Chavignol : le « vrai crottin » fait de la résistance

Chez votre fromager ne demandez plus du crottin de Chavignol, mais simplement du chavignol. Ce petit fromage cylindrique, légèrement bombé et fabriqué au lait cru entier est désormais reconnu comme une marque à part entière. « Sa notoriété est intacte, explique Dominique Verneau, président du Syndicat du crottin de Chavignol, c'est l'une des plus fortes pour les fromages protégés par une AOC ». S'affichant désormais comme le grand cru des crottins, chavignol veut s'affranchir de ce terme de crottin pourtant inventé localement. Mais, faute d'avoir pu le défendre, ce terme est tombé dans le domaine public et « tout le monde ou presque fait du crottin ». Laiteries et producteurs français livrent ainsi chaque année 60 millions de crottins alors que les « vrais crottins » dépassent à peine 15 millions d'unités. Pourtant le chavignol veut se défendre. D'abord en se repositionnant comme le haut de gamme face à la masse générique des crottins. Chavignol veut aussi changer son image « banale », celle d'un fromage simple, à manger chaud sur une salade ou sur un plateau. « Alors même qu'il y a plusieurs chavignols, insiste Mireille Faguet du syndicat, avec des qualités, des couleurs, des saveurs inimitées, tels le mi-sec, le bleuté, le bleu, le sec ou le repass頻. Tous les amateurs éclairés se rueront sur le « repass頻, fromage affiné en pots de grès, ce qui permet de maintenir le moelleux tout en renforçant les saveurs, comme le pratique encore Gilles Dubois. La production de chavignol remonte loin, au XVIe siècle, mais c'est le phylloxéra qui, en décimant les vignes à la fin XIXe, a permis de le relancer en gagnant des terres à chèvres. À partir du petit village de Chavignol (Cher), situé à une encablure de Sancerre, l'aire d'appellation s'étend désormais sur trois départements et plus de 200 communes. Mais ce chavignol ne concerne plus qu'une centaine de producteurs de lait, une cinquantaine de producteurs fromagers alors que plus de la moitié de la production est assurée par la laiterie H. Triballat (Rians). Pourtant, de petits producteurs résistent à l'image de Magali Legras et Dominique Guillot qui, avec leurs 180 chèvres, produisent 250.000 fromages par an. « Mais l'AOC est contraignante et oblige à vendre le chavignol plus cher, alors les clients se détournent vers des crottins moins coûteux », regrette Magali Legras qui écoule tous ses fromages en vente directe, beaucoup aux Parisiens de passage. Malgré tout, le retour aux sources, l'appel du terroir et la renommée touristique de Sancerre font du chavignol une « valeur toujours sûre ».Jean-Jacques Talpin, à Orlé
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