Pas de panique, on est (enfin) en 2020 ! Que peut-on attendre de ce changement de décennie, incarné par la reprise de la conquête de Mars par une humanité à la recherche d'une « planète B » ? Dans une époque où des collapsologues font commerce de la « sixième extinction de masse », jusqu'à convaincre une partie de la jeunesse qu'elle est peut-être la dernière génération sur Terre, voire la première qui ne mourra pas de mort naturelle, un peu d'espérance serait bien utile pour traverser les récifs à venir. Effondrement climatique, nouvelle crise financière, révoltes des peuples laminés par l'explosion des inégalités : les risques sont réels. Oui, la décennie 2020 est sans doute la dernière au cours de laquelle nous pourrons encore faire quelque chose contre le caractère de plus en plus inéluctable du réchauffement climatique.
Oui, l'exubérance irrationnelle des marchés est exacerbée par la situation anormale des taux d'intérêt négatifs qui s'installe dans la durée. Payer celui qui emprunte et « taxer » celui qui prête est situation pour le moins exceptionnelle dans l'histoire. Certains y voient les prémices d'un effondrement du capitalisme, lequel devient une caricature de lui- même avec la domination de monstrueux monopoles (Gafa américains et B A T X chinois), archétype de ces multinationales à 1.000 milliards de dollars dénoncées dans le film éponyme d'Henri Verneuil. Dans ces années 2020 aussi, se rejouera le match éternel entre inflation et déflation ; pour l'instant, c'est encore la déflation qui gagne, l'inflation étant partie se réfugier dans le prix des actifs. Il suffit de regarder le prix stratosphérique des géants du luxe ou de l'immobilier dans les grandes métropoles-monde pour s'en convaincre.
Une « giletjaunisation » du monde
Faut-il pour autant prédire une nouvelle crise avec Nouriel Roubini, le Mister Doom (catastrophe) du forum de Davos, qui célébrera du 21 au 25 janvier sa cinquantième édition avec pour thème central (en anglais dans le texte) « Stakeholders for a Cohesive and Sustainable World » ? Les élites mondiales commencent à prendre conscience que, sans de nouvelles formes de solidarité, sans une refondation globale des institutions multilatérales, la nouvelle décennie est mal partie. La prochaine crise ne viendra probablement pas de l'économie. Certes, les indices boursiers sont hauts, mais tant que les taux d'intérêt et le prix du pétrole seront bas, « what's the fuck ?»
« Les marchés financiers ont prédit neuf des cinq dernières récessions ! », avait ironisé Paul Samuelson, Nobel 1970 et sans doute l'un des plus grands économistes de tous les temps. Beaucoup plus dangereuse est l'explosion de l'internationale des révoltes et de la colère qui, du Liban au Chili, révèle une « giletjaunisation » du monde. Si nouvelle crise il y a, elle sera beaucoup plus sûrement politique et annonciatrice d'une décennie de révolutions qui iront de pair avec les progrès un peu vertigineux de la technologie. Une chose est sûre, pour paraphraser un slogan à la mode dans les années 1970, en cas de crise mondiale, nous ne pourrons pas partir à l'étranger ! Le monde des années 2020 sera aussi marqué par le retour en force des nationalismes et des frontières, mettant sous pression le projet européen, lui-aussi contraint de se réinventer.
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