Bruxelles valide la nouvelle aide d'Etat d'Air Austral

En difficulté, Air Austral voit enfin son plan de restructuration se concrétiser. Dernière pierre à l'édifice, l'accord de la Commission européenne vient d'arriver. Il va permettre la reprise par l'Etat français d'une large partie de la dette de la compagnie, qui vient s'ajouter à l'arrivée d'investisseurs locaux privés et à un soutien des acteurs publics réunionnais.
Léo Barnier
Air Austral va pouvoir se restructurer avec l'aide de l'Etat français.

La Commission européenne a tranché, Air Austral va pouvoir se restructurer. Bruxelles vient de valider une aide à la restructuration de 119,3 millions d'euros de la part de l'Etat français en faveur de la compagnie aérienne réunionnaise. Elle s'accompagne d'une « compensation des dommages subis à la suite de la pandémie du coronavirus » de 17,5 millions d'euros. Cette décision va permettre de concrétiser la reprise d'Air Austral par un consortium d'investisseurs réunionnais, adossée à une recapitalisation par les pouvoirs publics locaux.

Cette demande d'aide avait été notifiée par la France à la fin de l'été dernier, avec une réponse espérée en octobre. Bruxelles a donc pris plus de temps que prévu pour répondre, mais le dénouement est positif pour Air Austral. Il constitue l'aboutissement d'une longue démarche engagée avec le Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI, service de l'État à la manœuvre dans ce dossier, comme dans ceux des aides aux compagnies aériennes). Après avoir tenté d'établir un rapprochement entre Corsair et Air Austral, celui-ci avait fini par valider l'option de la reprise locale telle que voulue par la région Réunion.

Reprise de dette

Dans les faits, cette aide de 119 millions d'euros ne sera pas une injection de cash par l'Etat français, mais devrait correspondre à un abandon de créance. Lors du montage du dossier de reprise, Paris avait ainsi proposé de contribuer en effaçant une partie de la dette de 220 millions d'euros d'Air Austral. En septembre, la compagnie avait indiqué à La Tribune qu'un accord acceptable pour une restructuration de la dette avait été trouvé entre la Sematra, le consortium d'investisseurs et les créanciers, négocié sous l'égide du CIRI.

Un connaisseur du dossier estimait alors que l'Etat français pourrait reprendre jusqu'à 75 ou 80% de ce total. Quelques mois après, la part est sensiblement inférieure, de l'ordre de 54 %. Si Bruxelles a validé la crédibilité du plan de restructuration, il a possiblement jugé qu'un tel effacement de la dette était trop important en comparaison de l'apport des investisseurs privés.

La Commission indique ainsi dans son communiqué que : « En outre, le financement public du plan de restructuration respecte le critère de proportionnalité, le bénéficiaire participant à son financement par des financements propres ou privés, il permet le retour à la viabilité de la compagnie sur le long terme et n'affecte que dans une faible mesure les échanges entre États membres. »

Une reprise sur les rails

En plus de l'effacement de dette, la restructuration de la compagnie comprend une injection de cash d'un montant de 55 millions d'euros. Ce total comprend l'offre de reprise de 30 millions d'euros portée par le consortium d'investisseurs réunionnais rassemblé autour de Michel Deleflie, PDG du groupe Clinifutur. Il va ainsi devenir actionnaire majoritaire avec 55 % du capital d'Air Austral.

Les 25 millions d'euros restants sont apportés par des acteurs publics locaux, afin de recapitaliser de façon conséquente la compagnie qui en a impérativement besoin. Le tour de table se compose de la région Réunion, actuellement propriétaire d'Air Austral via la société d'économie mixte Sematra, qui va investir à hauteur de 15 millions d'euros, du département Réunion pour 5 millions d'euros et de la Chambre de commerce et d'industrie de la Réunion (CCIR) pour 5 millions d'euros également. Cet apport n'est pas compris dans les 119 millions d'euros, le communiqué de la Commission parlant bien d'aides d'Etat. Interrogée, Air Austral confirme également ce point.

Une aide sous conditions

En contrepartie, Bruxelles impose tout de même des conditions à Air Austral pour « limiter les distorsions de concurrence », et ce « pendant toute la durée du plan de restructuration, c'est-à-dire de janvier 2022 à mars 2025 ». Cela comprend une limitation du nombre de sièges offerts et de lignes aériennes exploitées par la compagnie, une interdiction de prises de participation dans d'autres entreprises et l'ouverture des accords commerciaux aux compagnies aériennes qui en feraient la demande.

Cette dernière condition pourrait concerner Corsair. Si la tentative de rapprochement avec Air Austral a été un échec, les deux compagnies avaient étudié la possibilité d'une coentreprise commerciale avec d'importants bénéfices potentiels. Mis dans les cartons, un tel projet pourrait revoir le jour, mais cela reste hypothétique pour le moment.

La compensation de 17,5 millions d'euros devrait, elle, arriver directement dans les caisses d'Air Austral. Elle est octroyée à titre d'indemnisation par l'Etat français en raison « des restrictions de déplacement mises en place pour limiter la propagation du coronavirus » entre le 17 mars et le 30 juin 2020, celles-ci ayant contraint la compagnie à interrompre la quasi-totalité de son activité.

Léo Barnier

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