La redistribution du « pouvoir global »

« La fin d'un cycle de cinq siècles » de domination du monde par l'Occident se dessine. Ce constat de Thierry de Montbrial, directeur de l'Ifri, chacun le pressent. Sans pouvoir en dessiner toutes les lignes de fracture ou les facteurs d'espoir. L'interrogation même du titre du Ramsès 2011, « Un monde post-américain ? », en dit long sur les incertitudes qui pèsent sur cette reconfiguration des rapports de forces stratégiques et économiques. L'équipe de l'Institut français des relations internationales nous offre pourtant, dans son rapport annuel, d'intéressantes clés. Et quelques conclusions... stimulantes. À la lumière de la crise, l'Amérique a, certes, accumulé les handicaps, mais si Barack Obama semble affaibli, si la portée des réformes de la santé et du secteur bancaire reste à apprécier au fil des années ?, les retombées du « new deal » ne peuvent être évaluées à l'aune de quelques semaines, a rappelé Jacques Mistral, le directeur des études économiques de l'institut ? sa puissance, même partagée, ne s'évanouira pas de sitôt. En d'autres termes, les partenaires de Washington ont intérêt à éviter de passer des espoirs, parfois fous, nés de l'élection d'un président noir, aux désillusions hâtives ou à une rhétorique dépassée.La mise en garde est d'un autre ordre, mais tout aussi nette, à l'égard de la Chine. Pour Pékin, « la seule vraie priorité, c'est la stabilité sociale, garante de la stabilité politique », écrit Jacques Mistral. Or, contrairement à ce que certains veulent croire, la restructuration est en marche qui finira, très lentement, par changer la donne sur la protection sociale, les salaires, le marché du travail. De quoi rebattre les cartes, ne serait-ce que du commerce mondial. Mais si les Chinois n'ont aucun intérêt à voir le système international exploser, pour Thierry de Montbrial, une « nouvelle forme de non-alignement » apparaît, de la part des puissances émergentes. Il ne s'agit pas d'anti-occidentalisme, mais cela pourrait « changer la face du monde » sur le front géopolitique.Et l'Europe ? La zone euro apparaîtra un jour comme « la mieux gérée au monde », prédit Jacques Mistral. Avis aux Britanniques et aux Américains. De là à espérer voir la gouvernance européenne, qui a une fâcheuse tendance à avancer en crabe, devenir la nouvelle norme, voire le nouveau rêve mondial... il y faudra peut-être des décennies, voire des siècles.Françoise Crouïgneau Ramsès 2011?: « Un monde post-américain?? », sous la direction de Thierry de Montbrial et Philippe Moreau Defarges. éditions Dunod (336 pages, 26 euros).
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