Le reclassement s'étend au groupe

Les sociétés d'un groupe établies dans l'Union européenne sont tenues à une obligation de solidarité avec le plan de sauvegarde de l'emploi mis en place par celle installée en France. Pour la première fois, un tribunal de grande instance (TGI), en l'occurrence celui de Péronne (Somme), n'a pas hésité dans un jugement du 18 août d'aller sur le terrain de la responsabilité délictuelle. Susceptible d'appel, cette décision de justice risque de faire bruit en cette période de crise où les plans sociaux se multiplient. Pour les juges, les sociétés du groupe n'ayant pas mobilisé des moyens ont privé les salariés de la société installée en France d'une chance de reclassement dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi.Concrètement, l'entreprise SA Péronne Industrie est une société du groupe agro-industriel italien Unichips. Le tribunal de commerce d'Amiens la place en 2005 en liquidation judiciaire. En raison de la cessation d'activité de SA Péronne Industrie, le mandataire judiciaire établit un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), préalable au licenciement économique des employés. Quelque 130 salariés de la société en liquidation vont ensuite lancer plusieurs actions en justice. L'un des recours tente de rechercher la responsabilité délictuelle des sociétés italiennes et néerlandaises du groupe pour défaut de soutien à la filiale française en difficulté. Pour le TGI de Péronne, cette action en justice sur la base de l'article 1382 du Code civil est tout à fait recevable.Dans leur raisonnement, les juges du fond se basent sur l'article L. 1235 du Code du travail. Celui-ci stipule que la validité du PSE doit être appréciée au regard des moyens du groupe de sociétés. Pour le TGI de Péronne, le législateur a voulu faire peser une obligation légale de solidarité aux sociétés d'un groupe lorsque l'une d'entre elles établit un plan social. Par conséquent, la responsabilité délictuelle prévue à l'article 1382 du Code civil peut être recherchée pour savoir si les sociétés du groupe ont ou non respecté cette obligation légale.préjudice subiOr, durant le contentieux, les sociétés italiennes et néerlandaises du groupe Unichips ne contestent pas ne pas être intervenues dans le PSE de SA Péronne Industrie mis en place par le mandataire judiciaire. Toute la question est de savoir si cette absence d'intervention a causé un préjudice aux 130 salariés. Autrement dit, une perte de chance sérieuse pour ces salariés de se reclasser dans les autres sociétés du groupe. Pour le TGI de Péronne, les correspondances de ces sociétés avec le mandataire judiciaire montrent qu'elles entendaient n'offrir aucune possibilité de reclassement. Or, pour s'exonérer de l'obligation légale, ces dernières auraient dû démontrer que leurs capacités économiques ne leur permettaient pas de proposer des reclassements. En revanche, au regard des éléments fournis par les 130 salariés, la situation économique de chacune d'entre elles ne pouvait pas les en exonérer.Le TGI a estimé que les salariés de la société française avaient subi un préjudice du fait de l'absence de participation des autres entreprises du groupe au PSE. La perte de chance raisonnable à être reclassé est évaluée en fonction de l'âge du salarié. Plus il est âgé, moins il a de chances de retrouver un emploi. Le salarié de plus de 55 ans a obtenu 50.000 euros de dommages et intérêts, 20.000 euros pour les moins de 40 ans et 40.000 euros pour ceux âgés de 40 à 55 ans. D'autres tribunaux pourraient être tentés de sauter le pas. Frédéric hasting
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