Le système financier chinois arrive à maturité

La Chine peut désormais jouer un rôle dans la régulation des marchés financiers. Et depuis la crise de 2008, les approches de régulation et les mesures envisagées par Pékin, Londres ou New York convergent vers un consensus.
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Depuis quelques années, l'évolution du système financier chinois est vraiment extraordinaire. En 2002, toutes les grandes banques chinoises croulaient sous les prêts à haut risque qui représentaient parfois jusqu'à 10 % de leur bilan. Aucune d'entre elles n'avait jamais appliqué les normes prudentielles internationales, et à Londres ou à New York, il n'y avait guère de financiers capables de citer le nom d'une banque chinoise, à l'exception de la Banque de Chine, que beaucoup prenaient à tort pour la banque centrale. Moins de dix ans plus tard, le paysage est totalement transformé.

Le vieux problème des prêts à haut risque est réglé, essentiellement grâce à la constitution de sociétés de gestion des actifs qui ont racheté les actifs douteux et injecté des capitaux neufs dans les banques commerciales. Aujourd'hui, les prêts à haut risque représentent à peine plus de 1 % des actifs. Les partenaires étrangers ont été rachetés de manière à acquérir leur savoir-faire, et l'actionnariat minoritaire a été renforcé. Quatre banques chinoises sont classées parmi les 10 premières au niveau mondial en termes de capitalisation boursière. Elles s'implantent maintenant à l'étranger, et ce, d'autant plus facilement qu'elles disposent de capitaux propres importants. Certes, il reste encore des problèmes. Les grandes banques chinoises ont prêté des montants importants, volontairement ou non, aux gouvernements provinciaux pour des projets d'infrastructures à la valeur économique contestable. Il existe toujours un risque sur le marché immobilier, mais une grande partie des investissements spéculatifs a été financée avec des liquidités et un faible recours à l'endettement.

À Pékin, les autorités, entre autres la CBRC et la Banque populaire de Chine (la véritable banque centrale), ont montré leur capacité à faire face aux retournements des marchés et je ne parierais pas sur leur échec. Elles peuvent faire preuve d'une grande flexibilité et disposent de nombreux outils, notamment les exigences en matière de capital variable et de réserve, ainsi que le contrôle direct des prêts immobiliers à long terme. Depuis plusieurs mois, elles limitent la croissance du crédit, avec de bons résultats. Il serait flatteur de penser que cette évolution est le résultat des conseils avisés des spécialistes étrangers. Mais si l'influence extérieure a pu être utile d'une certaine manière (les normes du Comité de Bâle ont donné un coup de pouce aux partisans du nettoyage des bilans), les Chinois considèrent, non sans raison, avec un certain scepticisme les conseils prodigués par Wall Street et la City.

Le phénomène le plus intéressant à observer est la convergence croissante des principes de régulation et des mesures envisagées à Pékin, Londres et New York. Jusqu'à la crise de 2008, l'Occident pensait contrôler le système financier avec un instrument unique - les taux d'intérêt à court terme - dans un but unique, la lutte contre l'inflation. Les exigences en matière de fonds propres étaient décidées au niveau international et ne devaient plus bouger. Et pour le reste, le marché faisait force de loi. Les banques avaient leurs propres motivations pour prêter à bon escient et le contrôle du crédit était condamné à l'inefficacité. Par contre, les autorités chinoises surveillaient de près toute l'activité bancaire et la plupart des banques étaient sous l'influence de la banque centrale. Or, elles voient désormais tous les avantages d'une approche moins directive et d'institutions tournées en priorité vers le commerce. Elles acceptent les exigences en matière de capitaux propres ou de seuil maximum d'endettement à titre de contrôle des prêts immobiliers.

Pendant ce temps, sur les marchés des capitaux des pays développés, nous nous affairons à réinventer les « instruments macroprudentiels ». Nous voyons aujourd'hui l'utilité d'outils plus flexibles pour faire face à un accroissement excessif du crédit ou à une bulle du prix des actifs, face à quoi la manipulation des taux d'intérêt à court terme est une arme émoussée ou pire, à double tranchant. Une hausse des taux d'intérêt pourrait freiner l'emballement du marché du crédit immobilier, mais du même coup elle ralentirait le reste de l'économie. Les approches en matière de régulation convergent également. La fameuse phrase de Margaret Thatcher, l'ancien Premier ministre britannique, « Vous ne pouvez pas battre le marché », relève de cet état d'esprit à l'égard de la régulation. Quant au précédent président de la Fed, Alan Greenspan, il a résisté à toute tentative visant à maîtriser le mimétisme des créateurs de richesse de Wall Street. Les Chinois avaient une approche moins idéologique. Ils n'hésitaient pas à appeler une bulle « une bulle » et à intervenir pour la dégonfler. Maintenant, Sarah Palin épouse le point de vue de Thatcher et Greenspan a été effacé à la manière chinoise de l'histoire financière.

Quand le G7 s'est transformé en G20 au début de 2009, on a pu craindre que, avec une telle diversité de membres de cultures très différentes, il soit difficile de parvenir à un consensus. Ces inquiétudes se sont révélées exagérées. Les éléments nécessaires à un consensus sont en place et il sera possible d'y parvenir dans la mesure où des Américains, comme Geithner, résistent à leur besoin de déclarer au monde qu'il doit faire ce qu'ils disent, sûrement pas ce qu'ils font... Aujourd'hui, les responsabilités des régulateurs sont très hétéroclites, mais un renforcement des réglementations au niveau international permettrait de renforcer l'intégrité des marchés financiers. Copyright Project Syndicate

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