Industrie 4.0, un chantier à forte teneur managériale

Avec l'arrivée de la numérisation, l'industrie devient un système global interconnecté dans lequel les machines, les systèmes (ERP) et les produits communiquent en permanence. Mais, si les outils techniques sont maintenant disponibles, il reste un grand défi à reveler : celui de la transformation organisationnelle de l'entreprise. Par Olivier Vallée, responsable du programme Usine du futur chez Rockwell Automation.
Olivier Vallée.
Olivier Vallée. (Crédits : Reuters)

Services en ligne, intelligence artificielle (IA) et Internet des objets (IoT) permettent d'observer les habitudes de consommation d'un individu en temps réel, rien qu'en analysant, avec sa permission, les données collectées à partir des objets qu'il utilise. Faire d'un individu un consommateur singulier est la force de l'approche des services en ligne. Mais centrer toute l'attention sur lui ne suffit pas. Pour faire mouche, les industriels doivent parallèlement revoir la conception de leur outil de production.

Amélioration continue du produit et... de la satisfaction client

Une poignée de grands groupes industriels ont déjà franchi le pas. Mais prenons l'exemple fictif d'un pneumaticien équipant ses pneus de capteurs d'usure. Ils informent l'automobiliste du moment exact où il faudra changer les pneus. À ce service, apprécié du client, on peut ajouter l'amélioration continue du produit. En effet, si le pneumaticien a accès aux informations collectées, toujours avec l'accord du client, il peut, par exemple, mesurer la rapidité de l'usure et/ou de la déformation des sculptures.

Au-delà de l'ordre de fabrication d'un nouveau pneu, lancé automatiquement par l'ERP via le MES, afin de livrer le client dans les meilleurs délais, ces informations peuvent révéler aussi des problèmes que le bureau d'étude aura à cœur à résoudre. Une fois la sculpture redessinée, le bureau des méthodes prend le relai en vue de fabriquer un pneu doté d'une plus grande durabilité et d'une meilleure adhérence. Le nouveau produit devra satisfaire davantage l'utilisateur et, a priori, concourir à le fidéliser. In fine, la collecte de milliards de données sur tous les pneus en cours d'utilisation contribue à l'amélioration continue du produit. En mettant le client au centre, le pneumaticien en fait un allié et un fidèle.

La technique est là, reste à engager la transformation organisationnelle

Aujourd'hui, les industriels peuvent relever ce type de défi car les moyens techniques sont là - capteurs radiocommunicants, déploiement de réseaux bas débit-longue distance (LPWA), baisse du coût du stockage des données, élargissement de l'offre de logiciels de tri et d'analyse des données, démocratisation des algorithmes prédictifs (intelligence artificielle avec apprentissage supervisé ou non), etc.

Mais la première démarche à suivre consistera à rendre possible l'échange d'informations entre le réseau des fonctions supports (IT) et le réseau de l'atelier (OT) qui parlent exceptionnellement le même langage car le marketing, la comptabilité, etc., devront communiquer davantage avec la maintenance, la production...

Autre sujet sensible : avant même d'aborder la question technique, particulièrement complexe, un tel chantier impose une transformation organisationnelle qui touche aux fonctions et aux compétences des salariés. Il faudra beaucoup communiquer en interne et parfois requalifier.

Enfin, rappelons une évidence : la technique n'est pas une fin en soi. Elle doit servir un objectif doté d'une stratégie. Une fois tous ces prérequis réunis, on pourra alors envisager le déploiement technique. Naîtra à partir de ce moment une chaîne numérique qui connectera de plus en plus intimement le client à l'usine, autrement dit la demande à la production. L'outil de production devra obligatoirement savoir conjuguer qualité et agilité. C'est le prix d'une production sur mesure, à défaut d'être personnalisée.

Pour conserver leurs marchés, voire en conquérir de nouveaux, les entreprises industrielles n'ont plus le choix : elles doivent manager l'industrie du futur.

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(*) Olivier Vallée, Responsable du programme Usine du Futur chez Rockwell Automation.

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Commentaire 1
à écrit le 11/06/2018 à 14:45
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C'est du sur usure... Et l'obsolescence programmée de plus en plus finement, invisible, masquée ? Bande d'usuriers !

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