L'environnement, oublié de la campagne électorale : est-ce grave ?

Le sujet est peu évoqué, car il n'existe guère de clivage entre gauche et droite. Est-ce vraiment dommageable? Par Matthieu Glachant, professeur d'économie à MINES ParisTech, PSL Research University

A l'évidence, la protection de l'environnement n'émerge pas comme un thème important de ce début de campagne présidentielle. Certes, Nicolas Sarkozy a temporairement créé le buzz à la mi-septembre avec une déclaration interprétée comme climato sceptique. Bruno Lemaire ou François Fillon proposent de retirer le principe de précaution de la Constitution. Jean Luc Mélenchon place la « planification écologique » au cœur de son discours. Les candidats à la primaire écologiste en parlent évidemment beaucoup. Mais tout cela ne résonne pas dans les médias et n'imprime visiblement pas dans l'opinion.

Il y a évidemment une part de conjoncture dans cet état de fait. La crise des migrants, le risque terroriste, le chômage sont des urgences dont le terme est plus court que le changement climatique. Il existe aussi une cause plus structurelle : le thème de l'environnement n'est pas un ingrédient central du clivage droite-gauche. C'est un défaut majeur dans un scrutin majoritaire à deux tours puisqu'il ne peut servir à différencier les offres politiques au second tour de l'élection présidentielle.

Pas de vrai clivage droite-gauche

Un rapide examen du bilan environnemental des trois dernières mandatures accrédite la thèse de la faible pertinence du clivage droite-gauche sur ce thème. Outre le principe de précaution, Jacques Chirac a fait inclure dans la Constitution en 2004 le principe pollueur payeur. Nicolas Sarkozy a lancé an 2007 le Grenelle de l'Environnement qui n'a certes pas livré toutes ses promesses, mais qui reste un moment fort de l'histoire des politiques environnementales en France. Avec l'instauration d'une taxe carbone - pudiquement baptisée Contribution Climat-Energie - ou l'adoption d'une loi sur la transition énergétique qui prévoit la fin du tout nucléaire dans le secteur électrique, François Hollande a également un bilan. Constatons donc que, dans les décisions prises, l'écologie n'a pas été que de gauche. Rien n'étant figé, on pourra rétorquer que l'écologie de droite peut reculer dans le futur en s'appuyant par exemple sur les propos climatiques de Nicolas Sarkozy. Mais ceux-ci ont été vigoureusement critiqués dans son camp, notamment par Alain Juppé.

Est-ce alors une bonne ou une mauvaise chose pour l'environnement que le thème soit dans les faits largement transpartisan et donc peu évoqué lors des élections présidentielles ? Je penche pour la première réponse. Dans un pays où l'alternance est la règle, on évite une volatilité de l'action publique dans un domaine où les entreprises et les collectivités ont besoin d'un cadre stable pour mener des actions et prendre des décisions qui engagent le long terme. Le débat public, et l'apprentissage collectif qu'il suscite, peut intervenir entre les campagnes.

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Commentaires 4
à écrit le 09/02/2017 à 11:43
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Pour mettre de nouvelles écolo-taxes bien-pensantes, tout le monde est d'accord. Et la Gauche est quand même plus écolobscurantiste que la Droite. On a vu un exemple avec la presque pénurie électrique provoquée par Royal qui met nos centrales à l'ar...

à écrit le 23/11/2016 à 8:20
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Tout notre système économique est basé sur l'absence de référence à l'énergie, comme si nous étions encore au moyen age. Est ce le résultat de notre enseignement à l'économie qui ignore la notion de capital humain, de la démographie et de la relatio...

à écrit le 22/11/2016 à 11:45
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Très bonnes remarques et conclusion; la France n'a pas besoin de ce déchirer sur des valeurs sur lesquelles il y a (peut-être) consensus. Et remarquons que le dernier Homo ecologicus s'est éteint à NDDL cette année..

à écrit le 22/11/2016 à 11:34
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Disons que vu la valeur des paroles des candidats lors de leur campagnes électorales il est bon qu'un enjeu aussi majeur que la protection de l’environnement ne soit pas impliqué dans ces guignolades grotesques, c'est en effet peut-être le signe que ...

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