"Avec ou sans crise, l'environnement n'est pas la priorité des gouvernants"

Le cinquième rapport du GIEC sur le climat est publié dans un contexte de crise économique. La politologue Annika Ahtonen spécialiste du développement durable au sein du think tank européen European Policy Centre détaille pour la Tribune les conclusions à tirer de ce rapport en termes d'enjeux européens.
Annika Ahtonen, spécialiste du développement durable au sein du think tank européen European Policy Centre. Copyright eesc.europa.eu

Très attendu, le nouveau rapport du Giec sera-t-il entendu? Pour Annika Ahtonen, chargée des questions environnementales pour le think-tank European Policy Centre, la voix des scientifiques jouit toujours d'une crédibilité plutôt élevée à  Bruxelles. Mais le contexte économique fait prévaloir les questions de compétitivité industrielles sur les considérations environnementales.

Les questions environnementales ne sont plus le sujet numéro un. Comment le Giec peut-il espérer convaincre les responsables politiques de faire revenir cette question au centre de leurs préoccupations ?

Avec ou sans crise économique, les questions environnementales - même en Europe - ne risquent pas d'être tout en haut de la liste des priorités. La question qui se pose est la suivante : comment faire pour qu'elles soient davantage prises en considération ? Ce qui importe avant tout pour les gouvernants, ce sont une croissance durable, le progrès, le bien-être des citoyens… Donc il faut avant tout faire comprendre aux gouvernants que pour tenter d'atteindre ces objectifs, il faudra prendre en compte le changement climatique.

Les scientifiques notamment ceux du Giec, jouent à cet égard un rôle très important, tout comme ceux qui traduisent les résultats recherchent. Il leur appartient de communiquer de la meilleure façon possible afin de montrer comment l'activité sociale et économique bénéficiera d'une politique environnementale forte. Il leur faut traduire cela de façon compréhensible pour des gouvernants qui ont du mal à voir les choses à très long terme. Un objectif à 20, 25 ou 50 ans est difficile à appréhender pour des responsables politiques ayant des échéances bien plus courtes.

Mais comment croire la parole scientifique alors qu'elle est de plus en plus mise en doute (le Giec a par exemple reconnu que la prédiction de la fonte des glaces de l'Himalaya était une erreur) ?

Les gouvernants ne se réfèrent pas à un seul rapport mais à un faisceau de preuves convergentes, et notamment des études provenant de la Banque mondiale ou bien de l'OCDE. Les critiques ne sapent pas la crédibilité des faits. Sur la base, tout le monde est à peu près d'accord. Il y a une différence entre l'Union européenne et d'autres régions du monde, comme les Etats-Unis où les climato-sceptiques sont beaucoup plus influents.  

Mais même en Europe la voix des climato-sceptiques s'élève, notamment pour critiquer le montant des dépenses réalisées en faveur de l'environnement…

Il y a deux types de tactiques : investir pour réduire les émissions de CO2 au sein de l'Europe et, c'est vrai, risquer d'exporter le problème ailleurs. Mais on peut aussi bien réfléchir à la meilleure manière de réduire les émissions de façon globale. De ce point de vue, ce qui se décidera au sommet de l'ONU sur le climat à Varsovie sera très intéressant à observer. Bien sûr, il faudra déjà que les dirigeants européens s'accordent sur un projet commun. Mais il ne faut pas être trop pessimiste.

Les lobbies industriels jouant leur rôle, les initiatives pro-environnementales sont confrontés à des obstacles. Pour l'heure, quel est le rapport de force à Bruxelles ?

Bien sûr, toutes les voix sont entendues. Il est vrai qu'avec la crise, le débat s'est transformé. On observe une guerre entre la compétitivité et le climat. Depuis quelques mois, la préoccupation pour la compétitivité a pris le dessus, en raison des frustrations causées par la crise. Mais s'il est vrai que la prospérité européenne repose en partie sur l'industrie, ce secteur doit aussi prendre en compte la problématique environnementale. Oui, cela peut être un facteur de compétitivité de réduire les émissions de CO2. Par exemple, si l'on utilise la technologie pour réduire nos émissions, cela peut réduire les dépenses d'énergie. La recherche efficacité énergétique ne coûte pas seulement de l'argent mais peut en rapporter ! Mais c'est vrai qu'il est toujours plus facile de dire "non" aux initiatives.

 
En France, les gouvernements successifs tentent de mettre en place une taxation du carbone. Dans quelle mesure ce genre d'initiative vous semblent-elles une bonne manière de concilier ces points de vue antagonistes ?

Il faut internaliser les coûts de l'énergie. Si l'impact négatif des émissions sur l'environnement est intégré aux coûts de production, la transition vers une énergie plus propre sera plus rapide. Une taxe sur les produits selon leur empreinte carbone serait également souhaitable. Bien sûr elle serait très difficile à contrôler. Quelle est l'empreinte carbone d'un bien fabriqué en Chine ? Malgré ces difficultés, ce type de mesure me paraît tout à fait souhaitable.

 >> Un budget 2014 peu écolo qui épargne le diesel

 A part les pays scandinaves qui sont les pays les plus actifs en Europe ?

Les pays scandinaves sont à la pointe, c'est vrai, mais ils sont confrontés à leurs propres défis, à cause de leurs hivers très longs par exemple. Ils ont beau faire beaucoup d'effort, investir beaucoup pour réduire leur consommation d'énergie, leur empreinte carbone reste élevée. Ailleurs en Europe, nombre d'initiatives sont aussi prises au niveau local. Je pense aux smart-cities, ces villes qui réfléchissent à la meilleure façon de mutualiser les dépenses d'énergie.

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Commentaires 34
à écrit le 30/09/2013 à 18:10
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Notre comportement de prédateurs suicidaires et impitoyables mis en dérision par les vidéos de Bridget Kyoto http://www.youtube.com/bridgetkyoto

à écrit le 28/09/2013 à 20:02
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Je pense que chacun à sa manière se dit il faut changer nos habitudes recycler au maximum éviter de polluer. Mais qui pollue ce changement dans l'esprit des citoyens le politique qui ne voit dans l'écologie, mot galvaudé, que les taxes et les impôts...

le 29/09/2013 à 1:19
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Dans les faits on a amplement constaté que lorsqu'il n'y a pas de contraintes et d'incitations, les gens et entreprises ne font aucun effort en termes notamment d'environnement, d'énergie, de recyclage etc, surtout dans certains pays, d'autres étant ...

à écrit le 28/09/2013 à 11:45
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Encore un rapport des climato-menteurs. La température du globe est stable depuis 10 ans. Voir le relevé de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration, organisme d'observation fédéral américain):"the year 2012 was the 10th warmest year ...

le 28/09/2013 à 13:13
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Faudrait savoir !!!

à écrit le 28/09/2013 à 1:02
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Avec ou sans les dirigeants, la transition énergétique sera négociée parce que c'est une nécessité stricte pour l'Humanité. Le structure politique des pays en sera affectée, mais cette fois-ci pour le bien de leurs populations. Les Politiciens qui se...

à écrit le 28/09/2013 à 0:09
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9a fait combien de CRIS d'ALARME des scientifiques , entendus par personne! on ne pourra pas dire qu'ils ne nous auront pas prévenus..Tant pis pour nous !!

le 28/09/2013 à 0:41
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Oui, alarmé par l'augmentation de ma facture d'électricité. Ce doit être pour ça qu'elle a presque doublé en quelques années... à cause d'EDF qui a entendu aussi les cris d'alarme... Moi qui pensait que ce serait à cause de mon air conditionné...

le 29/09/2013 à 1:47
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Sauf que votre facture augmente principalement à cause du vieillissement du parc nucléaire et que vous avez bénéficié auparavant d'une énergie dont les principaux investissements sont amortis. Ce qui ne n'empêchera pas votre facture d'augmenter égale...

à écrit le 28/09/2013 à 0:07
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Il est sûr qu'ils ne veulent pas voir plus loin que le bout de leur nez, plutôt leurs porte feuilles, serait plus exact: cupidité, irresponsabilité, bêtise grave ; mamelles des gouvernants !

à écrit le 28/09/2013 à 0:00
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Pourtant il serait grand temps pour nous mêmes, et aussi et surtout nos enfants et petits enfants !

à écrit le 27/09/2013 à 22:58
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Y'en à marre des Allègres et autre climato-sceptiques au cerveau pas plus gros que celui d'une Autruche qui mentent et trichent comme des arracheurs de dents ! Ici des réponses http://www.skepticalscience.com/big-picture.html

le 27/09/2013 à 23:23
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Oui c'est exactement ça, des Autruches ! http://www.youtube.com/watch?v=zy-YGekT4XE&feature=share&list=UUWH0DuLLmp6F8voOlN5UZGwteur

le 27/09/2013 à 23:26
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+ 1 La devise des parents climato-je-m'enfoutistes qui trimballent leurs enfants jusqu'à l'école dans leurs gros 4x4 : "Je t'aime je te Tue !"

le 28/09/2013 à 0:45
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oui, comme il fait bon de sentir l'air pur et frais... pas comme ici.

à écrit le 27/09/2013 à 22:51
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L'Humanité, une espèce mal terminée, proliférante et dévastatrice. Nous sommes la pire espèce prédatrice qu'ai jamais portée notre Terre Mère. Notre sinistre destin est de mettre en esclavage les milliards d'autres espèces vivantes sur Terre et de f...

le 28/09/2013 à 0:02
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Lire le livre de Pacalet , l'Humanité disparaitra, bon débarras ! EDIFIANT !

le 28/09/2013 à 0:44
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Et vous allez commencer par vous-même je suppose?

le 28/09/2013 à 9:15
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on est tous dans le même bateau, alors vous savez, si ça vous arrive, ça m'arrivera à moi aussi...de toute façon, faut bien mourir un jour....

le 28/09/2013 à 18:52
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Ben oui je sais parfaitement que je ne vais pas échapper à mon sinistre destin mais moi j'ai la conscience tranquille, vous connaissez la Légende du Colibri" ?

à écrit le 27/09/2013 à 20:47
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Depuis 1973, chaque crise au Moyen Orient et chaque hausse des prix du pétrole ont été suivies d'un fort ralentissement économique en France et Europe. 1973 la guerre du Kippour, 1979-1980 la révolution en Iran et la guerre Iran Irak, 1990-1991 la gu...

à écrit le 27/09/2013 à 17:59
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Si il y a tant de "climato-sceptiques", c'est aussi parce que l?écologie est portée par un parti qui traite, certes, de l'écologie, mais surtout a une position très à gauche souvent fort éloignée des vrais problèmes écologiques: le nucléaire par exem...

à écrit le 27/09/2013 à 17:45
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"Ce scepticisme peut s'expliquer par les Cassandre du passé récent. Au tout début des années 70, mes profs de fac annonçaient la fin du pétrole pour les années 90... et on nage encore dedans ! Dans les années 80, c'étaient les pluies acides : ah ces ...

à écrit le 27/09/2013 à 17:43
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Dans Le Monde, l'article sur le réchauffement climatique est précédé par une photo de tempête tropicale comme il y en a toujours eu et ensuite une photo d'inondation, comme il y en a toujours eu, même quand la photographie n'existait pas, travers dan...

à écrit le 27/09/2013 à 17:04
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Comment imaginer de l'Ecologie avec des dirigeants décrépis, ringards, corrompus 'et oui j'ose le dire' et avec un lobby du pétrole TOTAL et EDF !!!! Pas la peine de rêver autant crever c'est plus simple. C'est tellement débile ! L'écologie est la vr...

à écrit le 27/09/2013 à 16:01
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http://www.lefigaro.fr/politique/2013/09/26/01002-20130926ARTFIG00605-les-socialistes-excedes-par-les-ultimatums-a-repetition-des-ecologistes.php

à écrit le 27/09/2013 à 16:00
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http://www.lefigaro.fr/politique/2013/09/27/01002-20130927ARTFIG00261-eelv-un-parti-sous-tension.php

à écrit le 27/09/2013 à 15:59
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http://www.lefigaro.fr/politique/2013/09/27/01002-20130927QCMWWW00320-cecile-duflot-doit-elle-quitter-le-gouvernement.php

à écrit le 27/09/2013 à 15:55
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La seule et unique question qui vaille est la suivante: engage-t-on des réformes sociétales d'une envergure jamais envisagée sur la foi de rapports provenant d'organisations politiques et non scientifiques. Vous parlez environnement pour venir ensuit...

le 28/09/2013 à 1:24
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Le Giec n'est qu'une petite entité administrative. Les rapports viennent bien des centres de recherche scientifique et uniquement qui publient indépendament leurs travaux et ce depuis près de 50 ans à partir de plusieurs disciplines et de la part dés...

le 28/09/2013 à 3:08
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Un tel concentré de mauvaise foi me paraissant inimaginable, j'opterai pour une sincérité candide, et un lecture trop assidue de la presse main stream.

à écrit le 27/09/2013 à 15:20
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L'environnement devrait être la priorité de tout un chacun et à plus forte raison des gouvernants. C'est d'un mode de vie que l'on parle et malheureusement seule une trés grosse catastrophe nous fera prendre conscience que notre TERRE est vivante et ...

le 28/09/2013 à 11:32
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+++++

à écrit le 27/09/2013 à 15:17
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Ne pas oublier que de manière duale ou "en parallèle" des aspects CO2 et climatique, il y a aussi les aspects "contraintes d'accès aux ressources", dont on parle moins, mais dont l'impact est sans doute encore plus direct en termes "bassement économi...

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