Euribor, le prix de l'entente

Trois nouvelles banques ont été mises à l'amende au nom de la distorsion de la concurrence dans le scandale de la fixation du taux Euribor, qui a éclaté en 2012. Faut-il libéraliser le système ou bien ôter des banques la fixation d'un tel taux?
Robert Jules
La commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager.

Dans la longue liste des amendes infligées au monde de la finance des deux côtés de l'Atlantique depuis la crise de 2008, Bruxelles vient d'inscrire ce mercredi trois banques impliquées dans le scandale de la manipulation de l'Euribor, le taux interbancaire fixé quotidiennement pour la zone euro.

 Elles devront verser à elles trois le montant non négligeable de 485 millions d'euros. JPMorgan Chase payant la plus large part avec 337 millions d'euros, Crédit Agricole 114,5 millions et HSBC 33,5 millions. La banque française a annoncé qu'elle ferait appel de cette décision jugeant qu'elle n'avait pas enfreint le droit à la concurrence, une position cohérente par rapport à la sienne depuis le début de l'affaire.

Certaines banques avaient déjà payé dès 2013

Pour rappel, le scandale de l'Euribor a éclaté fin 2012, après la révélation d'une entente entre plusieurs banques pour manipuler à leur avantage le taux quotidien auquel se prêtent les banques dans la zone euro. Dès 2013, Société Générale, RBS et Deutsche Bank avaient été mises à l'amende. Barclays, largement impliquée, n'avait rien payé pour avoir révélé l'affaire.

Cette affaire est révélatrice du fonctionnement de l'économie et de la finance aujourd'hui.

Techniquement, ce taux interbancaire est un moyenne fixée chaque jour, à partir du taux déclaré par chacune d'une quarantaine de banques auquel chacune elle va ou compte se financer sur des prêts non gagés sur des titres. Potentiellement, la possibilité existe que les banques puissent s'accorder sur un taux plus avantageux, voire que chaque banque déclare un taux qui puisse influer sur le taux fixé.

Les anomalies du système

Si le scandale a conduit le législateur à durcir la réglementation et rendre le système plus transparent, le problème de cette fixation du taux est ailleurs. Il excède le monde feutré de la finance, nous seulement parque que l'Euribor sert de référence de taux pour les crédits aux entreprises et aux ménages, mais aussi parce que le scandale est le symptôme des anomalies du fonctionnement du système financier.

Les banques empruntent à court terme pour pouvoir prêter à long terme, c'est la spécificité de leur métier. Or, aujourd'hui, ce taux quotidien influe directement et négativement sur celui des taux à long terme. L'évolution des revenus des banques dépend en effet d'un tel taux qui guide les arbitrages à court-terme de leurs investissements, qui vont plutôt vers les produits financiers les plus liquides - ces dérivés que l'on peut vendre ou acheter en quelques secondes- aux rendements les plus élevés. Dans ces conditions, les prêts à long terme qui financent plutôt l'économie dite réelle pâtissent de ces arbitrages en ne rémunérant pas le risque à la hauteur à laquelle il devrait l'être.

Un taux fixé par la BCE?

Pour mettre un terme à l'anomalie, certains préconisent de libéraliser l'activité bancaire et le marché des taux, mais les pratiques passées montrent que la tentation de l'entente est forte, sans compter l'opposition des opinions publiques. Renforcer la régulation risque de figer le système. D'autres préconisent que la Banque centrale européenne ou l'Autorité bancaire européenne fixe l'Euribor, ce peut être une piste mais l'institution de Francfort considère qu'elle en fait déjà beaucoup.

En attendant une réforme du système, c'est la commissaire européenne à la Concurrence qui surveillera la fixation du taux en fixant... les amendes.

Robert Jules

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Commentaire 1
à écrit le 08/12/2016 à 5:41
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"En attendant une réforme du système, c'est la commissaire européenne à la Concurrence qui surveillera la fixation du taux en fixant... les amendes." Et le contribuable Européen paiera ces amendes indirectement via le QE.

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