2009, l'année qui va tout bouleverser

Grand reporter pour Fortune et "Time", Peter Gumbel est l'auteur de "French Vertigo" (Grasset).

Personne ne sait si la stratégie radicale adoptée par les leaders mondiaux pour contrer la crise fonctionnera : jeter de l'argent d'une flotte d'hélicoptères sur une économie jugée à risque d'une conflagration déflationniste est sans pareil dans l'histoire. On peut être d'accord sur la méthode ou pas. On peut craindre ou espérer. Ce qui est certain, c'est qu'on se trouve aujourd'hui à un moment marqué par un pragmatisme extrême. On n'a pas de solutions prêtes pour cette première crise de la mondialisation, donc il faut les inventer. Dans ce même esprit de pragmatisme, permettez-moi pour le nouvel an 2009 de faire quelques recommandations pour la vie politique française.

D'abord, je propose que pendant une période de six mois, Jean-Claude Trichet, le président de la Banque centrale européenne (BCE), fasse tout ce que lui dit le président Sarkozy. Puis, après six mois, le contraire : le président Sarkozy fera tout ce que lui dit monsieur Trichet.

Donc on baissera immédiatement les taux d'intérêt européens à zéro. La Banque centrale oubliera ses préoccupations inflationnistes, et cessera de faire des reproches aux pays qui mènent une politique budgétaire trop laxiste. Implicitement, il y aura un feu vert pour un programme de dépenses nationales très élevées, pour un niveau d'endettement extravagant, pour la création de toutes sortes de "fonds souverains". Ensuite, le contraire. On freinera abruptement les dépenses publiques afin de redresser rapidement le budget national. On fera tout ce qui est possible pour réduire l'endettement et l'on commencera, enfin, la vraie réforme de l'Etat français, si souvent promise, mais jamais réalisée. Comme ça, on aura la relance nécessaire pour l'économie mais sans les effets néfastes à long terme du laxisme budgétaire. On sortira de la crise beaucoup plus fort qu'avant.

Deuxième recommandation : pendant 2009, les enseignants seront récompensés comme les banquiers, et les banquiers comme les enseignants. On établira un nouveau système de bonus dans l'Education nationale, basé sur le progrès individuel de chaque étudiant en classe. Les bons enseignants qui font progresser leurs élèves gagneront des bonus qui feront plusieurs fois la taille de leur salaire de base. Les mauvais enseignants seront remerciés. Pour les banquiers, par contre, on supprimera complètement les bonus, qui ont créé trop d'appétit pour des risques surdimensionnés et non gérables. Comme ça, la grande réforme de l'Éducation nationale sera faite, et les banquiers enfin remis sous contrôle. En plus, quelques mois payés au Smic aideraient même les banquiers les plus arrogants à retrouver l'humilité.

Troisième proposition : le leadership du Parti socialiste. Pour décider enfin qui est la plus capable de mener ce parti, et renforcer la démocratie française, on établira rue de Solférino une alternance entre les deux candidates. Pendant six mois, Martine Aubry et Ségolène Royal se succéderont toutes les 35 heures. Ensuite, on choisira la plus compétente des deux, ou quelqu'un d'autre.

Enfin, à Bercy, on changera tous les six mois le ministre des Finances. Cela ne sera pas un remaniement typique, mais un échange. D'abord, Christine Lagarde échangera sa place avec Peer Steinbrück, le très acerbe ministre allemand. Ensuite, elle partira en Angleterre et ce sera Alistair Darling, le chancelier britannique, qui deviendra le roi temporaire de Bercy. L'avantage de tout cela : une compréhension plus profonde de la politique de ses voisins, et la présence, nécessaire en ces jours difficiles, d'autres voix plus indépendantes dans le débat interne de chaque grand pays européen.

La politique est "l'art du possible", disait Rab Butler, un homme politique anglais des années 1950. Dans ces temps d'incertitude, par contre, c'est l'impossible qui est devenu un art, et un devoir !

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Dans la même veine,je propose que Sarko et Poutine échangent leurs postes tous les six mois !

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