Être alliés pour résister

CHRONIQUE LE MONDE À L'ENDROIT - Alors que des élections décisives se profilent en 2024 pour les Etats-Unis et l'Union européenne, les démocraties devront s'unir pour résister dans ce monde fracturé.
François Clemenceau
François Clemenceau
François Clemenceau (Crédits : © DR)

Les plus grandes démocraties du monde vont se donner rendez-vous aux urnes en 2024. Aux États-Unis, les électeurs devront décider le 5 novembre si Joe Biden, défié à nouveau par Donald Trump, peut ou doit rester président de la première puissance mondiale. Cette élection, cruciale pour l'avenir même de la démocratie américaine, aura lieu cinq mois après un scrutin tout aussi décisif - le 9 juin - visant à renouveler le Parlement européen. Encore largement méconnu des citoyens français, en partie parce que leur classe politique le considère comme un acteur secondaire, ce dernier est en effet la chambre d'écho des débats de notre politique continentale, la seule à la bonne échelle des bouleversements du monde.

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Les coups durs se succèdent en Europe

Depuis les dernières élections, en 2019, l'Europe aura tangué sur ses pieds fragiles pendant cinq longues années. Le Brexit, la crise pandémique du Covid, l'assaut du Capitole à Washington par les partisans de Donald Trump, la guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine, l'inflation généralisée et, plus récemment, la recrudescence du conflit israélo-arabe après les pogroms indicibles du 7 octobre perpétrés par le Hamas palestinien ont laissé croire que l'Union était impuissante ou négligeable. Il faut dire que la mondialisation, dont elle avait voulu être l'un des acteurs majeurs, a généré au sein des classes moyennes européennes le sentiment que plus rien ne se décidait chez nous, que le centre de gravité de notre environnement n'était plus à Paris ou à Bruxelles mais dans l'océan Pacifique, à mi-chemin entre les États-Unis et la Chine.

La volonté des Britanniques de « reprendre le contrôle », la découverte que nos industries pharmaceutiques avaient délocalisé depuis longtemps leur production en Asie, le populisme trumpiste surfant sur la ceinture de rouille des usines abandonnées du Midwest jusqu'à vriller dans un quasi-putsch électoral, l'envol des prix de l'énergie après la décision de ne plus acheter russe, la fragilité de la mer Rouge, par laquelle transitent nos importations du monde oriental, tout ramène à cette mondialisation dont l'UE - première puissance commerciale mondiale - pensait bien profiter pacifiquement. Mais c'était sous-estimer un phénomène parallèle, celui des retours d'empires. Profitant de la mondialisation, la Chine, la Russie ou la Turquie ont voulu capitaliser sur le fait qu'elles sont indispensables au monde. Avec la brutalité et l'impunité qui, aux yeux de leurs dirigeants, allaient forcément de pair. Alors que l'Europe, elle, continuait de jouer naïvement le jeu de la diplomatie et du multilatéralisme, mais sans instaurer de rapport de force dissuasif.

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C'est donc de cela qu'il sera grandement question le 9 juin. Oublions trente secondes les jeux politiciens d'arrière-boutique dans nos capitales européennes. Et regardons plutôt ce qu'a su faire l'Europe lorsqu'elle a fini par comprendre qu'elle pouvait vraiment disparaître de la carte. À Strasbourg ou à Bruxelles, les députés européens, très souvent par de larges majorités allant de la droite aux sociaux-démocrates en passant par les écologistes et les libéraux centristes, ont voté le plan de relance post-Covid, le Green Deal, les lois sur l'encadrement du numérique, le soutien financier et militaire à l'Ukraine, tout en dénonçant les imperiums chinois et russe et les provocations irresponsables de la Turquie ainsi que les abus des droits humains à travers le monde.

Si Trump est élu, Poutine et Xi ramassent la mise

Le 9 juin, les électeurs européens précéderont aux urnes leurs amis et alliés américains. Wokisme, fascisme ? Oui, les figures les plus radicales tentent d'opposer aux États-Unis les deux extrémités du spectre identitaire et générationnel. En faisant fi de la volonté d'une majorité d'Américains de tourner la page, de rester au centre, de continuer à soutenir l'Europe tout en contenant les coups de boutoir chinois. L'Occident s'est considérablement démonétisé depuis l'élection de Trump en 2016. Mais si cet homme est élu en novembre prochain et que l'extrême droite europhobe continue de progresser au sein des Vingt-Sept, singulièrement en France et en Allemagne, alors Vladimir Poutine et Xi Jinping n'auront qu'à ramasser la mise. Entre Européens de droite et de gauche, il y a bien plus de points communs dès lors qu'on ouvre les fenêtres. Idem entre Européens et Américains, dès lors qu'il s'agit de s'allier et de résister pour la défense des libertés. En commençant par l'Ukraine, qui devrait être notre priorité commune, à moins que les citoyens n'en décident autrement.

François Clemenceau

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Commentaires 5
à écrit le 31/12/2023 à 18:50
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Oui...et nous avons désormais l'IA pour nous aider.! Accessoirement les cryptos monnaies !

à écrit le 31/12/2023 à 11:50
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Unir de soi disant Démocratie c'est perdre de la démocratie ! Quand on écarte des candidats qui risqueraient de gagner démocratiquement ou que l'on impose des candidats médiatiquement, on ne peut dire qu'elle existe encore ! ;-)

le 31/12/2023 à 18:52
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@Bah - Écarter Jordan Bardella n'est pas un déni de démocratie mais d'utilité publique.

à écrit le 31/12/2023 à 10:09
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Bonjour, devant se monde fracturé et dangereux, les démocratie devrons s'alliée... Deja , si l'union européenne pouvaient être ferme avec certains membre de notre union, ( pologne, Hongrie). Des pays qui effectue des chantages afin d'obtenir des...

le 31/12/2023 à 10:37
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L'Union européenne est une alliance et non une nouvelle unité d'État. Il se compose d'États-nationaux, dont certains ne sont pas compatibles les uns avec les autres. De nombreux États n'ont pas rejoint l'UE de l'idéalisme européen, mais en raison des...

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