« 10% pour tout changer » : une nouvelle coalition en faveur de la planète et de la société

Lancée le 28 mai dernier, la coalition « 10% pour tout changer » vise le point de bascule qui permettra aux entreprises déjà engagées d'être rejointes par d'autres, pour créer ensemble une nouvelle économie, plus respectueuse de l'environnement et des individus, grâce à un changement d'échelle.
(Crédits : DR)

Pas question, pour Antoine Sire, directeur de l'Engagement d'entreprise pour BNP Paribas, de culpabiliser les différents acteurs du monde carboné dans lequel nous vivons. Un monde dont il rappelle qu'il a été encouragé par les pouvoirs publics, développé par les entreprises, financé par les banques et acheté par les consommateurs... « Il ne s'agit pas de regarder d'où l'on part, mais où l'on veut arriver. Il faut raisonner en termes de transitions », dit-il. Et pour cela rien de tel que d'encourager tous les acteurs à adopter de bonnes pratiques. Pas étonnant dans ces conditions que BNP Paribas, déjà active dans ce domaine, de même que dans d'autres, tels que l'intégration de jeunes talents venus de milieux modestes, notamment en Seine-Saint-Denis, l'égalité des femmes et le soutien aux LGBT, ait rejoint la coalition « 10% pour tout changer ».

Lancée sous l'égide de Christophe Itier, Haut-Commissaire à l'Économie sociale et solidaire et à l'innovation sociale, le 28 mai dernier, elle a pour objectif de mettre en place, avec ces 10%, « un point de bascule », comme le précise Christophe Itier (voir son entretien ici). Une masse critique qui permettra aux entreprises déjà engagées d'être rejointes par d'autres, pour créer ensemble, en changeant d'échelle, une nouvelle économie, plus respectueuse de l'environnement et des individus.

Critères d'impact

Pour ce faire, la coalition, qui regroupe une centaine d'entreprises (Engie, Bonduelle, Leroy Merlin, Leboncoin, Crédit Agricole, Renault, BNP Paribas, Maif...), des acteurs de l'économie sociale et solidaire (La Croix Rouge, Ashoka, Mozaic RH, Phenix...), des dirigeants de réseaux d'entreprises (Mouvement des ETI,  Observatoire de la RSE...), une nouvelle génération d'entrepreneurs (GoJob, Castalie, Le Slip Français), ainsi que des experts, des universitaires et des parlementaires, tous fers de lance, à leur façon, de la transition énergétique et sociale, a décidé d'un agenda commun. Elle va travailler par groupes, composés de profils variés, sur cinq thèmes majeurs, qui vont du financement de l'économie à impact (groupe auquel appartiennent BNP Paribas et Phenix), à la définition de critères sur l'impact en passant par l'action dans les territoires. Dans tous les cas, il s'agit de faire en sorte qu'au-delà de ces pionniers, la voie au « changement systémique dont nos sociétés ont besoin » soit ouverte, précise Christophe Itier. « Nous sommes là pour aider ces acteurs à aller aussi vite que possible », souligne de son côté Antoine Sire. Car il y a urgence. Au point de vue du réchauffement climatique et des maux qu'il engendre, dont les déplacements de populations et les migrations, mais aussi de la fracture sociale et territoriale, comme le récent mouvement des Gilets Jaunes l'a montré.

Risques inacceptables

« Chaque acteur, et notamment les entreprises, peut mettre en place des actions concrètes, en interne comme en externe », insiste Antoine Sire. Ainsi, BNP Paribas, première grande institution à avoir lancé une fondation d'entreprise, en 1984, a appuyé la recherche sur le climat dès 2011 et s'est engagée peu après à ne plus financer certains secteurs, comme le gaz de schiste - « puisqu'ils ne vont pas dans le sens de la transition énergétique », explique Antoine Sire. De ce fait, ces acteurs présentent des risques, pas plus acceptables pour une banque que pour un investisseur institutionnel ni un particulier. Un argument de poids... « Nous accompagnons d'ailleurs nos clients investisseurs dans la compréhension de ces risques et de l'impact que peuvent avoir leurs activités sur l'environnement et la société », précise-t-il.

Des prêts verts

L'institution financière participe également, depuis 2018, à une autre coalition, la Tropical Landscapes Finance Facility (TLFF), pour faciliter l'accès au financement privé d'entreprises qui luttent contre le réchauffement climatique, agissent en faveur de la biodiversité et créent des emplois dans des zones rurales auparavant dévastées, en particulier par la déforestation. « Ce sont des projets concrets, internationaux, sous l'égide de l'ONU », précise à cet égard Antoine Sire. Ainsi, en Indonésie, le premier prêt vert, octroyé en 2018, finance un projet de plantation d'hévéas. Sur un domaine de 88 000 hectares, 34 000 sont réservés à la production de caoutchouc naturel, le reste des terres étant utilisé pour la restauration de la forêt, la préservation de la biodiversité et la protection des éléphants, des tigres et orangs-outans de Sumatra. Sans oublier la création à venir de quelque 16 000 emplois durables...

Ce qui guide Antoine Sire dans sa réflexion, ce sont les 17 Objectifs de Développement Durable adoptés par l'ONU en 2015. Il les a toujours sur lui. Au-delà de grands projets à l'échelle internationale, la banque, comme les autres membres de la nouvelle coalition des 10%, agit également à un niveau plus local, en octroyant par exemple des micro-crédits, avec l'ADIE, pour des projets d'intérêt général et créateurs d'emplois, aussi bien dans des zones urbaines prioritaires que rurales. En outre, la banque intègre cette philosophie pro-environnement, pro-sociale et pro-territoriale dans son fonctionnement au quotidien. A titre d'exemple, le plastique est en passe d'être éliminé à travers toute la société, en France et à l'étranger. De même, les responsables d'entités du groupe devront bientôt appliquer des critères fondés sur la philosophie de la nouvelle coalition pour établir leur business plan... En somme, « notre adhésion au 10% est une façon d'officialiser les actions déjà entreprises », résume le directeur de l'Engagement d'entreprise pour BNP Paribas. Avec une ambition : que l'impact, réel et concret, de ces actions serve à convaincre tous les citoyens d'adhérer à un nouveau modèle de société.

Phenix, un modèle appelé à devenir la norme

La startup, lancée en 2014, accompagne la grande distribution dans la gestion des invendus alimentaires. Et tout le monde y gagne : les enseignes, les consommateurs - et la planète.

Si rien, ou presque, ne prédestinait Jean Moreau à devenir startuppeur -  il a cofondé Phenix, une appli anti-gaspillage alimentaire, avec Baptiste Corval, en 2014 - la nouvelle coalition « 10 % pour changer » a en revanche tout pour le séduire. « C'est Christophe Itier qui est venu nous chercher, pour participer à des petits déjeuners de réflexion, dit-il. L'idée étant de montrer que le succès de Phenix est un modèle d'avenir, viable et rentable, de nature à devenir dominant dans l'économie ». Spécialiste des fusions/acquisitions chez Merrill Lynch pendant cinq ans, le jeune homme regrettait le « manque de sens et d'impact » de ses activités dans la banque d'affaires. « J'ai voulu aligner mes convictions personnelles et mes compétences », poursuit-il. Pour ce faire, il étudie différents secteurs, en vue de lancer une entreprise, et comprend vite que « le gaspillage alimentaire est un bon terrain de jeu ». Pour accompagner les grands distributeurs sur la route du zéro déchet, zéro invendu, il met au point avec son coéquipier une appli mobile que les consommateurs peuvent utiliser pour repérer les magasins qui proposent à des prix avantageux des produits parfaitement sains, mais invendus et donc destinés à être détruits  - ce qui, ironie de l'histoire, coûte cher aux grandes enseignes... « Une autre partie de ces invendus peut être basculée vers des associations caritatives comme la Croix Rouge et les Restos du coeur, et enfin, une dernière sert à l'alimentation animale », détaille l'entrepreneur. Et tout le monde y gagne. Les distributeurs, qui écoulent leur marchandise et profitent même d'une réduction d'impôts lorsque les denrées sont offertes à des associations caritatives, les consommateurs, bien entendu, qui peuvent se nourrir à moindres frais, les associations, qui ont bénéficié en 2018 de 30 millions de repas gratuits, sans oublier la planète, puisque produire pour jeter ne fait qu'épuiser un peu plus les ressources.

Success-story Née d'une ambition environnementale et sociale, la société est vite devenue une success-story. Aujourd'hui déployée dans une vingtaine de villes de l'Hexagone, elle emploie 130 personnes. Elle a également effectué deux levées de fonds, dont une de 15 millions d'euros en fin 2018, auprès d'Environmental Technologies Fund (ETF Partners), Bpifrance, Sofiouest et Arkéa. « C'est notamment pour cette raison que je fais partie de l'un des groupes de travail de la coalition 10 %, celui qui planche sur le financement des entreprises à impact, en particulier par des investisseurs privés. À l'image de la tech for good, nous voulons de la finance for good », précise Jean Moreau. Le succès de Phenix, dans son déploiement comme dans l'intérêt que la start-up suscite auprès d'investisseurs, peut en effet servir d'exemple - et créer des vocations. Au-delà du financement, accompagnement et formation de jeunes porteurs de projets entrepreneuriaux à impact sont d'ailleurs en gestation. Et si Phenix, qui exporte déjà son modèle, notamment en Espagne, en Belgique, en Suisse et au Portugal, veut poursuivre son développement sur toute l'Europe, de même que la start-up veut élargir son champ d'action à la restauration collective, à l'agriculture et à l'industrie, Jean Moreau a une autre ambition : « nous voulons polliniser toute l'économie et embarquer les grandes entreprises du CAC 40, dit-il, pour que de marginaux, ces modèles deviennent la nouvelle norme ».  La coalition « 10 % pour changer » ne vise pas autre chose... Et Jean Moreau est déterminé - et optimiste. « Les astres s'alignent, dit-il, les jeunes sont en quête de sens, veulent avoir un métier utile et préserver la planète ». Ils pourraient donc, demain, rejoindre la grande communauté de ceux qui veulent agir pour le social et l'environnement, dès aujourd'hui.




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Commentaire 1
à écrit le 07/09/2019 à 7:54
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Avec l’argent de qui ces changements «  verts »?

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