Le salut du champion de l'éolien Vestas passera t-il par Mitsubishi ?

Quelques jours seulement après l'annonce de son quatrième plan de licenciement en deux ans et d'un cinquième trimestre de pertes depuis début 2011, le leader mondial de l'éolien fait à nouveau parler de lui. Le danois a confirmé les rumeurs de discussions avec le conglomérat japonais Mitsubishi Heavy Industry (MHI), qui pourrait prendre de 10 à 20 % de son capital.
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Le marché mondial de l'éolien est globalement surcapacitaire, et ses perspectives assombries par l'incertitude qui plane sur la prolongation du système d'aides en vigueur aux Etats-Unis, aujourd'hui l'un des marchés les plus importants.

La litanie de mauvais résultats et de plans sociaux égrenée depuis près de trois ans par le danois Vestas, leader mondial du secteur, reflète cette situation. Et ce avec d'autant plus de violence que, comme le note l'analyste Julien Desmaretz (Bryan, Granier & Co), « porté par la vision du PDG Ditlev Engel, extrêmement confiant dans le développement du marché à moyen terme, Vestas a vu ses coûts fixes exploser sur la période 2008-2011 et ils ont été parmi les derniers à désinvestir en 2010. »

Prêt à céder jusqu'à 20 % de son capital

La semaine dernière, en même temps qu'une perte d'exploitation de 164 millions d'euros sur le premier semestre 2012 et d'un cinquième trimestre de pertes nettes sur six depuis début 2011, la direction du groupe confirmait la recherche d'un partenaire financier ou industriel, susceptible de prendre entre 10 et 20 % de son capital.

La dépêche publiée lundi suite aux rumeurs concernant les pourparlers avec le conglomérat japonais Mitsubishi Heavy Industry (MHI) n'est pas aussi précise. La loi danoise contraint toute société cotée à confirmer ou infirmer ce type de rumeurs, mais rien ne dit que les discussions soient suffisamment avancées pour que Vestas (ou Mitsubishi) aient souhaité les rendre publiques spontanément.

Une rumeur saluée par les marchés

Quoi qu'il en soit, la perspective d'un partenariat est de bon augure et la Bourse a immédiatement salué l'information, en faisant bondir le titre de 18 % mardi matin à 38,61 couronnes, dans un marché en baisse de 0,16 %.

Les analystes avaient déjà apprécié les annonces de la semaine dernière, notamment l'objectif de réduction des coûts porté de 150 à 250 millions d'euros d'ici à la fin de l'année. « En termes d'effectifs et de capacité de production, Vestas est actuellement configuré pour produire 9 gigawatts (GW) en 2012, rappelle Julien Desmaretz. Or ils ont revu leurs prévisions à la baisse de 7 à 6,3 GW pour 2012, et à 5 GW pour 2013 en raison d'un fort effondrement du marché américain lié à l'incertitude sur la prolongation du système d'aide à l'éolien. »

Vestas, une cible de choix

Un rapprochement avec Vestas présente en tout état de cause de nombreux atouts pour MHI. D'abord, les nouvelles ambitions japonaises dans les énergies renouvelables justifient l'intérêt de tout groupe japonais pour un portefeuille technologique qui reste l'un des plus performants du marché.

En outre, cela permettrait à MHI de reprendre pied sur le marché américain. « Suite à sa condamnation il y a quelques mois dans la guerre qui l'opposait à General Electric pour la paternité de certains brevets clés, Mitsubishi ne peut se maintenir seul sur le marché américain, explique Julien Desmaretz. Or cela reste l'un des marchés les plus importants malgré la phase de ralentissement qu'il traverse actuellement. Mais il pourrait le faire avec Vestas. »

Les atouts des conglomérats de l'énergie

Pour Vestas seul grand fabricant de turbines à ne pas être intégré à un conglomérat énergétique, outre le renforcement de ses capacités financières, ce rapprochement pourrait lui donner la marge de man?uvre nécessaire pour faire face à la rude concurrence asiatique et à la forte pression sur les prix qui en découle. « C'est grâce aux synergies qu'ils développent avec leurs autres activités (côté production et clients) que les principaux concurrents de Vestas, General Electric et Siemens, affichent les meilleures marges du marché sur l'éolien, détaille Julien Desmaretz.

Vestas pourrait bénéficier des mêmes avantages au sein d'un conglomérat de l'énergie comme MHI, mais aussi du sud-coréen Hyundai ou encore du suédois ABB, qui dispose de grandes capacités d'investissement et qui est le seul à ne pas encore détenir de division éolienne. »

Les fabricants chinois toujours en lice

Pour autant, les rumeurs d'il y a quelques mois concernant un rachat pur et simple de Vestas par les chinois Sinovel ou Goldwind ne sont pas caduques pour autant. « Les turbiniers chinois restent des candidats sérieux au rachat, estime Julien desmaretz. En reprenant 100 % de Vestas, ils pourraient concrétiser leurs ambitions sur les marchés occidentaux. Il reste aujourd'hui difficile de monter des projets éoliens en Europe ou aux Etats-Unis équipés de turbines chinoises, par manque de track record. Ce rachat leur permettrait de rassurer les banques occidentales sur ce point. »

Le suspense se poursuit donc, dans l'attente d'une confirmation par Vestas d'un éventuel accord avec MHI. Autre question qui agite le petit monde de l'éolien : Ditlev Engel, son PDG depuis 2005, sera-t-il en mesure de conserver son poste à l'issue de la période mouvementée que le groupe vient de traverser, et qui a vu une majorité du top management renouvelée ces derniers mois ?
 


 

 

 

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Commentaires 5
à écrit le 03/09/2012 à 17:02
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Et si à la place d'un MHI ou d'un chinois, on pensait AREVA ou autre entreprise française à la place? Cela serait aussi l'occasion pour notre fleuron français de vendre autre chose que des centrales nucléaires. Si en son temps, on avait laisser concl...

à écrit le 29/08/2012 à 12:17
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Comme c'est curieux, aucun signe de vie des politiques écolos. Pourtant ils savent très que cette filière n'est rentable que si elle a des aides très importantes des états.

à écrit le 28/08/2012 à 17:54
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Et vu la concentration du secteur, je ne vous explique pas la montée en flèche des coûts de maintenance et des pièces...

le 29/08/2012 à 1:25
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La concentration dans un secteur permet au contraire assez souvent d'améliorer les techniques, le mode de production, les synergies, les marchés etc et baisser les prix : voir les exemple des secteurs ayant déjà consolidé comme l'aviation l'automobil...

à écrit le 28/08/2012 à 17:01
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Il est certain que Vestas est de tropparmi les grands d'Europe. Peu importe le partenaire pourvu qu'il soit vendu à "l'extérieur" Un chinois ferait mieux l'affaire pour les danois. Ce ne sera certainement pas pour gagner des marchés européens on le s...

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