Une nouvelle géographie mondiale du cacao s'esquisse

LE CENTRE DE GRAVITÉ du marché mondial du cacao bascule de nouveau vers l'Afrique. La nouvelle suprématie africaine qui se dessine explique les choix stratégiques et industriels dans cette filière. Pour comprendre le phénomène, un retour en arrière s'impose. Dans les années soixante, le monde du cacao avait pour ancrage l'Afrique de l'Ouest et centrale. La production de ces ensembles s'équilibrait et écrasait celles des autres régions du monde. Deux décennies plus tard, la géographie « cacaoyère » s'est modifiée : un nouveau pôle de production en pleine expansion émerge avec l'Asie. La Malaisie, puis l'Indonésie deviennent des géants. Les cacaoyères servent à l'installation des populations dans des régions nouvellement ouvertes à la colonisation. Le cacao permet aux paysans de vite réaliser une première accumulation de capitaux. Au début des années 90, le mouvement s'essouffle. Les Malais ou les Indonésiens optent pour le palmier à huile ou l'hévéa, plus rémunérateurs, et arrachent les plants de cacaoyers. En trois campagnes, la production malaisienne recule de 45 %, tandis que celle d'Indonésie se stabilise à 280.000 tonnes. Parallèlement, le déclin de la production du Brésil s'accélère sous l'effet de la maladie et de la dégénérescence des cacaoyères. Entre 1992 et 1996, la collecte de fèves chute de 31 %. Le retour de l'Afrique occidentale redistribue les cartes. Le couple Côte d'Ivoire et Ghana retrouve le leadership sur le marché. Tous les spécialistes s'accordent pour constater que ce duo représentera entre 65 % et 70 % de l'offre mondiale de cacao au tournant du siècle. D'où l'intérêt vital pour les géants de la filière (Klaus Jacobs, Grace Cocoa, Gergens ou Hershey) de renforcer leur présence dans cette zone. Klaus Jacobs, en achetant Cacao Barry, s'assure un accès direct aux fèves ivoiriennes au travers des usines de Cacao Barry. Un nouvel épisode se prépare avec la mise en vente de Grace Cocoa. Ce groupe américain, numéro trois mondial du cacao, contrôle à la fois le premier exportateur de cacao de Côte d'Ivoire ainsi que le deuxième broyeur européen. Merrill Lynch en charge de la vente par les propriétaires actuels de Grace Cocoa se prépare à recevoir les offres à partir du 15 juillet. Coût du ticket d'entrée en Côte d'Ivoire au travers de Grace Cocoa : deux milliards de dollars. Une fois de plus Klaus Jacobs est sur les rangs. GUY-ANDRÉ KIEFFER
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