Hollande et le chômage : le pari perdu

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui: Hollande et le chômage le pari perdu.
Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi./ DR

François Hollande a-t-il encore une chance d'inverser durablement la courbe du chômage avant les élections de 2017 ? Sans artifice non. Pourtant les derniers chiffres sont bons. Le nombre de sans-emplois de la catégorie A a diminué de 27.100 personnes, son plus fort recul depuis les chiffres très controversés d'août 2013 lié à un bug chez SFR qui avait, souvenez-vous, fait exploser le nombre de radiations par défaut d'actualisation. Si un début de polémique, une fois encore sur le nombre de radiations, a entouré la nouvelle annonce de décrue, le plus important n'est pas là. Et pour cause. Le flux de croissance n'est pas suffisant pour assurer une baisse pérenne du nombre de personnes sans emploi.

Depuis trois trimestres (en intégrant les premières estimations pour les trois premiers mois de 2016), la croissance reste bloquée à 0,3%. C'est trop peu pour absorber la hausse de la population active (proche de 150.000 sur un an). Bien sûr, la job machine semble à nouveau sur de bons rails : l'emploi salarié, principalement marchand (soit hors emplois dans les administrations, la santé, l'éducation et l'action sociale) est en progression. Un peu plus de 47.000 nouveaux postes nets ont ainsi été créés en 2015, la première hausse depuis 2011. Mais c'est poussif. Surtout que l'unique locomotive, c'est l'intérim (avec plus de 9 emplois créés sur 10 en 2015).

Le gouvernement peut toujours se rassurer... l'alerte est sérieuse

La progression du travail temporaire est allée crescendo et, malgré un mois de novembre perturbé par les attentats de Paris et de Saint-Denis, le quatrième trimestre a été plus dynamique que le troisième. Or, d'après notre simulation à Xerfi, l'intérim est un indicateur avancé de 1 à 2 mois des variations du chômage. Cela signifie qu'il y a de l'espoir pour que s'ancre début 2016 une légère inversion de la courbe du chômage. Mais rien n'est acquis : l'intérim traduit aussi un besoin accru de flexibilité des entreprises.

En clair, cette évolution est réversible en cas d'aléa. L'intérim est donc moins que par le passé un indicateur avancé de l'emploi permanent (CDI). Or précisément, les indicateurs avancés de l'activité (le climat des affaires) se sont repliés en février, signalant un trou d'air de l'activité. En écho, les chiffres de Prism'emploi (la fédération patronale des agences d'intérim) témoignent d'un nouveau coup de mou de l'intérim en janvier : après +9,7% en décembre, la croissance de l'intérim en glissement annuel ralentit en janvier (+5,6%), signe d'une reprise en dents de scie. En variations mensuelles, selon nos calculs, l'emploi dans l'intérim aurait donc reculé entre décembre et janvier de près de 17.000 postes.

Reste l'emploi aidé pour modifier la trajectoire

A n'en pas douter le timing de l'emploi aidé va améliorer le tableau d'ensemble. L'alternance (apprentissage et professionnalisation), avec près de 614.000 jeunes en activité en décembre 2015, a augmenté de 1,6% sur un an. Une progression anecdotique, mais qui fait suite à une baisse de 2% fin 2014. Rappelons que le repli du nombre d'emplois en alternance avait totalement absorbé jusqu'ici la montée en régime des emplois d'avenir.

Aujourd'hui, toutes les composantes de l'emploi aidé sont au diapason (seuls les contrats uniques d'insertion reculent) et lorsque l'on additionne l'ensemble des statuts dans les secteurs marchand et non marchand, l'emploi aidé est à nouveau en hausse (+65.000 entre décembre 2015 et décembre 2014), participant ainsi à l'amélioration générale. Et ce, sans compter le top départ du plan de formation de 500.000 chômeurs.

Améliorations ponctuelles, mais profil en tôle ondulée sans véritable tendance, c'est le bilan à ce stade. Et sans un retour rapide de la croissance, François Hollande perdra au moins un de ses deux paris phare. Soit il continue à faire tourner artificiellement la job machine de l'emploi aidé... et il perdra sur le front du déficit budgétaire. Ou réciproquement.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 3
à écrit le 09/03/2016 à 8:34
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Suite. Le changement est lié à l'énergie. (répartir les charges sociales sur le travail et sur l'énergie)

à écrit le 08/03/2016 à 9:50
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Maintenant la progression du travail temporaire ne signifie plus la reprise mais simplement un changement du code du travail et une précarisation!

à écrit le 08/03/2016 à 9:10
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Je me permets de citer Jean Monnet: "les hommes n'acceptent le changement que dans la nécessité, et ils ne voient la nécessité que dans la crise". Sommes nous en crise?

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