SNCF : les TGV Ouigo appliquent les recettes des low-cost aériennes pour doper ses profits

La nouvelle est quelque peu passée au second plan en raison du lancement de Ouigo Vitesse classique sur les lignes Intercités : la SNCF a présenté ses objectifs à moyen terme pour ses TGV Ouigo. L'opérateur national veut truster le quart du marché domestique de la grande vitesse avec son offre à bas coût d'ici 2025 et occuper le terrain face à l'arrivée de la concurrence. Il va s'appuyer sur l'arrivée de rames supplémentaires, un nouvel aménagement intérieur, un réseau élargi et une offre revisitée.
Léo Barnier
Ouigo doit recevoir 12 rames supplémentaires à partir de 2025.
Ouigo doit recevoir 12 rames supplémentaires à partir de 2025. (Crédits : Reuters)

Après avoir cumulé 70 millions de passagers depuis ses débuts en 2013 - dont environ 40 % en induction de trafic ou pris sur la route - Ouigo veut accélérer son développement. « Notre objectif avec Ouigo est de poursuivre cette conquête de voyageurs et augmenter la part du ferroviaire, a affirmé le 23 septembre Christophe Fanichet, PDG de SNCF Voyageurs. Pour 2025, nous voulons que Ouigo soit le leader du ferroviaire low cost en France alors que la concurrence arrive de partout. » La SNCF entend ainsi faire passer la part de marché de Ouigo sur la grande vitesse domestique de 20 % actuellement à 25 % en 2025 sur un secteur en croissance.

D'ici à 2030, la SNCF vise une croissance de l'ordre de 30 % sur le domestique et 50 % sur l'international. Le marché total passerait ainsi de 140 millions de passagers actuellement (dont environ les deux tiers sur le domestique) à 200 millions dans dix ans.

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7 millions de passagers en plus par an

Ouigo va donc devoir sensiblement augmenter son nombre de passagers dans un temps rapide. Son directeur général Stéphane Rapebach veut atteindre 25 millions de passagers annuels dès 2023, contre environ 18 millions aujourd'hui (si l'on excepte une année 2020 catastrophique). L'offre à bas coût de la SNCF va donc devoir augmenter son trafic de près de 40 % en seulement deux ans. Il s'agit néanmoins d'un rattrapage : en février 2020, Ouigo annonçait un objectif de 25 millions de passagers sur l'année, avant d'être frappé par la crise sanitaire un mois plus tard.

« Pour cela, nous avons trois grandes nouveautés, détaille Stéphane Rapebach. Une nouvelle offre de service qui sera déployée dès la fin de l'année 2021, de nouvelles destinations entre 2022 et 2025 pour soutenir la croissance, et puis de nouvelles rames qui arriveront en 2025. »

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A la carte ou tout compris

L'offre Ouigo sera désormais divisée en deux. La première, baptisée Ouigo Essentiel, reprendra le concept jusque-là mis en place, à savoir un service minimum à prix réduit assorti de diverses options payantes à la carte. Cela comprend l'emport d'un bagage supplémentaire en plus du bagage à main (5 €) ou le choix de la place (3 ou 7 € selon le placement). Mise en place en mars, cette dernière option a séduit un tiers des clients cet été, soit près d'un million de passagers.

Ces services seront étoffés dans les prochains mois avec l'arrivée du Wi-Fi à bord (connectivité générée à partir des réseaux mobiles environnants). Actuellement testé sur le Paris-Lyon, ce « Ouifi » sera déployé sur l'ensemble des 38 rames actuelles d'ici début 2023 et proposé à 3 €. Il sera complété par le Ouifun à 5 € qui offrira l'accès à des contenus multimédias en haute définition depuis les équipements électroniques personnels.

La deuxième offre, Ouigo Plus, permettra de disposer de l'ensemble de ces options pour un tarif de l'ordre de 9 € (après une période de lancement à 7 €). Cela comprendra également un coupe-file, non disponible à la carte, qui permettra d'arriver jusqu'à 5 minutes avant le départ au lieu de la demi-heure actuelle. Cette offre « tout compris » sera réservable dès le 6 octobre pour des voyages à partir de mi-décembre.

Cela doit permettre à Ouigo de continuer à développer ses revenus tirés des services auxiliaires, à l'image de ce qui peut être pratiqué dans l'aérien. « Nous nous en inspirons forcément beaucoup, admet Stéphane Rapebach. C'est la caution pour avoir les plus petits prix possibles. » Aujourd'hui, ces revenus additionnels représentent 4 % du chiffre d'affaires de Ouigo qui, avec ses nouveaux services, vise désormais les 10 %. Il reste du chemin à faire pour la low cost du rail avant d'atteindre le niveau d'un Ryanair qui tire plus du quart de ses revenus des services auxiliaires.

Occupation du marché face à la concurrence

Actuellement déployé sur 41 destinations, Ouigo va renforcer son réseau. La desserte des stations de ski depuis l'Île-de-France est relancée cet hiver, en dépit de l'échec subi l'an dernier - dû à la fermeture des remontées mécaniques. Après avoir accueilli 300 000 voyageurs en juillet et août cette année, la ligne entre l'aéroport de Roissy et Vannes, Auray, Lorient et Quimper sera reconduite d'avril à septembre 2022. Et en 2023, Brest et Quimper seront desservies depuis Paris, tout comme La Rochelle. Une ligne estivale sera également mise en place vers Perpignan à l'été 2023. En revanche, le Paris-Nancy sera supprimé à partir de cet hiver. Cette extension de réseau doit ensuite se poursuivre en 2025.

La SNCF veut également renforcer la desserte de lignes existantes, notamment vers le Sud-Est et la Méditerranée. Il s'agira probablement de verrouiller ce marché que convoite l'opérateur espagnol Renfe. Depuis 2019, celui-ci souhaite en effet se développer sur le Marseille-Lyon, mais son projet a jusqu'ici été empêché par la crise sanitaire. Il pourrait néanmoins finir par se concrétiser l'an prochain.

Cette stratégie d'occupation du marché fait partie du projet baptisé « Riposte », qui sera détaillé dans les prochaines semaines. La SNCF l'a déjà appliqué sur le Paris-Lyon, en y déployant des Ouigo dès 2020 en plus des TGV Inoui, afin de contrer l'arrivée Trenitalia. Celle-ci est attendue d'ici la fin de l'année sur l'axe Paris-Lyon-Turin-Milan.

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Douze nouvelles rames d'occasion

Pour soutenir cette croissance du réseau, Ouigo va recevoir 12 nouvelles rames entre 2025 et 2026, portant son total à 50. Il s'agira de rames actuellement en service sur le service TGV Inoui, qui seront reconfigurées. Un nouvel aménagement sera mis en place à cette occasion. Il comprendra un siège plus fin, qui permettra d'ajouter une trentaine de places par rame. Les trains, composés de deux rames, passeront ainsi de 1 268 à près de 1 300 places. De nouveaux espaces bagages, des crochets à vélo et un espace de convivialité seront intégrés, ainsi qu'une prise par siège. L'ensemble des 38 rames actuelles seront également transformées. L'ensemble du parc devrait être uniformisé d'ici 2027.

La SNCF ne devrait pas se précipiter pour autant pour déployer de la capacité. Avant crise, Ouigo avait déjà besoin d'un taux de remplissage de 85 % pour rentabiliser une ligne et peinait à atteindre l'équilibre opérationnel, hors investissements.

A moins que ces rames ne servent à se déployer sur de nouveaux marchés comme l'Italie, à l'image de ce qui a été fait en Espagne en mai dernier. Ouigo va d'ailleurs se renforcer de l'autre côté des Pyrénées et se déploiera vers Valence au printemps prochain puis Alicante, avant de toucher Cordoue, Séville et Malaga en 2023.

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Léo Barnier

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Commentaires 3
à écrit le 25/09/2021 à 10:30
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Ils feraient mieux de baisser le prix des billets intra régionaux honteusement chers. On peut aller à Madrid pour 25 balles en avion mais en prenant le train on peut pas faire mieux que 200 sans rire ? Bref toujours cette subvention massive vers le s...

le 27/09/2021 à 9:25
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Posez-vous la question pourquoi l'avion est souvent moins cher pour les dessertes intra-européennes ? Il y a 2 réponses : l'absence de taxe sur le kérozène et de TVA pour ces mêmes vols !!!

le 27/09/2021 à 17:37
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25 euros gros, tu fais quoi avec pour entretenir ces fers à repasser géants ? Ces trucs volent bon sang ! C'est pas l'endroit le plus sûr hein, c'est le moins sûr même.

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