq mois, selon l'Organisation mondiale du tourisme. L'Europe a d'ailleurs profité de cette embellie du début 2022, sans pour autant remplir totalement les jauges d'avant la période Covid-19. Surtout, le secteur doit rester attentif à une série de signaux faibles qui pourraient venir percuter en plein vol cette reprise, s'ils devaient s'aggraver dans les prochains mois.
Les économies subissent une forte inflation liée notamment à la hausse des prix de l'énergie et à la remontée des taux d'intérêt.
Les économies subissent une forte inflation liée notamment à la hausse des prix de l'énergie et à la remontée des taux d'intérêt. (Crédits : COSTAS BALTAS)

L'envie de découvrir le monde a à nouveau envahi la planète, après des mois de restrictions et confinements partout dans le monde liés à la pandémie de Covid. Le tourisme retrouve en effet des couleurs, avec près de 250 millions d'arrivées internationales entre janvier et mai 2022, soit près de la moitié (46%) des volumes d'avant la pandémie de 2019, selon l'Organisation mondiale du tourisme (OMT) ce lundi 1er août.

Le redémarrage est d'autant plus marqué que la chute avait été abyssale. En 2020, le Covid-19 avait provoqué 320 milliards de dollars (273 milliards d'euros) de pertes pour le tourisme mondial de janvier à mai, selon l'OMT. Pour cette seule année noire, l'Organisation avait anticipé pas moins de 60% à 80% de touristes internationaux en moins. Un an plus tard, la reprise s'est révélée timide et inégale malgré les campagnes de vaccination, avec 77 millions d'arrivées enregistrées sur les cinq premiers mois de 2021.

Pâques en Europe

De la décrue historique, l'embellie est la plus spectaculaire en Europe, stimulée par la levée des restrictions de voyage. Le Vieux continent a accueilli plus de quatre fois plus d'arrivées internationales (+350%) que lors de la même période en 2021. La période des vacances de Pâques a été particulièrement propice, note l'OMT.

D'ailleurs, certaines destinations en Europe de l'Ouest et du Nord ont récupéré à 70% et 80% leurs niveaux d'avant la pandémie. Mais elles n'égalent pas encore les niveaux d'avant 2019 déjà atteints par certaines destinations exotiques telles les îles Vierges américaines, St. Maarten, le Honduras, Porto Rico, ou encore, pour le volume des dépenses, le Mexique, la Turquie, Sainte-Lucie, le Salvador, les Seychelles, pointe l'OMT. A noter aussi un retour à la normale plus surprenant dans la République de Moldavie et en Albanie. Et en matière de dépenses : au Portugal, en Croatie, en Roumanie, en Bosnie-Herzégovine et au Pakistan notamment.

Ce regain a aussi profité à la France en particulier, premier pays touristique au monde, qui a pu augmenter ses recettes liées aux dépenses des touristes étrangers, avec à la clé un léger rebond de l'activité globale au second trimestre 2022.

En matière de recettes, "les dépenses internationales des touristes de France, d'Allemagne, d'Italie et des États-Unis atteignent désormais 70 à 85% des niveaux d'avant la pandémie, tandis que les dépenses en provenance d'Inde, d'Arabie saoudite et du Qatar ont déjà dépassé les niveaux de 2019", affirme l'OMT.

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Des rebonds moins solides ailleurs

Le redémarrage en flèche reste toutefois à tempérer pour les Amériques, où les arrivées ont certes plus que doublé (+112%) mais elles restent inférieures de 36% et 40% aux niveaux de 2019, respectivement en Amérique du Nord et du Sud, souligne l'OMT.

De même, la forte croissance au Moyen-Orient (+157 %) et en Afrique (+156 %) est restée respectivement 54% et 50% inférieure aux niveaux de 2019, explique l'OMT. En Asie et e Pacifique, avec au coeur la Chine et ses nombreuses interdictions de voyage dans des zones telles Shanghaï et Pékin, les chiffres restent inférieurs de 90% à 2019, malgré un regain des arrivées (+94%). En outre, certaines frontières sont restées fermées aux voyages non essentiels, rappelle l'OMT.

A la fin juillet, sur 62 destinations, 39 européennes n'avaient plus de restrictions de voyage selon l'Organisation.

Aussi, les taux d'occupation mondiaux des hôtels ont atteint 66 % en juin 2022, contre 43 % en janvier, d'après les données de la société de benchmarking STR.

Pour 2022, les arrivées internationales devraient atteindre 55% à 70% des niveaux antérieurs à la pandémie, selon l'OMT.

Le spectre des crises sociales

Pour rappel, le tourisme peut représenter jusqu'à 25% du PIB dans certains pays en développement, soit un quart de sa richesse produite. Plus précisément, dans les 13 pays qui concentrent 80% des personnes les plus pauvres, 10 d'entre eux profitent d'un vaste secteur touristique. En Thaïlande, ce secteur représente 19,7% du PIB, pour 8,5% en France, selon les données 2019 du World Travel council.

L'OMT prévient toutefois des "vents économiques contraires et (des) défis géopolitiques susceptibles d'impacter le secteur d'ici à 2022 et au-delà". Partout dans le monde, les économies développées subissent en effet une forte inflation liée notamment à la hausse des prix de l'énergie et à la remontée des taux d'intérêt, le tout sur fond de risque de récession dans certains pays. Pour les Etats les plus endettés et proche du défaut de paiement, tel le Sri Lanka, les crises sociales menacent l'accueil de touristes étrangers.

A surveiller enfin selon l'OMT, la pénurie de personnel qui impacte le secteur touristique, notamment dans les aéroports.

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ZOOM : A Chypre, le tourisme russe fortement impacté par la guerre en Ukraine (par Chloé Emmanouilidis, AFP)

A Ayia Napa, populaire station balnéaire de Chypre, la fête a repris ses droits après deux ans de pandémie, mais sans le flot de touristes russes, naguère deuxième contingent de visiteurs après les Britanniques, un vide difficile à combler.

"Cette année, nous attendions 800.000 touristes russes" (comme en 2019, ndlr), explique Haris Loizides, responsable de l'Association hôtelière de Chypre. Un seuil désormais impossible à atteindre car sur les six premiers mois de l'année, seuls 17.000 touristes russes sont venus sur l'île méditerranéenne, selon les statistiques officielles.

Le marché russe "a été anéanti du jour au lendemain" à la suite des sanctions imposées par l'Union européenne après l'invasion de l'Ukraine par Moscou, constate Christos Angelidis, président de l'Association panchypriote des directeurs d'hôtels.

Nicosie et Moscou entretiennent des liens politiques et culturels étroits, mais quand la Russie a envoyé des troupes en Ukraine, le Parlement chypriote a adopté à l'unanimité une résolution condamnant l'invasion.

Les sanctions occidentales contre la Russie privent désormais les Russes de vols directs vers Chypre, pays membre de l'UE situé à quatre heures d'avion de Moscou. "Personne n'était préparé" à cela, poursuit-il.

Selon le ministère du Tourisme, l'absence de visiteurs russes pourrait représenter un manque à gagner de 600 millions de dollars.

Lire aussiLa guerre en Ukraine n'a pas freiné la reprise du tourisme en Europe

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Commentaire 1
à écrit le 02/08/2022 à 10:30
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Je ne sais pas pour le reste du pays, mais en Vendée où je suis propriétaire d'une maison de famille, j'ai jamais vu ça' les commerçants de remplissent les poches, les queues au distributeur de billets incroyables. On est loin de ce pays aussi pauvr...

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