Voie réservée sur le périph' : le ministre Beaune s'invite dans la joute Hidalgo-Pécresse

Le ministre des Transports Clément Beaune vient de prendre position sur la volonté de la mairie de Paris de pérenniser une voie du périphérique aux bus, aux taxis et au covoiturage au-delà des Jeux olympiques et paralympiques. Explications.
César Armand
Ce week-end, c'est au tour de Clément Beaune (photo) de s'exprimer sur ce sujet.
Ce week-end, c'est au tour de Clément Beaune (photo) de s'exprimer sur ce sujet. (Crédits : BENOIT TESSIER)

Est-ce un pas de plus vers sa candidature à la mairie de Paris aux prochaines élections municipales ou une prise de parole sur un sujet que le ministre des Transports ne peut pas éluder ? Toujours est-il que près d'une semaine après la dernière joute opposant Anne Hidalgo et Valérie Pécresse, Clément Beaune vient de sortir de son silence sur l'avenir du périphérique.

Depuis cinq ans, la ville de Paris et le conseil régional d'Île-de-France se disputent sur l'avenir du périphérique. Dernier épisode en date : une consultation de la Ville qui rejette la pérennisation d'une voie aux bus, aux taxis et au covoiturage au-delà des Jeux olympiques et paralympiques. D'un côté, le premier adjoint (PS) de la capitale, Emmanuel Grégoire, persiste et signeDe l'autre, 1.800 édiles, élus locaux, maires et parlementaires, conduits par Valérie Pécresse, témoignent d'une « inquiétude très vive ».

Lire aussiTransformation du périphérique parisien : quatre ans de bras de fer entre Hidalgo et Pécresse

Une annonce confirmée en 2022

Tout avait pourtant bien commencé en mai 2018. A l'époque, la capitale, la région se mettaient autour de la table avec l'Etat, la métropole du Grand Paris et des départements franciliens pour lancer une consultation internationale sur le devenir des autoroutes, du boulevard périphérique et des voies rapides.

A l'origine, Anne Hidalgo et Valérie Pécresse étaient, toutes les deux, d'accord pour réserver sur le périphérique une « voie olympique » aux athlètes, aux institutionnels et aux services de secours le temps des JO de Paris 2024. Sauf que pendant la campagne des élections municipales 2020, la capitale avait pris de court la région en promettant la transformation durable de l'infrastructure en un boulevard urbain et végétal.

L'annonce de sa transformation a été confirmée en mai 2022 par le maire-adjoint (EELV) de Paris chargé de la transformation de l'espace public, des transports, des mobilités, du code de la rue et de la voirie. Après 2024, la « voie olympique » sera ensuite réservée aux bus, aux taxis et au covoiturage, a déclaré David Belliard, sur la base de dix « Ateliers du périphérique » politiques, territoriaux et techniques conduits à l'échelle de la métropole du Grand Paris.

Un impératif de santé publique

Anne Hidalgo a, elle, maintenu l'objectif de végétaliser 10 hectares et d'y planter 70.000 arbres, considérant que la ceinture de 35 kilomètres inaugurée en 1973 était une « ceinture grise que nous voudrions voir transformée en ceinture verte » à l'horizon 2030, soit quatre ans après la fin de son deuxième mandat. A elles deux, ces mesures permettraient de retirer 80.000 voitures de la circulation. Un chiffre « mis en doute » il y a un an par un proche de Valérie Pécresse qui ne sait pas « d'où ça sort ».

La Ville le justifie alors au nom de la lutte contre la pollution atmosphérique. Plus de 500.000 personnes vivent autour du périphérique, en intra-muros ou dans les communes voisines, et sont exposés à des émissions d'oxyde d'azote et de particules fines. Les seuils de pollution sont en outre six fois supérieurs à ceux recommandés par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Sans parler de la pollution sonore. 90% des sites aux alentours dépassent les limites fixées par l'Union européenne.

Le périph' est en effet certes propriété de la ville de Paris, mais il est utilisé quotidiennement par près d'un million de Franciliens. 40% des trajets vont de banlieue à banlieue, et seuls 20% des usagers sont Parisiens, a l'habitude de répéter le conseil régional. En novembre 2021, en pleine campagne présidentielle opposant notamment Anne Hidalgo et Valérie Pécresse, cette dernière a lancé une consultation invitant les Franciliens à se prononcer « pour » ou « contre » le retrait d'une voie ouverte à tous.

Deux consultations conduites par Hidalgo et Pécresse

Sans surprise, 78.746 personnes - sur 12.213.447 Franciliens recensés par l'Insee - avaient rejeté à 90,2% la suppression d'une voie de circulation. Forte de ce résultat, la présidente de la région espère que la boucle parisienne devienne une infrastructure régionale. Sauf que sur ce point, la préfecture de Paris, préfecture d'Île-de-France n'a pas, toujours pas, donné suite à sa demande.

Dans l'intervalle, la ville de Paris a donc organisé sa propre consultation en ligne du 17 avril au 28 mai dernier auprès des Parisiens et des Franciliens. Sans surprise, 85,8% des 6.000 contributions se déclarent « défavorables » à ce projet de mutation. Aussitôt ces résultats connus, le président du groupe majoritaire au conseil régional, Vincent Jeanbrun, a publié, dans Le JDD avec 1.800 responsables politiques franciliensune tribune mettant en garde sur le risque d'« accentuer la congestion du trafic et d'avoir un effet dramatique sur la qualité de l'air et la pollution dans toute l'Île-de-France ».

La fermeture des voies sur berges a « conduit à une hausse de la congestion de 15% des voies ouest-est du périphérique sud », a rappelé le maire (LR) de L'Hay-les-Roses, citant une étude de l'Institut des politiques publiques (créé par Paris School of Economics, Ndlr). Aussi ce proche de Valérie Pécresse et les autres demandent-ils une étude d'impact « préalable » et « un vaste débat avec toutes les parties prenantes ».

Des arbitrages à venir dans la capitale, une motion de la région

Il n'empêche : le bras droit d'Anne Hidalgo s'est, déjà, dit prêt à « agir ». Dans Le Parisien, le premier adjoint Emmanuel Grégoire, notamment chargé de l'urbanisme et du Grand Paris, promet, certes, « de prendre du temps » pour analyser les réserves formulées et répondre aux inquiétudes, mais « nous garderons l'infrastructure utilisée par les JO », annonce-t-il aussitôt.

« Nous la bouclerons entre la porte d'Auteuil et Bercy », ajoute Emmanuel Grégoire.

Ce dernier doit encore toutefois rendre des arbitrages « sur les horaires, les jours et les ayant droit ». Réuni en séance plénière le 31 mai, le conseil régional a présenté une « motion relative » à ce projet de voie réservée.

Beaune d'accord sous conditions d'une étude d'impact préalable

Ce week-end, c'est au tour de Clément Beaune de s'exprimer sur ce sujet, se disant « ouvert à l'idée de réserver une voie du périphérique au covoiturage, sous couvert d'une étude d'impact préalable »

« Les voies réservées, il faudra les développer. Simplement, il y a un problème, c'est qu'il n'y a pas eu d'étude d'impact », a déclaré, ce 3 juin dans l'émission Parigo de France 3, le ministre des Transports et député (Renaissance) de Paris.

Et de mettre en garde: « Si c'est pour faire plus de congestion, ce n'est pas tellement écologique. Si ça permet de fluidifier le covoiturage et le transport en bus et d'autres usages, je pense que c'est positif et il faut le regarder ».

« Mais il faut une étude d'impact préalable », a-t-il insisté.

César Armand

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 05/06/2023 à 7:15
Signaler
Le nouveau Benjamin Grivault est arrivé ! On va encore bien rigoler...

à écrit le 04/06/2023 à 16:42
Signaler
La révolution a abolit les privilèges. La république s’est chargée de les recréer. Quand on est dans les bouchons, sur le périf, on a les motards de la gendarmerie qui ouvrent la voie à tel ou tel représentant pressé de l’état. A partir de là, ces pe...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.