Go ! Intuition, go ! Ou AlphaGo

Ce que l'on attendait vers 2030 a eu lieu en octobre dernier. On a su seulement fin janvier qu'un ordinateur de Google DeepMind, AlphaGo, avait battu cinq victoires à zéro un professionnel du jeu de go.

En simplifiant, AlphaGo comprenait deux systèmes : l'un auto-apprenant, copiant l'humain, un réseau de neurones ; l'autre jouant contre lui-même. Accessoirement, Google a battu IBM dont l'ordinateur Watson avait battu des joueurs de « Jeopardy ! » en février 2011. L'intelligence artificielle fait donc des pas de géant... accélérés.L'homme sera-t-il soumis aux algorithmes et aux cobots, les robots apprenants ?Depuis la création de cette chronique en novembre 2013, j'insiste sur l'importance de l'intuition. L'intuition trouve peu de place dans l'esprit cartésien français.

« Prouvez-le-moi ! » est la réponse habituelle. « Avez-vous fait une étude de marché ? » est la question qui suit.

Steve Jobs a-t-il fait une étude de marché avant de travailler sur ce qui allait devenir l'iPhone ? Larry Page et Sergueï Brin ont-ils fait une étude de marché avant de créer Google ? Évidemment, non. De nombreuses entreprises françaises achètent des startups qui ont pour l'essentiel travaillé sur intuition. Ou elles créent des « labs », ou autres noms proches de structures, dans des locaux ou en général hors les murs, pour que des « jeunes » trouvent l'espace pour libérer leur intuition.

Qu'est-ce que l'intuition ?

L'intuition est un excès de vitesse de la connaissance. Elle s'exprime après bousculade.

La connaissance, c'est notre magasin du « lu, vu, entendu ». Ce magasin grossit chaque décennie. Il suffit de comparer un natif de 1850, 1900, 1950, 2000... Dans ce magasin, la connaissance a changé de nature et s'est élargie. La richesse de l'homme est dans la puissance de cette intuition, mais aussi de son émotion, de sa création.

Je rencontre de nombreuses entreprises. L'émotion ose à peine s'y exprimer.

L'intuition, pas du tout. La prospective, décrivant des chemins du futur, y a rarement sa place ; on y fait plus de la tendance, de la prévision, en la baptisant prospective « pour faire bien ». Le futur improbable n'y a surtout pas sa place. AlphaGo et ses algorithmes auto-apprenants auront bientôt un siège au Codir. Et pourquoi pas au conseil des ministres du gouvernement français ?

Il faut libérer l'intuition ! Donner leur place aux créateurs, notamment de l'art (architectes, vidéastes, metteurs en scène), aux chercheurs bizarres, aux fous qui nous dérangent. Soyons émotion, réaction, intuition, création... et regardons AlphaGo de haut!

Je repars en plongée.

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L'ouvrage le plus récent de Philippe Cahen :
Les Secrets de la prospective par les signaux faibles, Éditions Kawa, 2013

À découvrir aussi sa contribution à l'ouvrage collectif Rupture, vous avez dit disrupture ? Le futur est déjà derrière nous, Éditions Kawa, 2015.

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