Les rachats d'actions ont fait exploser les dettes

Face à la crise du crédit, les investisseurs se méfient des sociétés lourdement endettées. Parmi ces dernières, les entreprises qui ont contracté des emprunts, non pas pour financer des acquisitions ou des investissements, mais? des programmes de rachats d'actions destinés à revigorer leurs cours de Bourse font figure de pestiférées. Selon une récente étude de l'agence d'évaluation financière Standard and Poor's (S&P), les firmes américaines membres de l'indice S&P 500 ont déboursé 1.730 milliards de dollars en rachats d'actions, depuis le quatrième trimestre 2004, à l'époque où l'argent était bon marché. Un beau gâchis quand on songe à l'inefficacité des rachats d'actions, en général, et à la flambée des charges financières provoquée par le recours à l'endettement pour financer ces rachats. contre-performancesCertes, l'annulation des titres rachetés a entraîné une hausse du bénéfice par action. Mais il s'agit là d'un simple effet mécanique. Et si les rachats d'actions sont censés signaler au marché que les entreprises s'estiment sous-évaluées, cet appel du pied reste souvent lettre morte. La preuve en chiffres : Macy's, Gannett et le New York Times, les principaux groupes pointés du doigt par l'étude, ont accusé en 2008 des contre-performances boursières encore pires que celle du S&P 500, qui a plongé de 40 %. Le titre du groupe de grands magasins Macy's s'est effondré de 60 %. Pis, l'action du groupe de médias Gannett a dévissé de 80 % environ. Entre les deux, le titre du New York Times, éditeur du quotidien éponyme, a sombré de 58 %. Le New York Times n'avait pourtant pas lésiné sur les rachats d'actions, en y allouant 1,8 milliard de dollars entre 2000 et 2004. Conséquence, le groupe supporte aujourd'hui une dette de 1,1 milliard, ce qui a valu à sa note de solvabilité d'être abaissée de trois crans en octobre par S&P, à BB?. Non seulement le New York Times joue dans la catégorie des obligations pourries, mais S&P n'exclut pas de procéder à un nouvel abaissement de sa note. Une situation d'autant plus désolante que si le New York Times avait consacré 1,8 milliard de dollars à se désendetter plutôt qu'à racheter ses propres actions, il aurait été en mesure de rembourser l'intégralité de ses emprunts, pointe Mike Simonton, analyste au sein de l'agence de notation financière Fitch. Résultat, le New York Times, confronté de plus à la crise économique et aux difficultés de refinancement, n'en serait pas réduit aujourd'hui à tenter de vendre une partie de son patrimoine immobilier pour trouver de l'argent frais afin de rembourser ses dettes et de payer les intérêts afférents.home depot dégradéAutre note de solvabilité dégradée de trois crans par S&P, celle de Home Depot. Le numéro un mondial du bricolage n'a rien trouvé de mieux que de procéder à une émission obligataire de 12 milliards de dollars pour financer en partie un programme de rachats d'actions de 22,5 milliards. Macy's également se trouve dans le collimateur de S&P. L'agence envisage d'abaisser la note du distributeur, dont les charges financières annuelles ont grimpé d'un tiers, en raison d'une hausse de 1,24 milliard de dollars de la dette à long terme, conséquence de 3,32 milliards de rachats d'actions. Pour se payer le luxe de racheter ses propres titres, mieux vaut être assis sur un bon matelas de liquidités.
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