Industrie verte-logistique, même combat

OPINION. La filière transports de marchandises et logistique est résolument engagée dans sa propre décarbonation (transition énergétique du transport routier, report modal, entrepôts de plus en plus écologiques...). Elle a également un rôle essentiel, souvent occulté, dans l'effort de verdissement de l'ensemble de l'économie productive. Par Anne-Marie Idrac, Présidente de France Logistique
(Crédits : DR)

La raison d'être des transports de marchandises et de la logistique est d'accompagner la production de l'industrie, l'agriculture, la construction, et enfin la distribution.

Rappelons quelques chiffres de flux : hors transit, l'agroalimentaire représente 30%, la construction 28%, l'énergie et les déchets 10%, les produits intermédiaires de l'industrie et les véhicules encore 10%, le reste donc quelque 20%.

Or, concrètement, l'industrie verte de demain passe par deux politiques complémentaires : la réindustrialisation et la décarbonation des industries existantes. Elles conduisent toutes deux à une augmentation sur notre territoire des flux et des stocks de produits.

En effet ces deux tendances ont pour effet, en réduisant la part des importations, une certaine dé-massification des flux et stocks de produits en circulation chez nous. Donc leur croissance. Cela au bénéfice de notre balance commerciale, de l'emploi et la valeur ajoutée nationale.

Réindustrialiser consiste - d'un point de vue logistique - à relocaliser sur notre territoire la multitude de flux/stocks de matières, composants et produits intermédiaires localisés auparavant de l'étranger.

Pour l'industrie existante, un important levier de décarbonation est le remplacement des matières premières neuves, par des matières recyclées. Cela vaut par exemple pour l'acier (à partir de ferrailles recyclées et non plus de minerai), l'aluminium (à partir de cannettes) ou le plastique....

D'un point de vue logistique, cette économie circulaire se traduit par toute une chaine de multiples flux/stocks pour recueillir/trier/ramasser puis consolider les nouvelles matières premières. C'est une organisation complexe et répartie sur tout le territoire, avec des systèmes de collecte et des hubs de regroupements pour finalement re-massifier et minimiser les distances des flux.

De même, les grands chantiers d'équipements énergétiques (nucléaire, éoliennes), ou la tendance à la rénovation des bâtiments auront besoin de puissantes organisations logistiques.

Quant à la décarbonation de la distribution et du commerce, elle suppose des chaînes bien organisées de massification et de mutualisation.

Tout cela avec l'usage des véhicules les plus verts possible.

La réussite des politiques de réindustrialisation passe (aussi) par l'amélioration des performances des chaines logistiques

L'indice de compétitivité logistique de la Banque Mondiale (LPI), paru fin avril, place la France à la 13e place mondiale, derrière beaucoup de nos proches voisins et concurrents pour l'implantation industrielle, malgré quelques progrès notamment douaniers.

Dans le cadre de la stratégie nationale publiée par le gouvernement en décembre dernier, nous devons donc collectivement poursuivre nos efforts pour améliorer la compétitivité logistique,  indissociable de son verdissement, avec deux objectifs : en faire un outil d'attractivité des activités productives de demain, et bénéficier sur notre territoire des capacités de création d'emplois et de valeur du secteur lui-même - dont on oublie souvent qu'une large part est facilement délocalisable à quelques dizaines de km de nos frontières.

Le raccourcissement des délais et la simplification des procédures d'implantations industrielles et logistiques sont pour cela cruciales - en y incluant la question compliquée des recours.

La politique bien engagée de décarbonation des chaines logistiques doit aider les acteurs à offrir des solutions toujours plus performantes aux industriels, pour favoriser leur implantation en France.

Plus largement, pour assurer la réussite globale des politiques de décarbonation, il est indispensable de travailler, dans une vision de type « scope 3 », à l'échelle des chaines de valeur et pas seulement sur chacun des maillons.

Ainsi, les émissions du transport de marchandises, si elles doivent évidemment être maîtrisées aux bornes du secteur dans le cadre de la SNBC, peuvent-elles aussi être considérées plus largement au regard de leurs impacts pour la production industrielle nationale. Par exemple, le renouveau industriel national nécessitera sans doute davantage de transports sur notre territoire.  De même, un maillage adéquat de localisation des entrepôts doit-il prendre en compte l'optimisation des distances de transports dans une France en voie de ré-industrialisation verte.

Finalement, l'intensité logistique va de pair avec l'augmentation de la part industrielle de notre croissance, et son efficacité est l'un des leviers de notre redressement productif.

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