La crise Covid a conforté le rôle essentiel de l'État comme assureur

La 9ème édition du Printemps de l'économie, décalé à l'automne se tient cette semaine. Partenaire de cet événement annuel destiné à vulgariser l'économie pour tous les public, La Tribune publie une série de tribunes autour du thème choisi pour 2021 : les bifurcations du monde post-Covid.
(Crédits : NEXU Science Communication)

Une fois la crise Covid-19 passée, le temps viendra de reposer les seringues et de réfléchir au rôle central qu'aura joué l'État durant cette crise, sur le plan sanitaire bien sûr, mais aussi, de manière spectaculaire, dans la sphère économique. Pendant la crise, l'État s'est substitué aux employeurs pour distribuer des revenus aux ménages (chômage partiel par exemple) ; et il s'est substitué aux consommateurs pour apporter des revenus aux entreprises (fonds de solidarité par exemple). Il l'a fait pour protéger le tissu économique et permettre ainsi un redémarrage rapide et robuste sitôt la crise passée.

Avec le réchauffement climatique et la destruction des écosystèmes, ce type de crise massive pourrait frapper de nouveau dans les années à venir. Le secteur privé pourrait-il en assurer le risque ? Probablement pas. Le modèle des sociétés d'assurance est de mutualiser des risques imparfaitement corrélés entre eux : si la maison d'Alice brûle à Rennes, il y a peu de chance que celle de Pierre brûle simultanément à Strasbourg. En ayant beaucoup de clients, la compagnie d'assurance indemnise un montant relativement stable de dommages chaque année car c'est la moyenne de nombreux risques indépendants les uns des autres.

Or, le propre même d'une pandémie est qu'elle touche tout le monde en même temps : année après année, les assurés doivent tous payer des primes très élevées en prévision d'un dommage énorme qui ne surviendra peut-être pas. La mutualisation des risques ne fonctionne pas.

En l'absence d'assurance, les ménages et les entreprises peuvent s'auto-assurer en accumulant de l'épargne afin de faire face à la crise décennale. Mais cela revient à immobiliser des sommes énormes dans l'attente d'un événement qui ne surviendra peut-être pas. Pas très tentant notamment lorsque les taux d'intérêt réels sont faibles. Alternativement, ils peuvent attendre la prochaine pandémie (ou crise climatique) et, lorsqu'elle surviendra, s'endetter pour surmonter la crise, puis rembourser lorsque l'économie repartira. En attendant la crise suivante...

Sur des intervalles de temps aussi longs, et avec des risques massifs, ce type de programme est hasardeux. Que faire si les banques et les marchés refusent de prêter le moment venu ? En réalité, seul l'État peut, lorsque ses finances inspirent confiance, s'endetter de manière massive : l'État seul a le pouvoir de lever l'impôt, tandis que les agents privés ne lèvent des revenus que de manière aléatoire, s'ils trouvent un emploi ou des clients. Par ailleurs, en cas de crise de liquidité, la banque centrale peut facilement acheter des titres de dette publique, ce qui n'est pas le cas pour les dettes des PME ou des ménages.

Ainsi, la pandémie a mis en avant le rôle essentiel de l'État comme assureur, pour la santé comme pour les risques économiques. Cette assurance est pour partie « automatique » : en cas de maladie ou de perte d'emploi, l'assurance maladie et l'assurance chômage couvrent une partie des dommages, tandis que les prélèvements obligatoires diminuent automatiquement du fait de la baisse des revenus. Avec le « quoi qu'il en coûte », l'État a cependant assuré un risque systémique et accumulé une dette importante. Par leur épargne, les assurés ont financé les transferts massifs de l'État... vers eux-mêmes. Cependant ils ont prêté mais pas donné. Maintenant commence la délicate question du partage de la facture : baisse des dépenses, hausse des impôts, augmentation  des heures travaillées, il faudra faire des choix difficiles. Il faudra, tout en veillant à ne pas nuire à court terme au rebond de l'activité, s'assurer du rétablissement de la capacité de l'Etat à s'endetter de nouveau, massivement, lors de la prochaine crise. Car nous aurons encore besoin de l'État assureur.

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Commentaire 1
à écrit le 12/10/2021 à 8:58
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Sauf que personne ne le lui a demandé, donc le covid a surtout confirmé l’État comme dictateur, à savoir ces gens qui savent mieux que nous ce qui est bon pour nous et ce qui est bon pour nous bizarrement est parfait pour eux. " seul l'État peut, lor...

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