La ville de Paris a besoin d'un fonds d'investissement stratégique

La municipalisation de la Tour Eiffel est une bonne chose. Mais il faudrait aller au delà: la ville de Paris devrait créer un fonds stratégique sur le modèle de Monaco, Shanghaï ou land de Bade-Wurtemberg. Par Alexandre Vesperini, Conseiller de Paris (LR), Conseiller métropolitain du Grand Paris

Le Conseil de Paris vient de voter le changement de statut de la société d'exploitation de la Tour Eiffel (SETE), qui, de société d'économie mixte (SEM) devient donc une société publique locale (SPL). Concrètement, cette évolution juridique permettra à la Ville de Paris d'être actionnaire à 100% de l'entreprise qui gère le plus célèbre monument de France. Bien qu'assurant une réelle coopération entre puissance publique et secteur privé, le statut de SEM faisait entrer dans son exploitation et son actionnariat des entreprises privées, parfois étrangères. En effet, pour un fonds souverain ou une société du secteur, peser sur la stratégie de la Tour Eiffel est évidemment intéressant. Pour la France en revanche, laisser à des intérêts étrangers la possibilité d'orienter l'activité ou le capital de l'un des emblèmes du pays représente un risque en terme de souveraineté et d'image.

 Paris actionnaire de CDG Express?

Si ce changement de statut doit être salué comme une mesure de sagesse et de bon sens, nous ne pouvons pas nous dispenser d'une réflexion plus large, sur le rôle que la Mairie de Paris doit jouer dans l'économie, afin de protéger les intérêts stratégiques de la capitale.

Au contraire, la municipalité devrait pouvoir consacrer une part de ses marges de manœuvres financières à la prise de participation dans certaine sociétés dont l'activité est liée à la performance et au rayonnement de son territoire. Exemple : en 2023 devrait entrer en service la ligne Charles De Gaulle-Express, qui reliera le 1er aéroport de France au centre de la capitale.

Dans ce but, une société publique détenue par SNCF Réseau et Paris Aéroport a été créée par la loi Macron en 2015. Ne pourrait-on pas envisager que la mairie de Paris soit également actionnaire de cette entreprise, afin que soient promus les intérêts des Parisiens, qu'ils soient financiers (prise en charge des travaux et de la maintenance) et sociaux (nuisances dues aux installations en surface, porte de La Chapelle) ? A l'heure où l'État réduit ses investissements dans les infrastructures, et face à l'inertie des monopoles historiques (SNCF, RATP), la Ville de Paris serait bien inspirée de jouer un rôle de collectivité locale stratège, en pesant sur la définition et le fonctionnement d'équipements essentiels pour son agglomération.

La cession par l'État des aéroports de Nice-Côte d'Azur (Nice, Cannes-Mandelieu, Saint-Tropez) a ainsi suscité l'attention de la Principauté de Monaco, laquelle souhaite renforcer son attractivité. Voilà encore un exemple qui témoigne de l'importance pour une collectivité d'investir certains marchés, pour des raisons stratégiques, pour des raisons de souveraineté économique.

Paris, opérateur financier?

Dans d'autres domaines, la Ville de Paris pourrait se comporter en opérateur financier afin d'aider le décollage de jeunes pousses du numérique participant à l'amélioration de la qualité de vie des Parisiens. Au lieu d'accorder et de reconduire d'innombrables subventions à des démarches entrepreneuriales plus ou moins abouties, la municipalité aurait intérêt à investir dans des entreprises d'intérêt local majeur amenées à se développer à l'étranger (stationnement intelligent, smart grids, performance énergétique, imprimantes 3D...), se comportant ainsi comme un fonds d'investissement, avec de réelles exigences en termes de rentabilité et de création de valeur. La labellisation de l'identité parisienne sur ces participations, certes minoritaires, mais de référence, aurait l'avantage de renforcer l'image de l'institution municipale en tant que partenaire des entreprises d'avenir.

Bien qu'elle soit dégradée par la politique aventureuse de la gauche, la situation financière de la mairie de Paris devrait lui permettre d'agir, à son niveau, comme certains länder allemands (Bade-Wurtemberg, Shanghai).

En tirant les leçons des erreurs passées (le fiasco de la reprise de Heulliez par la région Poitou-Charentes à l'initiative de Ségolène Royal), en associant les experts financiers qui connaissent le marché et non en s'y substituant, la Mairie de Paris pourrait ainsi agir pour l'intérêt de ses habitants comme de ses caisses... qui en ont grand besoin.

Alexandre VESPERINI

Conseiller de Paris (LR)

Conseiller métropolitain du Grand Paris

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.