Quand le CNRS fait la course en tête...ou presque

Le CNRS arrive en tête d'un nouveau classement scientifique mondial. De quoi être fier? Il faut voir de plus près. par François Garçon, enseignant chercheur, Paris 1

Enfin une bonne nouvelle pour Geneviève Fioraso, son ministère, les collègues, l'Elysée et Paris Match : « Le CNRS arrive en tête du nouveau classement scientifique mondial "Nature Index"[1 et 2]. Sacrée gifle pour tous ceux qui, hier encore, ricanaient au spectacle d'un organisme bourré de chercheurs fonctionnaires, exemptés à vie d'enseignement, ne se coltinant donc ni amphithéâtres bourrés, ni corrections de copies, astreints à une évaluation rigolote se limitant à du déclaratif. Voici donc nos employés de bureau être aussi de solides chercheurs, au moins si l'on se fie aux données bibliométriques, hier encore dénoncées pour leur caractère lacunaire, leur servilité à l'égard des revues anglo-saxonnes qui tiennent le terrain et favorisant les positions des établissements supérieurs américains. Dont acte, le CNRS fait la course en tête, et il faut s'en féliciter. Parions qu'à la lecture de cette nouvelle, le ministère de l'Enseignement supérieur s'est fendu de félicitations à l'attention d'Alain Fuchs, président et directeur-général de l'établissement. A charge pour lui de répercuter les compliments dans la gigantesque machine dont il a charge.

 Fiers d'être Français et universitaires

Du coup, nous voilà très fiers d'être Français et universitaires ! Au fait, qui sont les établissements qui suivent ? Harvard, Cambridge, l'ETHZ, le Caltech ? Euh, non, pas vraiment. En deuxième position, on découvre avec surprise un drôle de truc nommé l'Académie des sciences de Chine ! Kézako ? Suit ensuite le Max Planck Institute. Là, on connaît mieux. L'institut allemand est tentaculaire et, à la différence du CNRS, 80% de ceux qui y font des séjours post-docs partent ensuite enseigner dans les universités allemandes.

Harvard à la quatrième place

Quant à la prestigieuse Harvard, qui domine généralement le pack des universités mondiales toutes catégories confondues, elle se contente de la 4ème place, le MIT de la 7ème, Cambridge de la 8ème. Le CNRS renvoie dans les choux Berkeley (12ème) ou encore le Caltech (13ème, avec seulement 1196 publications). Et là, on tique quand même : comment comprendre qu'avec ses 33 prix Nobel, cet établissement que le Times Higher Education hisse en pôle position mondiale incontestée depuis quatre ans, lambine ici à la 13ème place ?

Un calcul fondé sur le nombre total de publications

Forgeant une méthodologie assez peu subtile, Nature fonde ses calculs sur le nombre d'articles publiés émanant de chacun des établissements. Se pourrait-il alors que le nombre de chercheurs impacte le classement? Beaucoup de chercheurs, généralement, publient davantage que peu de chercheurs. Dès lors, si l'on rapporte le volume des publications aux effectifs de chercheurs titulaires dans chacun de ces établissements, qu'obtient-on ? Minuscule de taille, le Caltech compte à peine 300 professeurs à plein temps. Avec 1196 publications, chaque titulaire a donc publié 3,9 articles dans l'année. Harvard, classé 4ème, compte 1084 professeurs titulaires qui, chacun, a signé 2,4 articles sur la même période.

Au fait, le CNRS ça donne quoi ? L'organisme public français compte 11 204 chercheurs à plein temps (je ne compte pas les vacataires et autre chercheurs non titulaires). A eux tous, ils ont publié 4894 articles, soit .... 0,43 article chacun. Vous avez bien lu. Nos chercheurs fonctionnaires à plein temps, exemptés d'enseignement qui plus est, ce qui n'est pas le cas des confrères à Cambridge, à Boston ou à Zurich, publient donc 5,5 fois moins que les collègues d'Harvard, 9 fois moins que ceux du Caltech. C'est là aussi un critère pour lire la statistique que fournit Nature. Là, on revient sur terre, on touche le dur. Au CNRS, on rebouche le champagne, on se contente d'un léger cidre.

François Garçon

 [1] https://www.natureindex.com/institution-outputs?region=global&subject=543ddf38140ba05a167e14bb&sort_by=n_article&generate=Generate

[2] https://www.aef.info/abonne/depeche/495560, lettre de l'AEF, 13 février 2015.

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Commentaires 17
à écrit le 22/02/2015 à 20:10
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En cherchant un peu quelle joie de vous retrouver à tous les coins de rue(s) avec vos attaques incessantes sur l'état français et ses institutions...Science-Po, X, etc., sans oublier votre entretient hallucinant sur le recrutement à l'université et ...

à écrit le 16/02/2015 à 21:20
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En sociologie, ils ne doivent pas publier tous les mois, des résultats. Des publis, quand il faut en sortir pour être bien notés, souvent, c'est du réchauffé un peu modifié ou amélioré, donc pas très nouveau. Ce qui est intéressant est de savoir le...

à écrit le 16/02/2015 à 21:01
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Pas la peine d'une page entière pour rapporter le nombre de publi à celui des chercheurs

à écrit le 16/02/2015 à 19:23
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Cet article n'est pas très objectif car il mélange les disciplines Pour arriver a quelque chose d'acceptable il faut comparer ce qui est comparable, par exemple les sciences de la vie avec les sciences de la vie Harvard sera alors devant le cnrs ma...

à écrit le 16/02/2015 à 15:08
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Rappelez-nous qui a publié votre ouvrage en 2006 ? CNRS éditions...

le 16/02/2015 à 15:47
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Et vous M FO ? quels sont vos mérites ?

à écrit le 16/02/2015 à 15:03
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Cher Monsieur, rappelez-nous combien de fois vous avez candidaté infructueusement au CNRS ?? 2 fois ou 3 fois ? mais comme tout le monde vous avez eu du mal à le digérer manifestement... Rappelez-nous quelles sont les modalités de votre évaluation ...

le 16/02/2015 à 15:16
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@ FO: nombre de candidatures au CNRS: 0 (zéro) nombre d'articles (ne pas oublier le pluriel) ces dix dernières années: des tas, sept ouvrages chez de bons éditeurs (CNRS Edition, Flammarion, Perrin, Presses polytechniques et universitaires romandes,...

à écrit le 16/02/2015 à 14:50
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C'est bien d'avoir des chiffres, des moyennes de totaux des classements ... ça fait mathématique et rigoureux. C'est dans l'air du temps, quand on n'a pas d'arguments on aligne des chiffres, généralement à son avantage. La qualité, elle, et la valeur...

à écrit le 16/02/2015 à 14:26
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Je ne vois pas comment on peut d'un coté se lamenter sur le rang des écoles françaises dans les classements internationaux souvent basé sur le nombre de publications et critiquer le fait que le cnrs remonte en haut du classement sur ce même critère. ...

à écrit le 16/02/2015 à 13:13
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en fait on compare tout et n'importe quoi c'est donc un classement (inutile) de plus, qui ne fait que confirmer le viel adage: comparaison n'est pas raison

à écrit le 16/02/2015 à 12:51
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c 'est clair qu'un classement qui place Berkeley (usine a Nobel) a la 12 eme place perd en credibilite

à écrit le 16/02/2015 à 11:55
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D'un côté F. Garçon a raison: en prenant en compte le nombre totale de chercheurs le victoire est moins évident. De l'autre côté cet argument est partiellement faux: le système scientifique français compte traditionnellement beaucoup de chercheurs pe...

à écrit le 16/02/2015 à 11:48
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C'est bien de critiquer la méthodologie du classement mais il faut aussi critiquer dans ce cas-là la pertinence du critère basé sur le nombre de publications. Toutes les publications ne se valent pas. Mieux vaut publier une publication de qualité que...

à écrit le 16/02/2015 à 10:54
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Mr François Garçon , votre haine des fonctionnaires ne viendrait il pas d'un échec à un concours de recrutement ? Mais vous préférez peut être le copinage des lobbies qui magouillent dans les instituts "privés" ( avec des subventions de l'état...)

à écrit le 16/02/2015 à 10:50
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Incroyable. Le CNRS arrive en tete et dans n'importe quell autre pays, on nous aurait vante ce resultat. En France non! On nous explique avec une precision incroyable que tout le classement ne veut rien dire avec un esprit de denigrement frolant le s...

le 17/02/2015 à 15:48
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@DRRW: vous écrivez: "Le CNRS arrive en tête et dans n'importe quell (sic) autre pays, on aurait vanté ce résultat". Et bien justement non, car "aucun autre pays" ne s'est doté d'un tel monstre. Les chercheurs sont dans les universités, où ils enseig...

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