L'essor des « soldes flottants » déboussole la mode

Les commerçants ne voulaient pas des soldes flottants. Mais rares sont aujourd'hui ceux qui résistent à la tentation. De Kiabi à Gap, en passant par Carrefouronline, Ikea et Go Sport, beaucoup se sont emparés de cette possibilité de vendre à perte que Christine Lagarde a créée en sus des deux périodes annuelles de soldes de cinq semaines. Cash oblige. « Beaucoup de distributeurs ont aujourd'hui un urgent besoin de trésorerie », observe le cadre d'une enseigne. Soit. Mais même les plus vaillants, dont Kiabi et Ikea, grands gagnants de la chasse désormais permanente aux petits prix, utilisent cette possibilité de déstockage à la veille du lancement de nouveautés.Pourquoi tant d'avidité, après avoir tant critiqué les travers de cette mesure ? En fait, la saison a débuté sous les pires cieux. Il a fait froid, trop froid pour vendre les pantalons en lin mis en rayon fin janvier, lors des soldes d'hiver. En février, le chiffre d'affaires s'est effondré de 15 %, selon l'Institut français de la mode. Et en mars, l'activité est restée sur la même mauvaise pente. « Le manque d'appétence est manifeste », observe Évelyne Chaballier, directrice des études à l'Institut français de la mode.La tentation de casser les prix est alors grande. La tactique est censée faire revenir les clients en magasin. Mais elle est source de confusion.Car les fédérations de commerçants ne se sont pas accordées sur une date unique. « Dans la conjoncture actuelle, chaque chaîne voulait garder sa marge de man?uvre », regrette Jean-Marc Génis, président exécutif de la Fédération des enseignes d'habillement, qui fédèrent les Zara, H&M et autres Armand Thiéry.Dès lors, une à une, les vitrines des rues commerçantes et des centres commerciaux se couvrent de panneaux affichant « moins 50 % ». Le phénomène est flagrant depuis le dernier samedi de mars. À Paris, ces remises ont été pratiquées avec succès par des détaillants et des enseignes, alors que le Bon Marché, le Printemps et les Galeries Lafayette sonnaient le rappel pour leurs 4TBM, 3J et autres opérations de promotion de printemps. Le tout avant de revenir à des tarifs à 100 %. Puis, du 22 au 29 avril, les grands magasins du boulevard haussmann et C&A recommenceront en menant une semaine de soldes flottants ! Le Bon Marché n'en sera pas. Le grand magasin de la rive gauche s'est démarqué de ses colistiers de l'Union du commerce de centre-ville. La Fédération nationale de l'habillement (FNH) conseille aussi à ses membres, des commerçants indépendants, de ne pas manger de ce pain-là. « Trop de soldes tuent les soldes. Croit-on vraiment qu'à force, je peux maintenir mes marges ? » répète Charles Melcer, président de la FNH.« bons tuyaux »Dans un pays où déjà 31 % des ventes d'habillement se font en période de soldes ou de promotions, beaucoup craignent que ces soldes flottants incitent encore plus les consommateurs à attendre pour acheter. à quoi bon, en effet, payer un article plein tarif quand il sera probablement vendu avec un rabais de 50 % dans quelques jours ?D'autant que le consommateur apprend vite les nouveaux bons plans pour faire des affaires. Et surtout, désormais, il les partage. Comme il n'hésite plus à marchander, il ose maintenant questionner un vendeur pour connaître la date secrète choisie par l'enseigne pour ces soldes flottants. Quitte à publier aussitôt cette information sur Internet pour partager le « bon tuyau » dans les forums de discussion qui fleurissent sur ces sujets. n la saison a débuté sous les pires cieux. le chiffre d'affaires s'est effondré de 15 %.Lucas Schifres/Bloomberg
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