La déflation consentie ou un suicide européen

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, le suicide de la déflation consentie.

Le spectacle des gouvernements européens est juste désolant. Ils tergiversent encore sur la parade à organiser pour consolider la reprise européenne, alors que la reprise n'est déjà plus là et que nous glissons vers le pire des scénarii qui soit, celui de la déflation. Ils pinaillent sur l'application de règles inadaptées quand l'ensemble des Etat-membres aurait dû depuis longtemps se mettre en ordre de marche pour éradiquer le poison qui les mine et dont les dégâts se font sentir bien au-delà des frontières de l'Europe.

L'histoire risque de juger sévèrement cette période où toute l'énergie de nos gouvernants se consume dans la négociation de petits trocs dérisoires. Le confort de quelques professions réglementées, contre la clémence allemande sur le budget français.

100 milliards par an sur 3 ans

En parallèle, le pompeux « new deal » européen et les centaines de milliards affichés pour montrer que l'on agit avec vigueur, ne doivent pas faire illusion : 100 milliards par an sur 3 ans, soit 0,8% du PIB européen, l'impulsion paraît significative. Mais lorsqu'on ajoute que le plan se fera sans dettes nouvelles, et uniquement par une meilleure utilisation des fonds de l'Union et de la Banque européenne d'Investissement, on comprend alors que nos gouvernants travaillent à faire semblant de relancer la machine sur la base d'engagements déjà existant. Et même si la BEI devait lever des fonds supplémentaires, on ne voit pas comment elle pourrait faire bondir ses prêts, aujourd'hui de 75 milliards d'euros, de plus de 15 ou 20 milliards supplémentaires.  Ajoutons à cela les délais de mise en œuvre, et le paquebot européen n'est pas prêt d'être dérouter de la déflation.

Nos gouvernants ont-ils bien pris toute la mesure du risque, si le syndrome japonais s'étendait à l'Europe. Comme je l'ai indiqué récemment, après 5 ans de croissance nominale zéro, notre déficit dépasserait 10% du PIB ; notre dette 135%. Même le déficit allemand replongerait à - 7%. Autrement dit, 5 ans de purge s'envoleraient en fumée, nous conduisant à une situation pire que celle que nous voulions combattre. Du chômage massif, du sous-investissement chronique, des faillites en masse. Et seule consolation, dans ce scénario noir, une épargne surabondante au rendement positif pour mettre à l'abri les vieux rentiers européens.

Nos gouvernants tirent orgueil d'avoir été prompts à endiguer la crise de 2008

Une réécriture bien contestable de l'histoire lorsque qu'on la met en regard de ce qui s'est passé dans les pays anglo-saxons. Il y aurait surtout beaucoup à redire sur l'ardeur des pays à refuser une annulation partielle des dettes pour sauvegarder les banques, limiter leur besoin de recapitalisation et protéger ainsi l'intérêt des retraités allemands.

Nous payons aujourd'hui le prix de cette abdication face au refus du premier créancier européen  à assumer les conséquences de ses mauvais choix de placement. Nous avons mis au final  beaucoup d'ardeur à éviter un choc budgétaire à l'Allemagne.

Ces mêmes gouvernements usent aujourd'hui leur énergie pour faire de la réformette

Pendant ce temps, le Titanic européen vogue à sa perte. Et s'il y a suicide, comme le prétend un célèbre essayiste, c'est bien celui de la déflation consentie. Le même  que celui qui avait fait le lit du fascisme et du nazisme en Europe dans l'entre-deux-guerres.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 8
à écrit le 01/11/2014 à 9:22
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Entièrement d'accord avec l'article. Pour moi le scénario (explosif) qui nous a amené dans la déflation infernale est le suivant : - l'Allemagne se lance dans une dévaluation interne pour redresser sa compétitivité pendant que la dette privée des...

à écrit le 31/10/2014 à 8:50
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Pour sortir de l'impasse politique et économique oû la France se trouve, il faut apporter une alternative au capitalisme ultra libéral et au systeme monétaire en changeant de paradigme:1_développer un capitalisme mutualiste et solidaire qui permet la...

à écrit le 30/10/2014 à 20:43
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Les prix vont baisser ainsi que les salaires en France, c'est cela la déflation.... C'est ce qui s'est passé en Espagne, nous allons connaitre une baisse de l'immobilier et une augmentation du chomage.... Et donc les prix vont baisser pendant des a...

à écrit le 30/10/2014 à 17:19
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Entièrement d'accord avec l'article. Pour moi le scénario (explosif) qui nous a amené dans la déflation infernale est le suivant : - l'Allemagne se lance dans une dévaluation interne pour redresser sa compétitivité pendant que la dette privée des...

le 31/10/2014 à 8:38
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Trés belle démonstration de ce qui est , et, de ce qu il faut , mais quid de la monnaie?

le 31/10/2014 à 15:50
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L'Allemagne mène l'Europe occidentale au suicide. Encore... Avec comme appuis l'incompétence et la lâche complaisance de nos élites. Encore...

à écrit le 30/10/2014 à 14:13
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Juncker, Schultz et le Parlement Européen auront-ils le cran d'enrayer la catastrophe ?

à écrit le 30/10/2014 à 14:03
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Phénomène qui n'est, hélas, une surprise que pour les économistes et les politiciens, les autres ayant compris depuis déjà un bout de temps (mais n'ayant malheureusement aucun pouvoir !).

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