Emmanuel Macron et Gabriel Attal sont pris au piège de leur manque de préparation. S'ils avaient planifié cette transition depuis deux ou trois ans, nous n'en serions pas là. Il y a un commissaire au Plan [François Bayrou], mais qu'a-t-il fait pendant des années ? C'est ce qu'on peut reprocher au gouvernement.
Emmanuel Macron, comme la plupart des gouvernements, a mis fin à son ambition écologique. Dont acte. Une fois qu'on a constaté cela, il faut expliquer pourquoi. Ce n'est pas parce qu'il ne veut pas être écolo. C'est parce que les nécessaires transitions écologiques s'opposent à une société réfractaire, qui trouve que cette transition est trop difficile en ce moment. Le Rassemblement national explique tout simplement que le réchauffement climatique n'existe pas, et ce parti représente 40 à 50 % des Français. Emmanuel Macron comme la gauche, la droite, l'extrême gauche et l'extrême droite, doivent comprendre que le « y a qu'à » n'existe pas en matière d'écologie.
Dans ce débat entre l'agriculture et l'écologie, il n'y a pas de solution facile. Pour faire face à la colère des agriculteurs, il n'y avait pas d'autre alternative que de répondre à leurs demandes. Si le gouvernement avait continué à défendre les normes sur les pesticides, les agriculteurs n'auraient jamais accepté quoi que ce soit.
Concilier écologie et agriculture est une phrase qui s'écrit simplement. C'est une chose qui se réalise difficilement. Tout dépend de quelle agriculture on parle. Il y a une agriculture durable qui concilie, mais les gros producteurs ne concilient pas. Le président de la FNSEA [Arnaud Rousseau] n'est pas un agriculteur qui n'arrive pas à boucler les fins de mois. C'est un gros céréalier avec 700 hectares. Avec les aides de l'Union européenne, il gagne entre 120.000 et 130.000 euros au moins par an. On ne va pas dire qu'il est au bord du suicide. La plus grande partie des 9 milliards d'euros d'aides européennes que la France reçoit va aux gros agriculteurs, et ce sont eux qui emploient le plus de pesticides. Ce sont donc eux qui mènent la danse. Alors comment arrive-t-on à transformer toute l'agriculture ? C'est un vrai débat de société.
Transformer la manière de produire et de vivre
Ce n'est pas simplement un problème d'aide financière, c'est un problème de conception de l'agriculture. Quel type de souveraineté alimentaire voulons-nous pour la France ? Aujourd'hui, 90 % des normes qui résultent du Green Deal européen sont objectivement justes. Le problème, c'est le temps qu'il faut à la société et aux agriculteurs pour s'adapter à cette nécessité. Pour sortir de l'agriculture intensive, les citoyens, producteurs, agriculteurs, consommateurs, doivent transformer leur manière de produire et de vivre. C'est difficile et ça prend du temps.
Si demain les écologistes sont au pouvoir et mettent en place toutes les normes nécessaires à l'environnement, il y aura des centaines de milliers d'agriculteurs dans la rue. Et ce n'est pas une compensation financière qui suffira à changer la donne. Quand les écolos et la gauche disent aujourd'hui qu'il n'y a pas de contradiction entre l'agriculture et la transition écologique, ce n'est pas vrai. Pour arriver à une agriculture écologiquement supportable, c'est toute une transformation qu'il faut soutenir. »
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