Les opérateurs mobiles jouent la carte ethnique

Appeler l'étranger depuis son téléphone portable reste synonyme de facture salée aux yeux des consommateurs. C'est pourtant le nouveau créneau en vogue dans la téléphonie mobile en France. Il s'agit d'opérateurs mobiles virtuels (MVNO) sans réseau, proposant des cartes SIM prépayées à glisser dans son téléphone, qui ciblent les populations issues de l'immigration et offrent des tarifs alléchants vers l'international (entre 15 et 19 centimes d'euro la minute contre 50 centimes en moyenne). L'opérateur néerlandais KPN a lancé en mars sa marque Ortel Mobile « dédiée aux communautés multiculturelles », qui existe depuis 2005 aux Pays-Bas, puis son offre plus confidentielle Ay Yildiz, en direction des turcophones. Objectif ambitieuxUn concurrent sérieux arrive à son tour sur le marché français, lui aussi sur le réseau de Bouygues Telecom, Lebara Mobile, qui revendique le titre de « premier MVNO en Europe pour les appels internationaux » avec plus de 3 millions de clients dans sept pays. « Oubliez les téléboutiques et les cartes téléphoniques ! » prêche le PDG de Lebara Mobile, Yoganathan Ratheesan. Il cible en priorité les 5,7 millions d'immigrés vivant en France et plus généralement « les migrants, les expatriés, les étudiants ». De son côté, Ortel estime à 8 millions les personnes ayant besoin d'appeler régulièrement l'international. Le Pdg de Lebara leur promet « des prix bas, transparents et honnêtes, des unités sans date d'expiration. Il y a souvent une arnaque, des coûts cachés, moins de minutes de communications que promis, de nombreux acteurs du secteur mentent », fustige-t-il. Il évalue à 500 millions d'euros la taille du marché, en France, des appels à l'international depuis les téléboutiques ou avec des cartes prépayées à utiliser depuis un fixe avec un code. Son objectif est ambitieux : 1 million de clients actifs en trois ans dans l'Hexagone, un essor aussi rapide que celui de Virgin Mobile, le premier MVNO français. Pourtant, certains acteurs, comme Mobisud lancé en 2006 par Maroc Telecom et SFR, ont échoué à percer sur ce créneau ethnique (60.000 clients et 44 millions d'euros de pertes cumulées). Un créneau pour NokiaAfin de séduire les Français, Lebara va vendre non seulement des cartes SIM mais aussi des téléphones, des Nokia basiques à 20 euros, à la différence de ses concurrents et de ce qu'il fait ailleurs. Il espère aussi se distinguer par la distribution, au-delà des circuits traditionnels (taxiphones, bureaux de tabac, boutiques ethniques), et être bientôt présent en grande surface, comme au Royaume-Uni (chez Tesco). En moins de deux ans, le MVNO, hébergé par Vodafone, a conquis plus de 1 million de clients outre-Manche, devenu son premier marché. « Le segment des MVNO ethniques reste une niche par nature », relève Shaun Collins, du cabinet d'étude CCS Insight. « Ces acteurs permettent aux opérateurs de réseau d'atteindre des clients qui ne seraient pas forcément venus chez eux et participent au phénomène de substitution du fixe par le mobile. » Une niche semble-t-il en forte croissance : Lebara a doublé son chiffre d'affaires en 2009, à 371 millions d'euros.
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