Grand Mikado en vue à la tête des institutions

Quand il s'agissait de savoir qui serait président du Parlement européen à partir de février 2017, il n'y a longtemps eu que deux réponses possibles : l'actuel occupant du poste, le social-démocrate Martin Schulz ou celui qui serait choisi par le Parti populaire européen. Schulz ayant annoncé son départ pour tenter l'aventure de la course à la chancellerie allemande, on s'attendait à ce que l'un des trois candidats PPE déclarés - le français Alain Lamassoure, l'irlandaise Mairead McGuinness et le slovène Alojz Peterle - reprenne le flambeau. Mais patatras !

Le chef de file des sociaux-démocrates, l'italien Gianni Pittella, s'est rebiffé. Le 30 novembre, il a annoncé sa candidature. Dans la foulée, le libéral belge Guy Verhofstadt, misant sur l'incapacité des deux grands partis à finalement trouver un arrangement, s'est mis sur la ligne de départ. Ce qui devait être une formalité est redevenu un jeu politique ouvert.

Du côté du PPE, on crie à la trahison. Martin Schulz n'a-t-il pas signé en 2014 un accord - « technique », disent les socialistes - avec le chef de file des députés de centre-droit, son compatriote Manfred Weber, aux termes duquel le PPE devait récupérer la présidence du Parlement en janvier 2017 ?

Nenni, dit-on dans le camp socialiste. Ce type d'arrangement relevait du monde d'« avant », quand la couleur politique du Parlement européen n'avait aucune incidence sur les autres institutions. Or, en 2014, les partis ont joué le jeu des « Spitzenkandidaten », s'engageant à ce que la tête de liste du parti qui arriverait en tête de l'élection devienne président de l'exécutif européen. C'est ainsi que Jean-Claude Juncker devint président de la Commission. Bruxelles faisait ainsi un pas vers une république parlementaire.

"Laisser remplacer Martin Schulz par un homme de droite serait rayer le subtil arrangement de 2014"

À l'époque, les sociaux-démocrates étaient prêts à laisser également le Parlement à la droite, à condition que les chefs d'État choisissent leur candidate, la Première ministre danoise Helle Thorning-Schmidt, pour la présidence du Conseil européen, l'assemblée des chefs d'État et de gouvernement. La chancelière allemande refusa et y plaça le polonais Donald Tusk. C'est ainsi que Martin Schulz, tête de liste socialiste, fut fait président du Parlement.

Maintenant qu'il s'en va, expliquent les socialistes, le laisser remplacer par un homme de droite serait simplement rayer d'un trait de plume le subtil arrangement de 2014 et nier la politisation du jeu européen en confiant les trois institutions de l'Union au PPE.

D'où la demande de Gianni Pittella au PPE : vous me soutenez pour la présidence du Parlement ou bien vous confiez la présidence du Conseil européen à un social-démocrate quand le mandat de Donald Tusk arrivera à son terme, en juin 2017 ? En théorie, il peut, si son groupe le suit, bloquer l'élection du prochain président du Parlement.

Plus probablement, il reviendra aux chefs d'État et de gouvernement qui se retrouvent à Bruxelles le 16 décembre de remettre de l'ordre dans ce grand Mikado. Il n'est pas dit que l'Italien gagne, tant la social-démocratie est faible après l'échec de Matteo Renzi et le départ annoncé de François Hollande. En attendant, il a raison sur un point. Il n'est pas normal que l'alternative, pour la présidence du Parlement, ait été, jusqu'à l'annonce du retrait de Martin Schulz, entre un député social-démocrate allemand et un autre de centre-droit. Cela montre que Bruxelles n'a pas terminé sa mue démocratique et combien elle est sous l'influence de la politique intérieure allemande.

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Commentaires 5
à écrit le 10/12/2016 à 8:38
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Pourquoi attacher tant d'importance à ce parlement dont les élus sont inconnus de leurs électeurs et qui sont élus par moins de la moitié de l'électorat. l'exemple même de la non représentativité et une caricature de démocratie

à écrit le 09/12/2016 à 18:05
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Je propose qu'on vire tout ceux dans la commission et dans le parlement qui n'ont pas été élu démocratiquement par les européens.

à écrit le 09/12/2016 à 14:14
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"Maintenant qu'il s'en va, expliquent les socialistes, le laisser remplacer par un homme de droite serait simplement rayer d'un trait de plume le subtil arrangement de 2014 et nier la politisation du jeu européen en confiant les trois institutions de...

le 09/12/2016 à 18:26
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Affirmatf !!!!!

le 09/12/2016 à 20:37
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C'est ce que j'allais dire... Mais ce sera plutôt une sortie de l'Italie d'abord suivie par l'Espagne, le Portugal et la France qui sinon verra ses dernières industries laminées par la compétitivité retrouvée de ses voisins du sud.

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