La protection de l'épargnant placée au coeur de la régulation financière

Crise oblige, la protection des épargnants figure désormais au rang des priorités absolues. Il est vrai que les subprimes ont montré aux États-Unis qu'une commercialisation mal encadrée de produits financiers auprès des ménages était susceptible de déclencher un risque systémique. Or il va bien falloir retrouver la confiance des épargnants. C'est pourquoi, le 30 avril dernier, l'Autorité des marchés financiers (AMF) et la toute nouvelle Autorité de contrôle prudentiel (ACP), qui résulte de la fusion des autorités de contrôle de la banque (commission bancaire) et de l'assurance (Acam), ont mis en place un pôle commun dédié à l'épargne : le pôle Assurance Banque Épargne. Si la protection de l'épargnant s'est toujours inscrite au coeur des attributions de ces institutions, en particulier à l'AMF, il n'existait pas jusque-là de structure officiellement en charge de cette mission. Surtout, alors que la commercialisation des produits financiers tendait à s'émanciper des distinctions traditionnelles entre titres échangés en Bourse, produits bancaires et d'assurance, la surveillance de ces instruments restait morcelée, ce qui soulevait un problème d'efficacité dans le contrôle de leur vente. Quant au client, il était souvent bien en peine de savoir, en cas de difficulté, vers quelle autorité se retourner pour obtenir des informations et éventuellement se plaindre. Ce pôle commun vise à corriger ces insuffisances en créant une force d'intervention coordonnée et en offrant aux clients un interlocuteur unique. Fabrice Pesin, secrétaire général adjoint de l'ACP, vient d'être nommé coordonateur du pôle pour deux ans.En pratique, le pôle Assurance Banque Épargne aura trois missions principales. D'abord, la surveillance de la commercialisation des produits financiers. « Cette fonction exercée en commun doit permettre aux deux autorités d'avoir une approche homogène à l'égard d'un produit, qu'il soit vendu en direct ou dans le cadre d'un contrat d'assurance-vie, par exemple, souligne Thierry Francq, secrétaire général de l'AMF. Par ailleurs, les vendeurs ne se cantonnent plus aujourd'hui à une catégorie de produit, la banque vend des produits d'assurance, l'assurance propose du bancaire, tout le monde commercialise des produits de gestion. Il est donc nécessaire de mettre en place une surveillance coordonnée des pratiques commerciales et, sans doute, de développer des outils communs notamment pour surveiller la publicité sur Internet. » Ensuite, il s'agit de coordonner les contrôles effectués auprès des acteurs. « La commercialisation s'opère via différents circuits, par exemple un OPCVM structuré pourra être vendu par un CIF (conseiller en investissement financier), une banque ou en tant qu'unité de compte dans une assurance-vie, d'où l'intérêt de réaliser des contrôles avec des équipes communes et en recourant aux mêmes méthodes, sachant qu'ensuite le dossier sera traité par l'autorité compétente », précise encore le secrétaire général de l'AMF. Une démarche saluée par les professionnels concernés eux-mêmes et notamment par l'Association française de la gestion financière (AFG). « Cela fait des années que nous réclamons une régulation de l'ensemble des produits financiers et pas seulement des OPCVM, souligne Paul-Henri de La Porte du Theil, président de l'AFG. Il est important, notamment pour éviter les distorsions de concurrence, que tous les produits financiers soient soumis aux mêmes règles et aux mêmes contrôles. D'ailleurs, cette problématique dépasse de loin la France, c'est devenu une préoccupation européenne, notamment en raison de la crise. »Querelles de compétenceOutre la surveillance et le contrôle de la commercialisation des produits, le pôle commun aura une troisième mission : offrir un guichet unique aux épargnants. « Trois outils seront mis à disposition du public : un site Internet, un accueil téléphonique et une adresse postale, précise Jean-Philippe Thierry, vice-président de l'ACP. La plate-forme aura pour vocation d'informer mais aussi d'aider les clients à trouver les bons interlocuteurs. Elle sera aussi pour nous un outil de veille qui nous permettra de comprendre d'une manière générale les problèmes auxquels se heurtent les clientèles, de détecter d'éventuelles mauvaises pratiques de commercialisation ou encore d'identifier des évolutions nécessaires de la réglementation. » La plate-forme devrait être opérationnelle d'ici à l'été et les associations de consommateurs saluent l'attention nouvelle portée aux épargnants (lire ci-contre). Reste à voir comment va fonctionner cette coordination de moyens et si les deux autorités sauront surmonter les inévitables querelles de compétence attachées à toute action en commun...
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