CO2 aux enchères et compétitivité font mauvais ménage

Pour certains produits dont la fabrication émet beaucoup de gaz à effet de serre, l'intégration d'un surcoût lié à l'achat de quotas jusqu'ici gratuits est un vrai risque. Leur compétitivité serait tellement dégradée qu'il deviendrait plus rentable, pour les clients, d'importer ces produits de pays extérieurs à l'Union européenne. C'est le cas du mâchefer, essentiel à la fabrication du ciment, mais responsable de la totalité des émissions directes du secteur. Et donc, du ciment, mais aussi des engrais, de l'acier, ou encore du papier.« Sans allocation gratuite de quotas, et pour un cours de la tonne de CO2 de 25 euros, 80 % du mâchefer utilisé en Europe serait importé en 2020 (et même 100 % si la tonne est à 35 euros) », explique Emmanuel Nazarenko, associé au Boston Consulting Group (BCG), qui a publié une étude sur ce sujet en novembre 2008.Outre la destruction de valeur et la disparition de 87 % des emplois du secteur qui en résulteraient en 2020, les industriels soulignent l'aspect environnemental. La même étude du BCG estime ainsi que l'importation de 80 % du mâchefer correspondrait à l'émission de 7 à 38 millions de tonnes de CO2 supplémentaires, selon les pays d'origine. En cause, des modes de production souvent plus polluants qu'en Europe, les émissions liées aux constructions d'usines dans ces pays et, bien sûr, celles liées au transport.Sensible à ces arguments, la Commission européenne a publié le 21 septembre une liste provisoire de 151 secteurs dont elle reconnaît la « vulnérabilité aux fuites de carbone ». Sauf veto improbable du Parlement européen d'ici à fin décembre, ces secteurs recevront gratuitement une quantité de permis correspondant à une projection calculée à partir d'une année de référence, sur la base des performances des 10 % de sites les plus performants de chaque secteur. Selon Thierry de Chambelle, directeur général de Cembureau (l'association européenne des cimentiers), cette quantité ne devrait pas dépasser 75 % à 80 % de leurs besoins. Globalement, les émissions de CO2 devront diminuer de 1,74 % par an pour atteindre les 20 % de réduction en 2020 sur lesquels l'Europe s'est engagée.Même réduit, le risque de « fuite » demeure toutefois et les industries « vulnérables » planchent sur des pistes destinées à le neutraliser. L'industrie cimentière, par exemple, plaide pour inclure les importateurs dans l'ETS (European Trading Scheme), ce qui, souligne Jamon Baeza, du bureau de BCG de Madrid, « peut parfaitement cohabiter avec une poursuite des allocations gratuites ». Il s'agit d'égaliser le prix des produits consommés en Europe, indépendamment de leur lieu de production. À condition de prouver le caractère non discriminatoire de la mesure aux yeux de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), ce que les études en cours ont pour objectif de démontrer. La Commission tranchera en juin 2010. nbRUXELLES a publié une liste de secteurs « vulnérablES aux fuites de carbone ».
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