L'impératif de nouvelles politiques structurelles

Sur la nécessité de politiques structurelles destinées à doper la compétitivité des économies européennes.
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Les taux de croissance économique du premier trimestre 2011 confirment que la phase aiguë de la crise de 2009 est derrière nous. Trois enjeux de politique économique devront dominer l'agenda des prochains trimestres : piloter la sortie d'un « policy mix » encore expansionniste, gérer les déséquilibres financiers internationaux, renforcer le potentiel de croissance.

 

La sortie du « policy mix » - qui reste aujourd'hui expansionniste (après tout, le déficit public est encore très élevé dans la plupart des pays) - constitue un enjeu structurel essentiel pour préserver l'accès du secteur public aux prêteurs de capitaux. Il s'agit de trouver le bon chemin entre un retour à un « policy mix » soutenable - sous l'oeil désormais vigilant et nerveux des marchés financiers - et la nécessité de ne pas compromettre une reprise fragile. Pour préserver la croissance, l'ajustement budgétaire doit privilégier une baisse des dépenses plutôt qu'une hausse d'impôts, et le resserrement monétaire doit demeurer graduel, surtout en Europe où le risque de hausse de l'euro n'est jamais loin.

 

Deuxième enjeu essentiel des politiques de sortie de crise : la gestion des déséquilibres financiers internationaux. Après la crise asiatique de 1997, l'épargne abondante des pays émergents s'est détournée des marchés financiers locaux au profit du marché américain, où elle a alimenté la bulle immobilière et contribué à la crise. Aujourd'hui, l'épargne des pays émergents reste massive et ne s'investit toujours pas en Asie par manque de places financières locales larges, liquides et sûres. D'où une surexposition de la Chine au risque de dépréciation du dollar, un risque de bulle sur les marchés d'actifs et d'instabilité des taux de change.

Cette résorption des déséquilibres des balances courantes devra éviter les ajustements trop brusques. Aux États-Unis, elle passe par une réduction des déficits publics et/ou un surcroît d'épargne, et pourrait affecter à la baisse la croissance et le cours du dollar. En Chine, une réduction de l'excédent courant nécessite de longues réformes structurelles pour augmenter la part de la consommation dans la demande (35 % du PIB chinois seulement vs 65 % en France). En Europe, une résorption trop rapide des déséquilibres internationaux renchérirait l'euro, dégraderait la compétitivité prix et alimenterait une désindustrialisation et une spécialisation vers les secteurs abrités où les gains de productivité sont faibles. L'exercice pragmatique de coordination des réformes structurelles lancé par le G20 (« Framework for Growth ») est utile dans ce contexte.

 

C'est le troisième enjeu : des réformes structurelles pour soutenir durablement la croissance, alors que le vieillissement pèse sur la croissance, que la productivité fléchit et que la crise a déjà fait perdre deux années de croissance environ. Ces politiques structurelles devront d'abord redresser le stock total d'heures travaillées, en allongeant la durée de la vie active grâce à une hausse de l'âge de la retraite, en relevant le temps de travail hebdomadaire, en pesant sur le taux de chômage structurel (grâce à un meilleur fonctionnement du service public de l'emploi et des efforts de formation professionnelle des demandeurs d'emploi) et en limitant le coût du travail grâce à une réduction des charges sur les revenus d'activité.

Elles devront aussi redresser la productivité du travail, qui a fléchi en France passant de + 1,8 % par an sur 1991-2007 en moyenne à + 1,2 % sur 2003-2007. Pour y parvenir, des politiques proconcurrentielles restent nécessaires, en particulier dans le secteur des services marchands, en Allemagne comme en France. Le soutien à la R&D doit être démultiplié. La restructuration de l'enseignement supérieur (à condition d'avoir mis les universités sous contrainte budgétaire) constitue un autre enjeu essentiel de compétitivité tant le lien est étroit entre niveau d'éducation, productivité du travail et croissance. Enfin, les politiques structurelles de sortie de crise devront favoriser une accumulation de capital régulière et équilibrée, en diminuant la taxation du capital et, surtout, en poursuivant une réforme profonde de la réglementation bancaire et financière. La crise de 2008 a montré les enjeux de ce chantier : la sous-accumulation du capital et la hausse du taux de chômage d'équilibre liées à la crise financière feront perdre environ un demi-point de croissance par an en moyenne sur 2009-2013.

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