Ces PME condamnées à se digitaliser ou mourir

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, ces PME condamnées à se digitaliser ou mourir

Sur le papier, les entreprises françaises sont entrées dans l'ère du numérique, les PME y compris. Si par numérique on entend l'accès au net, alors oui, 100 % des PME françaises sont aujourd'hui connectées.

Mais qu'en est-il des usages ? Une entreprise digitale, c'est bien entendu bien plus qu'une entreprise connectée, ce qui ne la différencie en rien des autres. C'est d'abord une entreprise qui automatise une partie de ses process grâce à l'outil informatique. Et notamment dans toute une série de fonctions support : la comptabilité, la logistique, les achats, les services généraux, les ressources humaines. C'est éventuellement une entreprise qui gère une partie de ses commandes, de ses ventes via le net. Il existe des statistiques là-dessus. Elles sont parcellaires. Et les PME françaises ne sont ni les pires ni les meilleurs élèves européens, dans la plupart des domaines, à l'instar de la part des PME disposant d'un site web avec possibilité de commande ou de réservation par exemple.

Mais qu'est-ce vraiment une entreprise digitalisée ? C'est d'abord une entreprise qui sait automatiser les tâches répétitives et les processus logico-déductifs et optimiser de la sorte tout ce qui relève de l'administratif notamment. C'est ensuite une entreprise qui se pense en système communiquant, en interne et en externe. Qui sait faire circuler et filtrer l'information, la traiter de façon automatique. C'est aussi une entreprise qui sait faire remonter l'information client et l'information marché, pour s'ajuster, réagir, se repositionner, voire innover rapidement, ou encore assurer l'après-vente. C'est encore une entreprise qui sait alléger les fonctions de contrôle, en mettant en place des processus fiables, repérant et détectant les erreurs. Bref c'est une entreprise qui sait s'appuyer sur l'outil informatique pour développer son agilité et devenir une organisation apprenante. Ce n'est pas forcément une entreprise qui est en pointe en matière d'usage des outils de l'intelligence artificielle. Mais c'est une organisation qui accroît son intelligence via les outils numériques.

Un coût fixe au rendement différé

Cela évidemment ça ne se mesure pas. Mais cela demande de lourds investissements matériels et surtout immatériels en amont, et de puissants effets d'apprentissage. Il y a un coût, dont le rendement est différé. Mais c'est un coût fixe. Il est plein d'avantages pour une entreprise à forte perspective de croissance, puisqu'il confère une composante zero marginal cost à son modèle d'affaires. Il est plein de risque en revanche, pour une petite entreprise, soumise aux aléas d'un marché étroit et dont les coûts fixes peuvent vite l'étrangler en période de basses eaux.

Cela demande aussi d'internaliser les services informatiques, et que ces derniers soient en mesure de designer des systèmes sur-mesure, ajustés aux spécificités de l'entreprise, d'en assurer la maintenance et l'évolution. Autrement dit, de ne plus externaliser cela auprès de SSII, qui vendent du prêt à porter facilement imitable et approximativement ajusté. Gros frein là encore pour des TPE ou PME.

Cela demande de mobiliser des moyens sur la direction des ressources humaines pour retravailler les postes de travail, repenser les métiers comme un assemblage de tâches et redéfinir leur contenu. Pour faire en sorte que le numérique soit un outillage en complément de l'individu. Mais, là encore, très peu de PME sont dotées, lorsqu'elles sont dotées, de moyen à la hauteur du défi.

Cela demande une taille critique et une diversité de métiers, pour permettre une mobilité en interne des personnels qui sont les plus exposés à l'automatisation. Nouvel obstacle donc pour les petites structures.

Et, puis, il y a aussi la question de la pyramide des âges dans une entreprise. Or la petite structure pérenne est aussi celle qui vieillit avec son patron. Celle où se crée des liens de fidélité. Où l'ancienneté fige les habitus. Or il faut du turnover en haut ou en bas des organisations pour que la génération qui est tombé à la naissance dans la marmite du numérique modifie les comportements.

Bref, pour de multiples raisons, il y a encore un monde entre la présence des outils numériques et la digitalisation des modèles d'affaires. Et plus que les autres, les PME risquent de demeurer sur les bas-côtés de l'histoire.

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Commentaire 1
à écrit le 03/01/2019 à 15:11
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Certains lycées ont bien compris les problèmes à venir en lançant après un bac technique et un bts d'informatique une licence pro effectuée en université, ce qui donne des jeunes polyvalents aussi capables de faire de petites interventions mécaniques...

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