La région, le territoire, une chance pour la santé

Par Alain Houpert, sénateur UMP de Côte-d'Or.
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En 2050, 60% de la population mondiale habitera en ville, notamment dans les pays émergents, ce qui ne va pas sans susciter une préoccupation écologique et sanitaire essentielle pour notre avenir.

La ville n'a pas l'apanage du futur et de la modernité. Inversement, la campagne n'est pas le refuge du passé. Le rapport entre ville et campagne est en train d'évoluer. En France, à l'image des pays anglo-saxons, on assiste à une inversion du processus migratoire qui a contribué à l'extension des villes. La ville revient à la campagne. Dans les agglomérations, le prix actuel du foncier rend inaccessible l'accession à la propriété. Le citoyen se replie sur les territoires ruraux par défaut et par opportunité foncière. L'élu rural a la redoutable tâche d'accueillir ces néoruraux. L'édile a toutefois le choix : ou bien transformer son territoire en dortoir sans âme ou bien le faire évoluer d'une manière réfléchie et coordonnée, en accueillant des habitants qui viennent y sculpter leur poutre de vie. C'est un choix qui demande du recul et de l'empathie pour le territoire, un choix qui demande de raisonner à long terme.

En considérant le territoire et la région comme les unités d'organisation et d'efficience pour la santé de nos concitoyens, le législateur a fait un choix pragmatique. Rapprochant la décision de la diversité des territoires, il laisse ainsi plus de champ aux acteurs pour faire valoir les spécificités locales, les problématiques particulières. Il permet aussi une analyse plus précise des besoins et des compétences existant réellement sur le terrain. À terme, si cette équation fonctionne, la création de projets locaux peut être dynamisée par une animation administrative proche des personnes, réalisée par les Agences régionales de santé (ARS). C'est l'objectif des premiers états généraux de la santé en Régions que de montrer cette diversité de projets, cette créativité des acteurs du terrain.

Il ne faudrait pas tomber dans une vision manichéenne et se complaire dans les clichés réducteurs dont raffole notre pays. Territoire ne rime pas toujours avec désert médical et proximité n'est pas toujours synonyme de qualité. On ne mettra pas un hôpital derrière chaque personne et on n'optera pas pour une dilution de moyens. On préférera un maillage intelligent de centres de lutte contre le cancer aux personnels formés et disposant des meilleures innovations thérapeutiques. Il faut inventer d'autres modèles d'organisation, partager au sein des territoires et des régions les talents et les compétences. La santé est souvent considérée comme un centre de coûts : on en oublie fondamentalement sa valeur ajoutée. Drainant plus de 220 milliards d'euros tous les ans, ce secteur est l'un des plus pourvoyeurs en emplois qualifiés : près de 2,5 millions de personnes y travaillent. Les conséquences de ces investissements sont tellement patentes que l'on ne les regarde plus : vies préservées, qualité de vie, emplois, productivité, longévité... Ces mots, à l'aune de l'analyse purement économique, ont perdu leur sens profond, leur caractère essentiel pour une société. La santé est un fleuron national. Faisons-en un outil de redéploiement national, une arme de l'aménagement du territoire.

Il en est de même pour la prise en charge de la dépendance. Le reste à charge mensuel moyen d'un hébergement (après déduction des prises en charge par la Sécurité sociale, pour les soins, et de l'APA pour la dépendance) se situe entre 2.200 euros en milieu rural et périurbain et 2.900 euros en ville, pouvant atteindre 5.000 euros pour les plus élevés.

Sur ce sujet aussi, les Agences régionales de santé sont les mieux à même de pouvoir exploiter le levier territorial pour résoudre l'équation, pourvu que l'on en prenne la juste valeur. Il faut souligner le lien entre l'aménagement du territoire et le financement de la dépendance : la localisation des Établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) en zone rurale ou périurbaine diminue le reste à charge en abaissant la part du foncier de 30% dans le coût de la prise en charge. Ces dispositions "hors les centres-villes" créeraient de l'emploi.

Il faudra cependant sortir des schèmes traditionnels qui concentrent les projets dans les centres urbains, au nom de la proximité familiale : elle est un argument bien théorique au regard de la réalité de la dépendance. Non seulement les Ehpad placés en zone urbaine coûtent extrêmement cher mais les familles n'ont pas davantage le temps de visiter leurs aînés en cours de semaine.

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