Les Banques centrales stabilisent le système, mais à quel prix ?

Le niveau des taux d'intérêt anormalement faible, engendrant des taux négatifs sur les obligations souveraines, semble parti pour durer. De quoi, vraiment, sauver le système économique? Par François Leclerc, @fdleclerc

La Fed n'en finit pas de décider ce qu'elle va faire, tandis que la BCE annonce qu'elle va « réexaminer » début décembre sa politique monétaire. Les deux plus importantes banques centrales du monde ne donnent pas l'impression d'avoir les idées bien arrêtées et divergent sur la conduite à suivre, la première ayant l'intention d'augmenter son principal taux, la seconde de le baisser. Pendant ce temps, des phénomènes hors-normes se développent.

L'attitude de banques centrales ne sachant pas sur quel pied danser est un marqueur parmi d'autres de la crise financière qui se poursuit. Les gouvernements se sont largement remis à elles, mais elles ne parviennent pas à doper la croissance et empêcher les pressions déflationnistes avec leurs outils monétaires. Pis, elles paraissent devenues otages des marchés financiers.

La sempiternelle planche de salut des "réformes structurelles"

Mario Draghi a fait front lors de sa dernière conférence de presse : il a défendu son bilan et rejeté tout doute sur l'efficacité de la politique monétaire, en dépit de ses maigres résultats. Sur quoi porte-t-il ses espoirs ? Sur la sempiternelle planche de salut des « réformes structurelles », ainsi que sur la politique fiscale (l'action budgétaire). Ceux-ci ne produisant pas d'effets significatifs, il n'y a pas selon lui d'autre issue que de les poursuivre. L'action de la BCE ayant permis « d'enclencher une reprise cyclique, il faut désormais relancer l'économie de façon structurelle » selon lui. Cyclique, le grand mot est lâché, qui fait référence à la théorie du culbuto - celle que l'on invoque en dernier ressort - qui veut que tout se redresse par enchantement !

30% des titres souverains européens avec rendement négatif

En Europe, on a assisté à l'apparition de taux négatifs sur le marché de la dette souveraine à court terme (à moins de deux ans), au bénéfice de l'Allemagne, la France et l'Italie. Ce qui n'est pas le moindre des paradoxes pour ce dernier pays doté d'un endettement particulièrement massif, qui a concédé un taux atteignant jusqu'à 8,5%. D'après Bloomberg, la valeur des titres souverains européens dont le rendement est négatif serait de 1.900 milliards de dollars - 30% de leur volume total - le rendement moyen des titres à cinq ans devenant négatif, à -0,025%. Un tel phénomène peut-il être expliqué autrement que par un manque de confiance prononcé dans le futur ?

Le marché de la dette souveraine n'est plus ce qu'il était. Les défenseurs de la pensée libérale s'insurgent devant les dysfonctionnements des marchés générés par les interventions des banques centrales. Mais n'est-ce pas le prix qu'il faut payer pour la stabilisation du système financier ? Le risque étant que celle-ci ne soit que provisoire en raison de la pusillanimité de la régulation.

 Les banques centrales dans le rôle du sauveur

Le temps ne serait-il pas plutôt venu de s'interroger ? « Les économies des pays avancés sont tellement malades que nous devons trouver une nouvelle manière de penser à leur propos » écrit Larry Summers, à défaut d'y être parvenu. C'est ce que font aussi deux membres de la Fed de San Francisco, Thomas Laubach et John Williams, dubitatifs devant les très bas taux d'intérêt constatés aux États-Unis et ailleurs : ceux-ci ne vont-ils pas, se demandent-ils, être une caractéristique durable du monde économique à venir devant la faiblesse de la croissance ? Ce qui les conduit à envisager que les taux négatifs pourraient faire partie de la boîte à outils des banques centrales, afin de combattre les tendances récessives et les trop faibles taux d'inflation sur lesquelles elles butent. A ce jeu-là, les banques centrales seraient éternellement condamnées à jouer les sauveurs, évitant de s'interroger plus avant...

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Commentaires 2
à écrit le 09/11/2015 à 19:18
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Je ne pense pas qu'il soit judicieux de comparer les USA et l'UE sur le plan économique. Les USA ont une mécanique bien rodée alors que l'UE vient seulement de se faire (à l'échelle de l'histoire). Les pays de l'UE ont des cultures et des système éco...

le 12/11/2015 à 17:54
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Hors sujet, le problème des banques centrales et des dettes est mondial, et concerne autant les usa que l'europe. C'est tout le système capitaliste qui est en jeu.

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