
Ils avaient promis de « contrôler et d'évaluer les Jeux olympiques et paralympiques sur leur préparation et leurs ambitions affichés ». A 533 jours de Paris 2024, les députés Stéphane Peu (PCF, Seine-Saint-Denis) et Stéphane Mazars (Renaissance, Aveyron) ont tenu leur engagement. Leur pré-rapport publié le 15 février sur « les retombées des JOP sur le tissu économique et social » est sans concession. Les transports publics sont ainsi qualifiés de « source d'inquiétude pour la réussite » de l'événement.
800.000 personnes transportées chaque jour !
« La réussite de la France à organiser les Jeux sera notamment jugée à l'aune de sa capacité à gérer les déplacements de personnes. Le défi est de taille car ce ne sont pas moins de 600.000 spectateurs et 200.000 personnes accréditées qui devront être transportées chaque jour », écrivent les parlementaires.
A cet égard, l'ouverture à la concurrence des bus parisiens - aujourd'hui sous monopole RATP -, prévue le 1er janvier 2025, vient « alourdir les contraintes sur les pouvoirs publics pour permettre d'offrir des transports en commun suffisants et adaptés au public pendant les Jeux », poursuivent Stéphane Peu et Stéphane Mazars.
Auditionné par les deux députés, le ministre des Transports Clément Beaune n'a « pas exclu l'hypothèse d'une révision du calendrier », mais la décision, rappelle-t-il, relève du conseil régional Ile-de-France. « La région semble refuser de revoir ce calendrier au préjudice du bon fonctionnement des réseaux de bus à l'approche des Jeux », tancent les parlementaires.
Des « inquiétudes » déjà exprimées par Castex
Et ce alors que Jean Castex, le nouveau PDG de la RATP lui-même évoque les « inquiétudes » de ses équipes. Lors de ses vœux internes et externes dans la soirée du 24 janvier au théâtre Mogador, l'ex Premier ministre a lâché : « le compte n'y est pas ! »
« Tous les textes ne sont pas pris, tous les cas de figure ne sont pas réglés, nombre de questions soulevées par les personnels ne reçoivent pas de réponses claires, précises et rassurantes », a-t-il martelé, à l'adresse de Clément Beaune, présent au premier rang.
Porte-parole des siens, Jean Castex a évoqué les craintes de « salariés qui ne savent pas précisément ce qu'ils vont devenir avec quelles conditions de travail, à quel dépôt ils seront rattachés, s'ils vont devoir déménager... toutes sortes de questions concrètes, essentielles, qu'il ne faut pas prendre à la légère et auxquelles toutes les parties prenantes doivent apporter des réponses rapides ».
Décidément très en verve, Jean Castex a renvoyé les anti et les pour dans leur but : « ni déni, ni idéologie, notre corps social a besoin d'être rassuré, éclairé et in fine, nous devons faire en sorte que le service, pour les agents comme pour les voyageurs, soit amélioré ». Avant de s'exclamer : « l'ouverture à la concurrence est un moyen, pas une fin ! »
Et de conclure : « l'entreprise n'a pas peur de perdre son monopole - nous nous battrons, bec et ongles, pour gagner ces appels d'offres et démontrer qu'on a besoin de services publics et que celui-ci sait être efficient ».
Pécresse demande à ce « cher Clément » [Beaune] des ressources
Le patron de la RATP reste en effet « attaché » à l'ouverture à la concurrence, comme la présidente (LR) du conseil régional d'Île-de-France et de l'autorité organisatrice des transports IDF Mobilités.
Dans une lettre envoyée le 7 février au ministre des Transports, que La Tribune a pu consulter, Valérie Pécresse n'évoque d'ailleurs même pas le sujet mais demande à ce « cher Clément » [Beaune] des « ressources pour financer à la fois l'exploitation des lignes nouvelles de métro et de RER et les transports des Jeux ».
« Nous avons la charge d'élaborer le plan de transport qui permettra le bon fonctionnement des transports pendant les Jeux. C'est une charge immense compte tenu du nombre de visiteurs attendus et de la multiplicité des sites à desservir », ajoute-t-elle.
Un bras de fer qui ne date pas d'hier
Le bras de fer avec le gouvernement ne date pas d'hier et devrait se poursuivre demain. Lors d'Assises du financement des transports en Île-de-France organisées la veille des vœux de Castex, le directeur général d'IDFM a fait savoir qu'entre les Jeux et la livraison du Grand Paris Express en 2031, les besoins en financement allaient tripler, passant de 800 millions d'euros à 2,6 milliards d'euros.
En réponse, Clément Beaune a annoncé le lancement d'une mission confiée aux Inspections générales des Finances (IGF) et du Développement durable (IGEDD) pour lister les pistes. Le rendu des hauts fonctionnaires est prévu « d'ici au mois de mars » à la Première ministre Elisabeth Borne et au ministre des Transports, avant un nouveau rendez-vous « en avril » avec Valérie Pécresse. Objectif : aboutir à une trajectoire de financement « pérenne et sécurisée » avant l'été pour nourrir la loi de finances 2024 présentée à l'automne 2023 en Conseil des ministres.
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