« Solvabilité 2 ne va pas générer un nouveau besoin de capitaux pour le marché »

C'est aujourd'hui à midi, que la directive Solvabilité 2 sur l'assurance doit être définitivement votée en séance plénière par le Parlement européen à Strasbourg. Ce texte de compromis sur lequel la Commission, le Conseil et le Parlement européens sont tombés d'accord in extremis fin mars après d'intenses négociations, introduit « des critères de solvabilité plus sophistiqués et prenant mieux en compte les risques », indique Peter Skinner, député européen et rapporteur du texte. En France, si la volonté de modernisation des normes de solvabilité est globalement bien accueillie, les critiques de certains principes retenus par la directive ne manquent pas. Même les assureurs qui y sont favorables, comme les mutuelles du Gema (Macif, Maif, etc.), constatent que la directive adoptée « ne représente que la moitié du travail à accomplir ». En raison de la procédure de Lamfalussy suivie par les instances européennes, ce texte ne fixe qu'un cadre et devra être complété par des mesures d'application. L'enjeu pour les assureurs français est donc maintenant de peser dans l'élaboration de ces textes de deuxième niveau, comme l'explique le délégué général de la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA), Jean François Lequoy.La directive Solvabilité 2 est adoptée alors que les normes Bâle 2 pour les banques conçues sur le même modèle ont montré leurs faiblesses. Est-ce un progrès pour le secteur de l'assurance ?Oui, car le principe de Solvabilité 2 est de dimensionner les fonds propres en fonction des risques réels des assureurs, contrairement aux normes de solvabilité actuelles qui appliquent une formule de calcul très frustre. Il est donc difficile d'y être opposé. Mais il faut que la réalité des risques soit appréciée en prévoyant la survenance de circonstances extrêmes comme celles de la crise actuelle. En fait, la directive est un cadre, son succès dépendra de la qualité des mesures d'application qui vont suivre. Les assureurs européens vont recevoir à ce sujet 53 consultations entre le mois de juin et la fin de l'année. Nous nous organisons pour y répondre précisément.Pourtant, un certain nombre d'assureurs français restent très critiques, pourquoi ?Il est vrai que cette directive est très éloignée de ce que la France voulait au départ. En particulier, les exigences françaises sur la détention des actions n'ont pas été prises en compte. Mais deux atténuations ont tout de même été introduites. D'une part, les capitaux à mobiliser seront plus faibles lorsque les marchés d'actions seront en bas de cycle afin d'éviter l'effet « procyclique ». D'autre part, les niveaux de fonds propres exigés seront abaissés en fonction de la durée de détention des actions qui sont en représentation d'engagements longs, comme la retraite. Il faudra tirer le meilleur parti possible de ces deux atténuations dans les mesures d'application.Les besoins de capitaux des assureurs français vont-ils augmenter ?Pour les compagnies d'assurance-vie, les besoins de capitaux ne seront pas très différents. En revanche, les exigences seront plus fortes pour les compagnies d'assurance dommages. La marge de solvabilité moyenne effective des assureurs dommages est déjà actuellement très supérieure à celle des assureurs vie. Donc Solvabilité 2, en tant que tel, ne va pas générer un besoin de capitaux pour l'ensemble du marché. Mais Solvabilité 2 va produire des effets sur les allocations d'actifs dans le cadre de l'optimisation des rendements sur capitaux propres recherchés par les compagnies. Pour les grands groupes, ce n'est pas une nouveauté. Ils sont dotés de modèles internes et se livrent déjà à cet exercice depuis des années.Ces modèles permettront-ils aux assureurs de résister à une crise de grande ampleur ?Quelle que soit la qualité des modèles, les sociétés devront s'astreindre à des stress tests (tests de résistance). Solvabilité 2 va contribuer à une meilleure prévention dans la mesure où le pilier 2, qui porte sur l'organisation et la gouvernance de l'entreprise, impose aux assureurs d'avoir une meilleure compréhension de leurs risques. D'ailleurs, l'autorité de contrôle sera fondée à intervenir sur le respect de ce pilier 2. J'observe néanmoins que malgré la violence de la crise actuelle, le « business model » de l'assurance n'est pas remis en cause. Les compagnies sont en mesure d'honorer leurs engagements. Les résultats techniques en assurance dommages sont bons et l'image de l'assurance-vie est intacte. n Jean-François LEQUOY, délégué général de la FFSA
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