L'Europe entre longue agonie et implosion spectaculaire.

L'Europe est incapable de traiter les chocs qui affectent les pays membres. Pire: elle les aggrave. La zone euro a le choix entre implosion spectaculaire, évitée jusqu'à maintenant, et une longue agonie

L'Europe n'a jamais eu les outils pour lutter contre les chocs asymétriques, en d'autres termes les accidents de parcours et les crises affectant séparément ses membres. Pire encore: sous sa forme actuelle, l'Europe génère et aggrave ces mêmes chocs.

En temps "normal", les autorités monétaires d'une nation souveraine disposent des armes permettant de lutter, et même de prévenir les crises. Elles peuvent en effet, à loisir, augmenter leurs taux d'intérêt et laisser leur monnaie s'apprécier afin de contenir une économie en état de surchauffe, et vice-versa. Dans une union monétaire, ces instruments et soupapes de sécurité ne sont toutefois plus à la disposition des nations membres. A tout le moins dans l'Union européenne car les Etats-Unis d'Amérique, pour leur part, bénéficient de tous les attributs relatifs à une union monétaire, le premier d'entre eux étant la solidarité.

 Le gouvernement américain fait payer les Etats prospère au profit de ceux en crise

Le gouvernement fédéral US prélève ainsi automatiquement davantage d'impôts depuis les Etats prospères afin de les réinjecter au sein de ceux qui subissent un ralentissement économique. Tandis que les contribuables européens sinistrés et situés dans les pays en crise, voire en dépression, ont subi le phénomène diamétralement opposé puisque c'est eux qui ont subi - et payé - les pertes essuyées par le système bancaire européen. C'est comme si la seule utilité de l'infime budget européen - équivalent à 1% du P.I.B. de l'Union! -  était de payer les fonctionnaires et technocrates bruxellois...

 Les nations déficitaires priées de détruire leur économie

Dans un tel contexte qui entretient et qui attise injustice et déséquilibres, ce ne sont évidemment pas l'Allemagne ni les Pays-Bas - du haut de leur balance des paiements excédentaire de respectivement 7.5 et 10% - qui seraient tentés de manifester un quelconque soutien à aux autres nations censées appartenir à leur propre union monétaire. Ces deux pays feignent également d'ignorer que leurs excédents ont été démultipliés précisément à la faveur du lancement de l'euro.

En toute logique, les nations déficitaires sont donc priées de détruire leur économie et d'assommer leurs citoyens avec leurs "dévaluations intérieures". Même si nul ne sait par quel tour de passe-passe ces nations affublées du qualificatif dédaigneux de "périphériques" sont censées récupérer un peu de leur compétitivité perdue. Compétitivié qui leur a en réalité été confisquée - et même volée - par le Nord à la faveur des réformes Harz!

 L'austérité et les privations imposées totalement improductives

Car les faits sont limpides: l'austérité et les privations imposées à certains membres d'une union monétaire sont totalement improductives en présence d'une politique déflationniste pratiquée par les autres membres de cette même union affichant des comptes publics excédentaires. En attendant, tel est le prix à payer pour le "sado-monétarisme" de certaines nations en flagrant délit de concurrence déloyale, qui exigent néanmoins des sacrifices tout aussi inhumains qu'inutiles. Dès lors, comment s'étonner de la montée en puissance de certains partis (comme Syriza) qui plaident pour une restructuration de dettes bien trop lourdes à assumer, et dont tout le monde sait bien qu'elles seront impossibles à rembourser dans leur intégralité?

 Une génération sacrifiée

Oui, la liquéfaction européenne a effectivement été évitée et l'euro est toujours là, mais au prix du sacrifice de toute une génération. Les dirigeants européens optèrent pour un coût social démesuré à exiger des citoyens européens car ils ignoraient le coût réel - c'est-à-dire financier et bassement pécuniaire - d'une scission de l'Union. L'Europe en est donc réduite aujourd'hui à choisir entre une longue et odieuse agonie ou une implosion spectaculaire.

Michel Santi est directeur financier et directeur des marchés financiers chez Cristal Capital S.A. à Genève. Il a conseillé plusieurs banques centrales, après avoir été trader sur les marchés financiers. Il est l'auteur de : "Splendeurs et misères du libéralisme", "Capitalism without conscience" et "L'Europe, chroniques d'un fiasco économique et politique".

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Commentaires 21
à écrit le 13/01/2015 à 11:51
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le vrai problème des pays faibles de la zone euro , c'est le poids démesuré en valeur de leur fonction publique rapporté à leur PIB . il faut donc commencer par tailler dans ces fonctions publiques pour les dimensionner au niveau des pays les meille...

à écrit le 13/01/2015 à 10:57
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Ça finira par l'implosion spectaculaire. On n'a jamais vu un système monétaire qui ne marche pas être maintenu éternellement. A un moment ou à un autre le "Ne marche pas" finira par s'imposer.

à écrit le 13/01/2015 à 9:25
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Je suis nul en économie mais je sens bien qu'il y a un problème. Effectivement on ne voit que 2 solutions : 1- Améliorer la solidarité entre les états 2- En finir avec l'Euro Franchement je ne vois pas les Allemands donner encore plus aux grecs.

à écrit le 13/01/2015 à 9:23
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EXAT???

à écrit le 13/01/2015 à 8:45
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Celà démontre une fois de plus que l'Europe est à finaliser et non à démanteler.

le 13/01/2015 à 8:55
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On ne peut pas finaliser une europe mal née gangrenee corrompue.... car elle se fera laminer par le reste du monde...dommage car le projet etait interressant....il renaitra sous une forme moins ambitieuse et moins politique dommage pour les financier...

à écrit le 13/01/2015 à 4:42
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Les analyses de Santi sont toujours d' une grande justesse, clarte et brutalite. Neanmoins ici, il s'agit plus d'un constat que d'une analyse puisque les faits qu'il decrit sonts deja averes plutot que speculatifs. La france est depuis quelques annee...

à écrit le 12/01/2015 à 22:48
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Ce Monsieur Santi transpire par tous ses porres le fiel socialiste. Par ailleurs, son histoire sur les taxes aux USA est tellement caricaturale qu´il est triste que ce journal publie des choses aussi approximatives. C´est assez triste en effet.

à écrit le 12/01/2015 à 18:59
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1 en europe on est dans une trappe a liquidite 2 aux usa y a bien des transferts, mais la floride n'a pas encore envisage de s'offrir ' la retraite a 20 ans pour tous payee par personne par des dettes que rembourseront les californiens' et ca, ca ...

à écrit le 12/01/2015 à 18:54
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Vivement une Europe de libre échange pour tous et pas seulement pour les grands groupes mondiaux et les plus riches. Vivement une Europe faites pour ces citoyens et qui sache attendre que ceux qui y appartiennent aient tous une vie sûr et correcte av...

à écrit le 12/01/2015 à 18:39
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Franchement, c'est n'importe quoi !!! Et pourquoi pas une petite guerre, n'est-ce pas ? Il est vrai qu'étant en Suisse....

à écrit le 12/01/2015 à 17:40
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Ça fait plaisir à lire, une telle analyse. On commencerait à ouvrir les yeux ? Il faut sortir de l'euro et de l'UE (et de l'OTAN, d'ailleurs). Pas d'autre (bon) choix.

le 13/01/2015 à 9:35
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N'oubliez pas de vous barricader chez vous, d'acheter du sucre et des bougies....les pantoufles et le bonnet sont aussi recommandés !!!!

à écrit le 12/01/2015 à 14:32
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C'est sûr que l'Europe ne peut pas vivre éternellement au-dessus de ses moyens et que le retour à la normal sera long et douloureux, mais n'exagérons pas ! Pas d'agonie en perspective...

le 12/01/2015 à 15:00
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Pouvez-vous argumenter votre opinion ?

à écrit le 12/01/2015 à 14:09
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Article qui a le mérite de sortir des senties battus de l'eurobéatisme habituel. Comme le dit XX c'est un article à charge mais il y en a tellement peu! Et cela fait du bien de voir un économiste qui dit tout haut ce pense de nombreux européens. cett...

le 12/01/2015 à 15:57
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Oui, suivons la tentation britannique et sortons de l’Union pour se ruiner en deux coups de cuillers à pot, comme le prédisent les principaux acteurs économiques britanniques, les mêmes qui aiment à se draper dans un patriotisme nostalgique d’une fau...

le 12/01/2015 à 16:58
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Facile de faire dans le négativisme et l'apocalypse est pour demain. L'Europe n'est pas les USA, c'est sûr, mais çà ne marche pas si mal que çà, surtout avec le passé qu'on trimbale. Passé que certains ont l'air de regretter : les guerres, les morts...

à écrit le 12/01/2015 à 13:51
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Article uniquement à charge et donc totalement partial. Du journalisme du dimanche, pour la simple raison que les points noires sautent aux yeux alors que les bons points faut travailler pour les mettre en évidence... mais le travail c'est une valeur...

le 12/01/2015 à 14:08
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Pouvons nous avoir ne serait-ce que 2 bons points? Passons. J'aime beaucoup que M. Santi rappelle le fonctionnement de l'Union Monetaire des USA.

le 12/01/2015 à 14:24
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Mr Santi est un militant pas très éclairé anti-européen comme bcp de ses confrères de WS...Il est inutile de perdre son temps à le contredire, il nierait même des faits pour soutenir ses thèses

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