Les tables de négociation butent sur l'opacité des marchés

églementationSi la crise financière a généré une forte demande de transparence de la part des investisseurs, les transactions sur les produits de gré à gré demeurent toujours opaques. Cette situation inquiète les régulateurs, mais aussi nombre d'opérateurs, qui réclament le développement de chambres de compensation. Pour les sociétés de gestion d'actifs, cette situation crée de sérieuses difficultés lorsqu'il s'agit de prouver qu'elles ont bien réalisé leurs transactions aux meilleures conditions. Cette nouvelle obligation est liée à la directive MIF (marché des instruments financiers), qui a permis de mettre en concurrence des marchés réglementés et des plates-formes de transactions dans le but d'améliorer la liquidité. En contrepartie, les sociétés de gestion devaient pouvoir faire la preuve que leurs transactions ont été réalisées sur le marché le plus adéquat, de la façon la plus rapide et au meilleur prix. La directive a donc entraîné une évolution significative de ce métier au sein des sociétés de gestion. L'activité de négociation tend à se professionnaliser. Ainsi, l'exécution des ordres est dorénavant très rarement confiée à des gérants, mais plutôt à des spécialistes regroupés à des tables de négociation dont la taille dépend des encours gérés. Les très grosses sociétés de gestion comme BNP Paribas Investment Partners, dont la filiale Fin'ams sera l'une des plus importantes tables de négociation en Europe après l'intégration de Fortis ou le Crédit Agricolegricole Asset Management en ont d'ailleurs fait une industrie. Elles agissent dans ce cadre pour le compte de tiers, car de plus en plus de sociétés de gestion de taille moyenne ou petite font le choix d'externaliser cette fonction, notamment celles gérant moins de 10 milliards d'euros. Pour d'autres, ce métier est pourtant trop stratégique pour être externalisé. Ainsi, Groupama Asset Management a-t-il créé à la fin de l'année dernière une table de négociation, composée de 6 personnes, qui traite l'ensemble des titres utilisés par la gestion. Des moyens importants ont été dédiés à ce projet. « Nous avons mis en place des systèmes de gestion électronique des ordres qui nous permettent de nous connecter directement à différentes contreparties », relate Patrice Robert, responsable de la table de négociation de Groupama AM. Toutefois, quel que soit le choix retenu en matière d'organisation et de taille des tables de négociation, ces dernières manquent souvent cruellement d'informations sur la façon dont les transactions sont effectuées par les brokers. En ce qui concerne les produits négociés sur des marchés organisés, l'exécution des ordres, même s'ils peuvent transiter sur différentes plates-formes, peut toujours être comparée à un prix public. Malgré tout, l'accès à l'information pourrait être amélioré. « Nous manquons d'informations sur les priorités des brokers et sur l'ordre dans lequel ils interrogent les différents marchés avant de conclure une transaction », indique Patrice Robert. En revanche, la preuve de la meilleure exécution se complique lorsqu'il s'agit de produits négociés de gré à gré qui ne disposent donc pas de prix publics, car il faut parvenir à reconstituer des prix. Il n'existe pas de spécialistes des données qui agrègent les échanges. Les tables de négociation doivent donc mettre en place leurs propres bases de données. prix ligne à ligneLe rôle des courtiers s'inscrit dans ce cadre primordial, car outre le fait qu'ils réalisent les transactions, ils doivent fournir des informations détaillées expliquant leurs choix et justifiant les prix d'exécution. Et c'est souvent là que le bât blesse. « Nous souhaitons pouvoir récupérer les prix d'exécution ligne à ligne et non en grande masse comme le proposent les brokers dans leurs rapports de ?best execution?, explique Patrice Robert. Qui plus est, ces rapports ne sont pas homogènes d'un broker à l'autre. » On est ainsi encore loin d'une parfaite transparence sur les marchés.
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